Dans leurs moindres détails, les recettes d’antan y sont usitées et les mêmes ambitions débilitantes caressées. Pis : on continue à y confondre l’interview et l’interrogatoire, l’interrogation et l’intimidation, l’enseignement universitaire et le journalisme et, surtout, à y oublier que la confusion des genres et des rôles ne peut donner que de mauvais résultats.
A Manar Slimi, universitaire à la carrure athlétique et aux cheveux teints de noir corbeau qui ne cesse de nous agresser à travers des télés que nous finançons tous grâce à notre contribution forcée au PAM (paysage audiovisuel marocain), rappelons le sens de l’humilité. Et surtout, disons-lui que s’il croit connaître les arcanes de l’interview, il se trompe lourdement. Aussi lourdement que tout rebouteur qui veut exercer la médecine parce qu’il sait comment préparer quelques décoctions, même si elles sont aussi inutiles les unes que les autres.
S’il avait suivi le moindre cours de journalisme, n’aurait-il pas su qu’une bonne maîtrise de la technique de l’interview audio-visuelle exige deux types de compétences qu’il n’a pas. Primo : un solide savoir journalistique ou en sociologue vu que toute interview se fonde sur un travail d’enquête clair et complet et, en particulier, sur l’élaboration d’un questionnaire approprié. Secundo : que les talk-shows auxquels elle sert de fil conducteur nécessitent une compétence de cinéaste vu que sa direction et son montage exigent une connaissance précise des moyens audiovisuels, de leur spécificité et de leurs limites. Les deux aspects s’entremêlant sans cesse dans le travail de l’interviewer, ce dernier se doit donc de rester tout aussi attentif à la qualité humaine de la relation qu’il suscite qu’à la qualité technique du document qu’il réalise.
Plus encore que l’entretien à bâtons rompus, l’interview doit mettre en valeur la personnalité de l’interviewé, via des questions structurées, une absence de toute velléité de truffer celui-ci de commentaires et une propension certaine à laisser l’interlocuteur s’exprimer le plus librement possible. Ce que notre incontournable universitaire ne fait point ; ses commanditaires ayant certainement recours à ses services pour d’autres besognes. Dans l’attente qu’ils se rendent compte que ses prestations sont contre productives et qu’ils le fassent passer par pertes et profits comme ils l’ont déjà fait pour tant d’autres avant lui, beaucoup d’eau aura coulé sous les ponts. Espérons simplement qu’elles n’emporteront pas avec elles notre optimisme, notre sens de la mesure et notre engagement à servir l’intérêt général.