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L'Association de bienfaisance d'Idaousmlal, consciente de l'état de dégradation dans lequel se trouve le patrimoine architectural local de Tafraout et Idaousmlal, décide de sonner le tocsin. Et ce, à travers l'organisation de sa 1ère Rencontre printanière qu'elle consacre à ce sujet. C'est l'occasion aussi de lancer un appel aux acteurs publics et associatifs, pour une prise de conscience collective des spécificités architecturales de la région, et les richesses patrimoniales que véhicule cet héritage séculaire dénotant un savoir-faire traditionnel remarquable qu'il importe de mettre en valeur. Une initiative à marquer d'une pierre blanche.
Libé: Comment jugez-vous de la pertinence de cette manifestation consacrée au patrimoine architectural traditionnel?
Mohamed Jabir: La première Rencontre printanière d'Idaousmlal sur le patrimoine architectural du Souss, intervient dans un contexte où le « béton » commence à envahir sans cesse nos espaces ruraux. Ainsi, dans nos campagnes les plus reculées qu'on croyait jusque-là épargnées, on est agressé, ici et là, par des monstru osités en béton qui se dressent au beau milieu des anciens villages. Exhibant des architectures sans harmonie structurelle, ni esthétique, en porte-à-faux avec le décor ambiant fait de belles bâtisses rustiques en pierres et terre. D'autre part, on constate que les anciennes maisons dont les constructions et les façades présentent des aspects architecturaux dignes d'être préservés, subissent sans cesse des démolitions. A cause des intempéries et de l'usure du temps. Partant de ce constat, notre association a décidé à travers l'organisation de sa 1ère rencontre Printanière d'Idaousmlal, d’attirer l'attention sur cette partie de notre mémoire qui s’estompe.
A travers cette manifestation, à qui est censé s’adresser votre message ?
Nous interpellons d'abord les autorités qui doivent se rendre compte de cette triste réalité. Leur rôle dans l'action de sa conservation et l'aménagement architectural des territoires ruraux est indéniable. Ensuite, les élus, en vertu des attributions que leur confèrent leurs responsabilités dans les conseils communaux. D'autant que leur influeuce sur les décisions d'élaboration des plans d'aménagement à long terme, entre autres, les configurations architecturales de leurs districts ruraux est grande. Sans oublier le tissu associatif, qui doit nous emboîter le pas et s'engager dans des actions de sensibilisation et pourquoi pas contribuer à la préservation de ce patrimoine. Et je pense que, si chacun s'y met, nous gagnerons ce pari.
Voulez-vous nous brosser un tableau de l'état actuel de ce patrimoine dans les régions ?
Nous n'avons pas mené une démarche strictement exploratrice sur le terrain pour dégager des statistiques. Mais, il est évident qu'il y a feu en la demeure et qu'une action de sauvegarde s’avère urgente pour sauver les meubles. L’«hégémonie » des matériaux comme le ciment et les parpaings dans le paysage architectural de nos compagnes crève les yeux. Nos villages commencent à perdre leurs spécificités architecturales. Si rien n'est fait pour arrêter ce rouleau compresseur, ils seront, à coup sûr, complètement défigurés à brève échéance.
Y a-t-il des actions entreprises par votre Association dans le sens de la préservation des bâtisses faisant partie de ce patrimoine ?
Pour le moment nous avons commencé par une démarche strictement de sensibilisation. C'est une action basique très importante pour gagner cette bataille. Lors de notre Rencontre printanière d'Idaousmlal, nous avons organisé un voyage d'une centaine de jeunes Semlalis de Casa et de France … qui se sont rendus à Idaousmlal pour prendre part à la manifestation. Le but, loin d'être festif et récréatif, est surtout de diffuser la connaissance de ce patrimoine et de leur expliquer l'importance de ce legs des ancêtres, qui témoigne d'un art et d'une méthode ingénieuse de nos maîtres artisans d'antan. D'où la nécessité de sa préservation. Nous avons mis à la disposition des visiteurs plusieurs stands où sont exposées des photos mettant en exergue les différents genres de constructions traditionnelles et les motifs ornementaux des façades caractérisant le cachet architectural local. Les générations montantes, dont les parents se sont sacrifiés à les élever et les former dans des écoles, durement, dans les villes, ont dans la foulée oublié, par contrainte financière, leurs maisons et biens de Tamazirt. Si bien qu'on voit aujourd'hui de vieilles constructions, faute d'entretien, s'écrouler. Si alors un jour, un de ces jeunes pensera construire une demeure dans son village, il se souviendra certainement de la leçon.
Y a-t-il d'autres actions en perspective ?
L'Association est en train de construire un centre de formation aux métiers d'artisanat traditionnels, à l'exemple de l'orfèvrerie en argent, la fabrication des babouches locales, la broderie sur le tissu des habits traditionnels locaux,…etc. En plus, nous avons décidé d'y enseigner la maçonnerie traditionnelle locale. Ce métier est menacé de disparition. Nos maîtres artisans l'ayant perpétué des générations durant, ont vieilli ou sont décédés. Si bien qu'on voit aujourd'hui, malheureusement, que nos Mâlmins ne s'y connaissent qu'en béton et parpaings. Quant à l'art et aux techniques de construction traditionnelle, on peine vraiment à trouver ceux qui y excellent encore. Et lorsqu'ils sont disponibles, ils demandent des prix prohibitifs. Voilà pourquoi nous souhaitons que les personnes ainsi formées prennent la relève. Afin de ressusciter cet art, le démocratiser, pour ainsi parvenir à sa préservation. D'autre part, nous menons actuellement des concertations continues d'abord avec un groupe d'architectes «engagés», qui sont soucieux de la préservation de cet art, pour pouvoir élaborer des plans de construction qui prennent en considération nos spécificités, afin de les mettre à la disposition des habitants désireux de réaliser des projets de construction à Idaousmlal. Nous avons ouvert aussi des débats avec les marchands de matériaux de construction à Idaousmlal. Car certains éléments comme la pierre de l'ardoise (dit Akfaf en berbère) utilisée pour faire des motifs décoratifs sur les façades ne sont disponibles que dans la région de Tafraout. Il faut donc les mettre à la disposition des habitants. Plus important, nous venons d’obtenir des élus et autorités locales leur autorisation d’adopter le style architectural traditionnel comme modèle type auquel doit se conformer tout projet de construction.
Comment comptez-vous inciter les habitants à construire selon ces modèles ?
Vous savez, l’association n'a aucun pouvoir d’imposer tel ou tel modèle. Cela relève, bien entendu, des compétences des élus et des autorités. Mais notre seule force de persuasion réside dans notre argumentaire. Nous expliquons l'importance de cette richesse architecturale, les aspects et les valeurs artistiques qu'elle recèle et ses éventuelles implications dans la vie socioéconomique des populations de la région. Par contre, nous avons commencé par donner l'exemple et cela a réussi. L'Association de bienfaisance d'Idaousmlal a entrepris plusieurs constructions dans le cadre du renforcement et de la mise en place des équipements socioculturels dans la région (mosquée, centre de formation aux métiers d'artisanat local, foyer féminin…). Nous avons, alors, fait montre d'un minutieux et intelligent respect de la reproduction de l'architecture locale. Les gens n'ont pas contesté. Ils ont trouvé que c'est du beau travail. Les passants s'arrêtent souvent pour admirer ces œuvres et les prendre en photos. Une prise de conscience s’est vite opérée chez les habitants. On a vu beaucoup d'entre eux qui entreprennent des projets de construction, soit des ouvrages d'habitation ou autres, imiter les modèles s'inspirant de l'architecture locale. C'est déjà un grand pas et un acquis pour nous. Notre souhait est de faire du centre d'Idaousmlal un patelin exemplaire, un modèle à suivre dans toute la région, en matière d'architecture originale locale.
Libé: Comment jugez-vous de la pertinence de cette manifestation consacrée au patrimoine architectural traditionnel?
Mohamed Jabir: La première Rencontre printanière d'Idaousmlal sur le patrimoine architectural du Souss, intervient dans un contexte où le « béton » commence à envahir sans cesse nos espaces ruraux. Ainsi, dans nos campagnes les plus reculées qu'on croyait jusque-là épargnées, on est agressé, ici et là, par des monstru osités en béton qui se dressent au beau milieu des anciens villages. Exhibant des architectures sans harmonie structurelle, ni esthétique, en porte-à-faux avec le décor ambiant fait de belles bâtisses rustiques en pierres et terre. D'autre part, on constate que les anciennes maisons dont les constructions et les façades présentent des aspects architecturaux dignes d'être préservés, subissent sans cesse des démolitions. A cause des intempéries et de l'usure du temps. Partant de ce constat, notre association a décidé à travers l'organisation de sa 1ère rencontre Printanière d'Idaousmlal, d’attirer l'attention sur cette partie de notre mémoire qui s’estompe.
A travers cette manifestation, à qui est censé s’adresser votre message ?
Nous interpellons d'abord les autorités qui doivent se rendre compte de cette triste réalité. Leur rôle dans l'action de sa conservation et l'aménagement architectural des territoires ruraux est indéniable. Ensuite, les élus, en vertu des attributions que leur confèrent leurs responsabilités dans les conseils communaux. D'autant que leur influeuce sur les décisions d'élaboration des plans d'aménagement à long terme, entre autres, les configurations architecturales de leurs districts ruraux est grande. Sans oublier le tissu associatif, qui doit nous emboîter le pas et s'engager dans des actions de sensibilisation et pourquoi pas contribuer à la préservation de ce patrimoine. Et je pense que, si chacun s'y met, nous gagnerons ce pari.
Voulez-vous nous brosser un tableau de l'état actuel de ce patrimoine dans les régions ?
Nous n'avons pas mené une démarche strictement exploratrice sur le terrain pour dégager des statistiques. Mais, il est évident qu'il y a feu en la demeure et qu'une action de sauvegarde s’avère urgente pour sauver les meubles. L’«hégémonie » des matériaux comme le ciment et les parpaings dans le paysage architectural de nos compagnes crève les yeux. Nos villages commencent à perdre leurs spécificités architecturales. Si rien n'est fait pour arrêter ce rouleau compresseur, ils seront, à coup sûr, complètement défigurés à brève échéance.
Y a-t-il des actions entreprises par votre Association dans le sens de la préservation des bâtisses faisant partie de ce patrimoine ?
Pour le moment nous avons commencé par une démarche strictement de sensibilisation. C'est une action basique très importante pour gagner cette bataille. Lors de notre Rencontre printanière d'Idaousmlal, nous avons organisé un voyage d'une centaine de jeunes Semlalis de Casa et de France … qui se sont rendus à Idaousmlal pour prendre part à la manifestation. Le but, loin d'être festif et récréatif, est surtout de diffuser la connaissance de ce patrimoine et de leur expliquer l'importance de ce legs des ancêtres, qui témoigne d'un art et d'une méthode ingénieuse de nos maîtres artisans d'antan. D'où la nécessité de sa préservation. Nous avons mis à la disposition des visiteurs plusieurs stands où sont exposées des photos mettant en exergue les différents genres de constructions traditionnelles et les motifs ornementaux des façades caractérisant le cachet architectural local. Les générations montantes, dont les parents se sont sacrifiés à les élever et les former dans des écoles, durement, dans les villes, ont dans la foulée oublié, par contrainte financière, leurs maisons et biens de Tamazirt. Si bien qu'on voit aujourd'hui de vieilles constructions, faute d'entretien, s'écrouler. Si alors un jour, un de ces jeunes pensera construire une demeure dans son village, il se souviendra certainement de la leçon.
Y a-t-il d'autres actions en perspective ?
L'Association est en train de construire un centre de formation aux métiers d'artisanat traditionnels, à l'exemple de l'orfèvrerie en argent, la fabrication des babouches locales, la broderie sur le tissu des habits traditionnels locaux,…etc. En plus, nous avons décidé d'y enseigner la maçonnerie traditionnelle locale. Ce métier est menacé de disparition. Nos maîtres artisans l'ayant perpétué des générations durant, ont vieilli ou sont décédés. Si bien qu'on voit aujourd'hui, malheureusement, que nos Mâlmins ne s'y connaissent qu'en béton et parpaings. Quant à l'art et aux techniques de construction traditionnelle, on peine vraiment à trouver ceux qui y excellent encore. Et lorsqu'ils sont disponibles, ils demandent des prix prohibitifs. Voilà pourquoi nous souhaitons que les personnes ainsi formées prennent la relève. Afin de ressusciter cet art, le démocratiser, pour ainsi parvenir à sa préservation. D'autre part, nous menons actuellement des concertations continues d'abord avec un groupe d'architectes «engagés», qui sont soucieux de la préservation de cet art, pour pouvoir élaborer des plans de construction qui prennent en considération nos spécificités, afin de les mettre à la disposition des habitants désireux de réaliser des projets de construction à Idaousmlal. Nous avons ouvert aussi des débats avec les marchands de matériaux de construction à Idaousmlal. Car certains éléments comme la pierre de l'ardoise (dit Akfaf en berbère) utilisée pour faire des motifs décoratifs sur les façades ne sont disponibles que dans la région de Tafraout. Il faut donc les mettre à la disposition des habitants. Plus important, nous venons d’obtenir des élus et autorités locales leur autorisation d’adopter le style architectural traditionnel comme modèle type auquel doit se conformer tout projet de construction.
Comment comptez-vous inciter les habitants à construire selon ces modèles ?
Vous savez, l’association n'a aucun pouvoir d’imposer tel ou tel modèle. Cela relève, bien entendu, des compétences des élus et des autorités. Mais notre seule force de persuasion réside dans notre argumentaire. Nous expliquons l'importance de cette richesse architecturale, les aspects et les valeurs artistiques qu'elle recèle et ses éventuelles implications dans la vie socioéconomique des populations de la région. Par contre, nous avons commencé par donner l'exemple et cela a réussi. L'Association de bienfaisance d'Idaousmlal a entrepris plusieurs constructions dans le cadre du renforcement et de la mise en place des équipements socioculturels dans la région (mosquée, centre de formation aux métiers d'artisanat local, foyer féminin…). Nous avons, alors, fait montre d'un minutieux et intelligent respect de la reproduction de l'architecture locale. Les gens n'ont pas contesté. Ils ont trouvé que c'est du beau travail. Les passants s'arrêtent souvent pour admirer ces œuvres et les prendre en photos. Une prise de conscience s’est vite opérée chez les habitants. On a vu beaucoup d'entre eux qui entreprennent des projets de construction, soit des ouvrages d'habitation ou autres, imiter les modèles s'inspirant de l'architecture locale. C'est déjà un grand pas et un acquis pour nous. Notre souhait est de faire du centre d'Idaousmlal un patelin exemplaire, un modèle à suivre dans toute la région, en matière d'architecture originale locale.