Quelles conséquences pour la baie ?


Sofia Aliamet
Samedi 27 Février 2010

La décision des autorités de la ville d'Agadir d'autoriser le sabordage de trois chalutiers suscite aujourd'hui de nombreuses réactions de part et d'autre et surtout un certain nombre d'interrogations. Pourquoi les autorités n'ont-elles pas tout simplement ordonné le démantèlement des trois navires ? Peut-on sans risque décider de saborder 13 bateaux au large d'une baie dont on dit souvent qu'elle est l'une «des plus belles du monde»? N'aurait-on pas pu réfléchir à toutes les solutions envisageables au lieu d'ordonner dans l'urgence le sabordage des chalutiers?
Autant de questions qui demeurent à ce jour posées…
Le démantèlement des navires en fin de vie est généralement une activité créatrice d'emplois, car de nombreux matériaux peuvent être récupérés sur les navires: matériaux ferreux et non ferreux, bois, plastiques, gravats, flux et mobilier entre autres. Outre la dimension économique, l'aspect écologique est également primordial, car ce sont ainsi de nombreuses pièces qui sont recyclées et auxquelles on offre une nouvelle vie. Ainsi, les pêcheurs eux-mêmes déplorent la décision de justice qui prive la ville de nombreux emplois. Et si l'on a coutume de dire que le démantèlement de navires est une activité nocive pour les employés, il n'en va pas de même lorsque sont mises en place dès le départ des normes très strictes en termes de formation, d'encadrement, d'hygiène et de sécurité.
Aujourd'hui le « recyclage » des bateaux en fin de vie est une question de taille. Si aucune convention internationale n'impose de solutions, il n'en reste pas moins que le droit européen a su règlementer le sabordage d'abord en vertu d'une Convention signée à Londres en 1972 puis d'un protocole entré en vigueur en 2006, plus soucieux de préserver le milieu marin. De plus, dans le « Livre Vert » adopté par la Commission européenne la même année, un paragraphe entièrement dédié au « démantèlement des navires » se consacre aux nombreuses difficultés que l'on peut rencontrer en la matière.
Dans le cas précis de la baie d'Agadir, l'on est légitimement en droit de s'interroger sur la pertinence de tels choix. Peut-on se permettre de couler tous nos déchets encombrants sans débattre au préalable de l'endroit où auraient lieu de telles actions ?  La baie que nous présentons souvent à l'international comme une destination préférentielle pour les nombreux touristes, risque de subir de plein fouet les préjudices d'un sabordage « à la va-vite ». Si les autorités ont affirmé avoir débarrassé les chalutiers de toutes les huiles de moteur contenues à bord, aucune indication en revanche n'a été donnée sur les contrôles effectués pour détecter la présence de métaux lourds néfastes pour l'environnement. Aujourd'hui, certains pays n'hésitent pas à couler délibérément des épaves afin de constituer de nouveaux récifs artificiels pour la faune marine. Dans ce cas de figure, l'on enlève  en premier lieu huiles, moteurs, amiante, et carburants puis l'on dépollue complètement la coque des bateaux, opération qui s'avère souvent coûteuse. Dans le cas contraire, l'épave joue un rôle inverse puisque les déchets qui y demeurent ont de lourdes conséquences sur les écosystèmes et sur les espèces animales.
A l'heure où se s’achèvent les consultations autour de la Charte de l'environnement et du développement durable, il est navrant de constater que certaines décisions continuent d'être prises sans réflexions préalables autour de solutions envisageables pour que des notions telles que le respect de l'environnement et le développement durable prennent sens et ne demeurent pas seulement de «grands mots» en tête d'une Charte.



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