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19 ans après son décès, le souvenir de ce militant à la vie, à la mort, est toujours vivace et son héritage immense. L’Usfpéiste Mohamed Elyazghi a côtoyé celui que les Ittihadis continuent d’appeler dans une marque de respect à la fois impérissable et affectueuse « Si » Abderrahim. « Abderrahim Bouabid était le produit du peuple. C’était un homme d’Etat, un dirigeant, un leader et un combattant qui est sorti du peuple marocain alors sous occupation coloniale», témoigne l’ancien premier secrétaire de l’Union socialiste des forces populaires. Cette appartenance au peuple et aux couches populaires a comme porté le combat du leader disparu. « Le principal facteur de la détérioration de la situation au Maroc est l’absence de démocratie et la rupture avec le peuple (…) La principale revendication qui a caractérisé la lutte politique au Maroc après l’indépendance est celle qui consiste à donner la parole au peuple », avait déclaré Abderrahim Bouabid en 1968 alors qu’il procédait à un diagnostic de la situation politique en terre marocaine. L’homme n’a jamais craint de clamer haut et fort ses convictions. Et ses convictions se sont fortement exprimées dans la lutte contre l’occupant alors qu’il était jeune instituteur à Fès et qu’il s’engage, à la fin des années 30, dans les cellules nationalistes. « Son héritage est immense dans sa lutte contre le colonialisme et sa participation à la victoire par son appartenance politique qui a permis au mouvement national d’avoir un avocat auprès de l’opinion publique mais aussi des gouvernements des pays occupants et de mobiliser, en interne, la population, notamment la classe ouvrière pour qu’elle rejoigne la lutte du mouvement national », rappelle M. Elyazghi. Abderrahim Bouabid est en effet l’un des architectes du Manifeste de l’Indépendance dont il sera d’ailleurs l’un des plus jeunes signataires. Infatigable, l’avocat plaide, négocie, milite. A l’aube de l’indépendance marocaine, il fait naturellement partie de la délégation qui négocie avec le gouvernement de Guy Mollet les accords du 2 mars 1956 qui consacreront l’abrogation du Traité du Protectorat. C’est en ces temps de résistance et de combat contre l’occupation, que Mohamed Mjid, le doyen de la société civile, l’a connu. Le Maroc, soutient-il, a perdu un homme d’Etat. « Abderrahim Bouabid a été nationaliste, militant, résistant et cartésien. Pour lui la politique n’a jamais été une fin mais un moyen de formation, d’éducation et d’accompagnement. C’est ce qui explique ses différends avec certains qui n’avaient pas la même notion de la politique. Il faut le dire, Bouabid n’appréhendait jamais la politique par la petite lucarne étroite du parti », témoigne Mohamed Mjid.
Bouabid, l’homme qui n’a jamais rompu les liens
Dans la construction du Maroc indépendant aussi, le legs de Bouabid est immense. Ministre de l’Economie nationale sous les gouvernements Bekkay en 1956 et Abdallah Ibrahim en 1958, il est l’un des principaux initiateurs du chantier de la libération économique avec la création du dirham, l’installation de la banque centrale et d’instruments économiques telles que la CDG et la BNDE, fait valoir Mohamed Elyazghi. « N’oublions pas non plus qu’Abderrahim Bouabid est à l’origine du premier plan quinquennal de 1960-1964, un plan qui a permis de faire la liaison entre l’indépendance du pays et son développement économique et social. Il a contribué à la mobilisation du peuple marocain, à sa formation, à son ouverture au monde pour que soit construit le Maroc de l’après-indépendance ». Les obsèques d’Abderrahim Bouabid ont été à son image : populaires et politiques à la fois. Une foule immense l’avait accompagné à sa dernière demeure. Leaders politiques, gouvernants et militants étaient là, au cimetière Chouahada, à Rabat. Pas encre secrétaire général du PPS, Ismaïl Alaoui –qui a eu à découvrir ses talents de fédérateur, rue Serpente, à Paris, lors d’une réunion préparatoire d’un congrès de l’UNEM- a assisté à ces obsèques « incroyablement émouvantes ». «C’était l’un des rares hommes politiques que l’on pouvait qualifier d’Homme d’Etat. On a beau tourner et retourner les listes des hommes politiques, on n’en trouve pas de l’étoffe d’Abderrahim Bouabid. Je retiens de lui l’image d’une personne qui a su mettre en pratique la théorie du cheveu de Mouaouya, c'est-à-dire ne jamais rompre les liens. Ce leader a toujours su procéder à l’analyse objective des rapports de forces. Mais attention, Bouabid était aussi et surtout un homme à principes tout en restant ouvert. Pour lui, la fin n’a jamais justifié les moyens ». Dans sa famille politique, on n’en finit pas d’en témoigner : Bouabid a été l’un des architectes du processus de démocratisation enclenché dès le début des années 90. Son combat pour la démocratie était loin d’être un slogan de plus dans un discours enflammé. « Il était dans la lutte populaire mais légale pour bâtir une démocratie véritable et permettre au peuple d’exprimer librement ses choix dans les domaines politique, économique, social et culturel. Une lutte populaire et légitime pour un avenir meilleur », explique celui qui a été l’un de ses successeurs, Mohamed Elyazghi. Indépendance, premiers jalons d’une économie libérée, démocratisation… L’héritage d’Abderrahim Bouabid est à la mesure de ses combats, nombreux. Mohamed Mjid veut aussi en retenir l’histoire d’un père et de son fils. « Abderrahim a laissé Ali, son fils qui n’en finit pas d’œuvrer pour honorer sa mémoire à travers la Fondation Abderrahim Bouabid, un espace de débats, sans œillères ni lucarnes, pour voir le Maroc dans sa vraie dimension et aspirer à un Maroc plus grand que le Maroc ».