Entretien avec Fathallah Oualaou, tête de liste USFP à Agdal-Ryad : «Pourquoi je suis candidat à Rabat»


Entretien réalisé par Narjis Rerhaye
Mercredi 3 Juin 2009

Entretien avec Fathallah Oualaou, tête de liste USFP à Agdal-Ryad : «Pourquoi je suis candidat à Rabat»
Longtemps député de Rabat, Fathallah Oualalou signe son retour dans l’arène électorale en se présentant aux communales. Le candidat usfpéiste, tête de liste à Agdal-Ryad, explique
les raisons qui ont motivé son choix. Entretien avec un politique qui a toujours pensé
que Rabat est une ville mythique.

Libération : Fathallah Oualalou,  vous êtes tête de liste à Rabat, pourquoi avoir choisi de vous faire candidat aux communales du 12 juin sachant que vous ne vous êtes pas présenté aux dernières législatives ? Qu’est-ce qui a motivé votre choix ?

Fathallah Oualalou : D’abord, parce que j’aime par-dessus tout  mon pays. Chaque fois que je sens qu’il est important d’être au service du pays, qui plus est  en utilisant l’USFP comme instrument, j’y vais, sans la moindre hésitation.
En fait, ma décision est également liée à ce qui s’est passé lors des législatives de septembre 2007 où je ne me suis pas effectivement  présenté. A l’USFP, nous avons tous senti la nécessité de réhabiliter la politique dans le pays, donner plus de crédibilité à l’action politique. Nous avons tous senti qu’il y a un grand hiatus entre les avancées que le Maroc a connues, ces dernières années,  sur les plans économique, sociétal et culturel et la stagnation du rôle du champ politique. Et l’USFP a une responsabilité en la matière. Parce que c’est Rabat, parce que  c’est la capitale. Rabat est une ville mythique. C’est la ville du nationalisme, du progrès. Rabat a toujours été liée à l’USFP, en ce sens qu’elle est aussi la ville de Mehdi Ben Barka.
Enfin, pour moi, Rabat est un formidable champ d’expérimentation avancé de ce projet de  réhabilitation de la politique.

Vous êtes natif de Rabat, vous avez longtemps été le député de Rabat. Quels sont, de votre point de vue, les défis qui se posent aujourd’hui dans la gestion de la capitale ?

Rabat a certainement une chance actuellement. Quand je pense à Rabat, ce sont trois dates qui me viennent à l’esprit : l’arrivée des Romains avec le Chellah, Yacoub El Mansour et l’ère actuelle. L’ère actuelle est ici incarnée par le projet Bouregreg qui est structurant. Un tel projet va permettre à Rabat et Salé de se réconcilier et en même temps de ne plus tourner le dos au fleuve et à l’océan. Pendant des siècles ces villes ont tourné le dos au fleuve et à l’océan, ce qui explique en grande partie la stagnation des deux cités et du pays. Donc, le projet du Bouregreg est une chance. J’ai eu la chance au sein du gouvernement de suivre ces projets. Et l’USFP explique dans son programme communal qu’elle accompagne ces projets.
Cela signifie en fait qu’il s’agit de faire en sorte que Rabat réponde aux défis, aux enjeux du 21ème siècle, et reste une cité fière de son passé. En même temps Rabat est appelée à se diversifier, à ne plus rester prisonnière de l’Administration. Le poids de l’Administration, de ces entreprises publiques est là. Mais il est important que les revenus et les activités soient diversifiés. Rabat doit le faire dans un cadre régional avec Salé, Témara, Skhirat, bref, avec toute la région Rabat-Salé-Zemmour-Zaër.
J’ajouterais que Rabat a une autre  chance à saisir. C’est la capitale du Royaume. L’élite vit à Rabat et la ville est appelée à devenir de plus en plus le premier  centre de rayonnement culturel  du Maroc. Les grands projets comme la bibliothèque nationale, le musée, etc, vont permettre à la cité d’avoir un nouveau destin culturel. Ce qui permettra de promouvoir un nouveau  tourisme, un tourisme de séjour  et non plus de passage. Et je ne parle pas seulement de tourisme des étrangers mais aussi celui des Marocains. Rabat doit attirer en tant que lieu de rayonnement culturel tous les Marocains.
Il est aussi essentiel de promouvoir la complémentarité de Rabat avec Casablanca. Historiquement, au cours des deux derniers siècles, elles ont été les deux capitales, politique et économique, du pays. Il faut dépasser cette dualité. Les deux grandes villes doivent se rejoindre à travers même un redéploiement d’un certain nombre d’activités de Casablanca à Rabat, et vice-versa.

Rabat a un statut particulier conformément à la charte communale. Est-ce que cela laisse la place à une véritable gestion communale et un exercice du pouvoir par les élus ?

Toutes les capitales du monde ont leurs spécificités et l’Etat doit s’occuper de Rabat parce que Rabat prend aussi en charge les fonctions de la capitale. Aux élus de suivre et d’accompagner ce statut avec intelligence, doigté et en même temps avec volontarisme. Les élus doivent défendre leurs compétences, c’est normal, mais ils doivent être une valeur ajoutée pour les grands projets nationaux. La valeur ajoutée, c’est justement faire en sorte que ces projets répondent aussi aux attentes de la population. Rabat est un lieu de passage entre le Sud et l’Est du Maroc. Ceci est fondamental. C’est pour cela que Rabat est d’abord un lieu d’Histoire mais aussi de géographie.
Rabat a eu une chance,  celle des multiplications des centres, et ceci a été rendu possible grâce aux élus de l’USFP qui avaient alors la majorité pendant une dizaine d’années. A côté du centre historique de la ville que constituent les avenues Mohammed V et Allal Ben Abdallah, il y a maintenant le centre de l’Agdal qui a sa logique de pôle, le centre de Ryad mais il y a aussi Yacoub El Mansour et ses activités économiques sans oublier bien sûr Youssoufia. Il est important de créer entre ces différents pôles des éléments de synergie et de complémentarité. Il est ici essentiel de faire en sorte que les inégalités en matière d’équipement, de logement, de scolarisation, de santé et  qui existent à Rabat soient résolues.

Pendant longtemps Rabat a été un fief ittihadi, un fief aujourd’hui perdu. Comment comptez-vous le reconquérir ?

C’est tout le challenge ! Réussir ce challenge concerne Rabat mais aussi le pays. Au Maroc, le monde rural est essentiel pour l’équilibre du pays. Mais comme partout dans le monde, ce sont les villes qui portent les éléments de progrès. Il y a des villes comme Rabat, Fès, Marrakech, Casablanca mais des petites et moyennes villes qui doivent jouer le rôle de locomotive dans le sens de la modernisation de notre pays. Et pour moi la modernisation est globale, elle touche le politique, c’est-à-dire la démocratie, mais aussi l’économique, le sociétal, le culturel, le statut de la femme, etc.
Je crois que c’est dans les villes qu’il y a un tissu qui permet cette modernisation. Une grande ville appartient à tous ses habitants, et pas seulement les R’batis d’origine. C’est dans ce sens que l’on retrouve tous les habitants du Maroc à Rabat. C’est la raison pour laquelle je dis que Rabat est un champ d’expérimentation avancé des mutations nécessaires pour ce pays, et notamment sur le plan politique.
Réussir donc le challenge à Rabat, c’est donner de l’espoir. Après ces 10 dernières années, liées au nouveau règne, le Maroc a fait de grands pas. Le pays a changé, bougé, etc. Maintenant, il faut un nouveau départ. C’est pourquoi l’USFP a pris l’initiative en matière de réformes. Ce nouveau départ doit être aussi politique. Le monde est en crise et cette crise oblige tous les pays à repenser leur politique et à réhabiliter le politique. Partout dans le monde, l’Etat est aujourd’hui au secours de l’économie. Au Maroc, l’Etat, nécessairement démocratique et moderne, doit actuellement relancer le pays pour une nouvelle génération de réformes. La nouveauté de ces réformes réside dans le fait de donner plus de crédibilité à la politique, aux institutions. Et c’est tant mieux que l’on commence par des institutions élues localement, ce qui nous permettra en 2012 de passer à la réhabilitation de la politique au niveau du Parlement. C’est donc l’annonce des 10 prochaines années. Ces élections du 12 juin sont certainement locales mais ont une véritable dimension nationale

Ces élections sont locales, elles sont censées incarner une politique de proximité. Dans votre programme, que proposez-vous pour changer, améliorer la vie des R’batis ?

Il est important de réduire toutes les inégalités dans la ville. Si Agdal-Ryad est un pôle de modernité, il ne faut pas oublier les autres espaces. Je pense à la médina, au Mellah, aux bidonvilles de Rabat. On ne peut pas être une capitale au 21ème siècle avec ces poches de pauvreté. Les municipalités doivent accompagner toutes les politiques de lutte contre la pauvreté, une lutte dans laquelle j’inclus l’analphabétisme, le logement insalubre, etc.
Nous avons une ville où le taux de motorisation augmente de plus de 10%. Par conséquent, il y a des problèmes de transports. Le projet Bouregreg a amené le tramway. C’est une solution mais il faut que cette solution intègre une logique plus globale.
A partir des atouts de Rabat, il faut également faire en sorte que l’habitant, en tant qu’individu et en tant que collectivité ait la possibilité de rayonner, de s’épanouir dans sa famille, dans sa ville. Ici, le culturel est important.
Il faut également s’occuper de tous ceux qui ont des difficultés. Je pense aux enfants, aux personnes âgées, aux handicapés.
Autre élément important, faire en sorte d’accompagner la diversification de l’activité économique pour permettre l’amélioration des revenus des habitants et contribuer à résoudre les problèmes du chômage. Une municipalité doit accompagner toutes les actions visant à promouvoir la formation, à adapter la formation des jeunes aux besoins de l’économie. Une municipalité a le devoir de s’occuper du quotidien, c’est-à-dire la proximité qui va de l’éclairage au ramassage des ordures, etc mais doit dans le même temps accompagner les actions de l’Etat. Il est important dans ce sens d’améliorer l’attractivité de notre pays, de notre ville, de notre région pour les investissements.

Quand vous dites tout cela, Fathallah Oualalou, il est évident que vous visez la mairie de Rabat. Quelles sont les alliances que vous êtes prêt à faire au lendemain du 12 juin ? Et comment s’annonce, selon vous,  la bataille pour la ville ?

Dans cette élection, il y a deux projets qui s’affrontent. Il y a d’abord le projet du progrès, de l’efficacité et de l’éthique. Progrès, efficacité et éthique signifient crédibilité. Face à ce projet, il y a les autres pratiques. Il est important pour notre pays de les contourner. Je pense particulièrement à l’utilisation de l’argent souvent mal gagné et qui perturbe notre démocratie et ne lui permet pas d’avancer. Il faut peut-être revenir à ce que nous voulions faire il y a dix ans. C’est-à-dire, redonner une chance à la transition démocratique, à nouveau. Car nous ne l’avons pas tout à fait réalisé.
Par conséquent, les critères pour les coalitions post-électorales vont tourner autour du degré de rapprochement du projet de l’USFP, un projet qui défend la crédibilité, la modernisation et l’éthique.


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