L'échec d'une politique menée non pas en fonction d'une stratégie claire et pensée mais en fonction d'un calendrier électoral et pour des finalités relevant de la promotion et de l'effet d'annonce. Oui, c'est ainsi qu'il faut lire les dernières résolutions de la HACA: comme un formidable constat sur le retard à combler sur la voie de l'émergence d'un vrai paysage audiovisuel. Le constat est que la balle est encore dans le camp des pouvoirs publics qui ont cru bien faire en chantant trop tôt les vertus d'une libéralisation du secteur.
Oui, la HACA a bien fait de nous rappeler à l'ordre; a bien fait de tempérer les ardeurs et les enthousiasmes de ceux qui croyaient débarquer dans l'eldorado de la multiplication des chaînes. Il faudra repasser plus tard; c'est-à-dire pas avant de remettre de l'ordre dans ce qui existe déjà. Pas avant la réalisation d'un véritable pôle public de télévision. Et Dieu sait si on n'avait pas, à l'époque, dans le tournant des années 2002 - 2003, au moment de la mise en place de l'ensemble du dispositif, émis d'énormes réserves sur la démarche suivie qui a finalement abouti à l'impasse actuelle. Nous préconisions pour réformer le paysage audiovisuel une démarche radicale mais graduelle et consensuelle. Radicale car elle ne pouvait être qu'une démarche de rupture avec l'ordre précédent; avec toute une époque de stagnation et de monolithisme.
Or pour donner le maximum de chance de réussite à une telle approche il fallait passer par une phase transitionnelle plus ou moins longue. A l'image, en quelque sorte, de la démarche politique qui marquait l'autre transition, celle du système politique. Notre télévision sortait à peine de l'âge paléolithique; celui de la télévision officielle; étatique et bureaucratique. Il fallait passer par un processus d'apprentissage de ce que peut être une télévision publique pour entamer dans de bonnes conditions la phase suivante, celle de la concurrence privé-public. Sans cette phase pédagogique, la libéralisation du secteur revient à une simple aventure sans lendemain. Il faut mettre au centre du paysage audiovisuel un service public fort pour envisager une ouverture à la multiplication des initiatives. Un pôle public qui joue comme pilier d'équilibre, comme porteur de références et de valeurs. Sinon, c'est le chaos. L'ancienne RTM avait les moyens d'évoluer dans la perspective de ce pôle public. 2M avait les potentialités de se développer pour constituer un contre-champ privé ; elle porte en effet dans son code génétique les vertus d'une entreprise libérale.
Au lieu de cela, on a joué un scénario de la confusion qui a étouffé dans l'œuf les velléités de changement de l'une (Tvm) et de développement de l'autre (2M) aboutissant à la situation d'aujourd'hui, celle d'un système hybride et que la HACA vient de sanctionner par un zéro pointé. Car la seule traduction fidèle de ses résolutions est qu'il faut revoir la copie. En somme réformer la réforme!