Patrick Shanahan, un gestionnaire flexible face à Trump

Il a été accusé de violer les règles d'éthique du Pentagone en y faisant la promotion de Boeing et en dénigrant ses concurrents


Jeudi 16 Mai 2019

Patrick Shanahan, un gestionnaire flexible face à Trump
Patrick Shanahan, que Donald Trump a finalement choisi de pérenniser à la tête du Pentagone, est un gestionnaire efficace sans expérience militaire, qui a su faire preuve de flexibilité face au bouillant président américain, notamment sur le déploiement militaire à la frontière mexicaine.
Sa nomination devra être confirmée par le Sénat, où son manque d'expérience inquiète les élus, qui voyaient dans son prédécesseur Jim Mattis, ancien général des Marines, un garant de stabilité dans une administration agitée de secousses.
C'est M. Mattis lui-même qui en 2017 avait choisi comme adjoint cet ancien ingénieur de 56 ans ayant passé 30 ans chez Boeing, où il a acquis le surnom de "M. Répare-tout" après avoir remis sur pied le programme du "Dreamliner" 787, plombé par les problèmes de production.
L'ancien général des Marines, qui voulait moderniser les procédures d'acquisition de l'armée et la gestion de ce ministère tentaculaire, expliquait volontiers avoir choisi M. Shanahan pour ses compétences de gestionnaire.
Mais ce dernier a été accusé de violer les règles d'éthique du Pentagone en y faisant la promotion de Boeing et en dénigrant ses concurrents, notamment le constructeur aéronautique Lockheed Martin.
Une enquête interne l'a disculpé de toute faute, ouvrant la voie à sa nomination par M. Trump.
Cet homme discret divorcé et père de trois enfants, plus familier des dossiers financiers que des nuances de la stratégie militaire américaine, qui n'a jamais servi dans l'armée et n'a aucune expérience politique, s'est brutalement retrouvé sur le devant de la scène internationale fin décembre, avec la démission fracassante de M. Mattis qui a conduit le président à le nommer ministre de la Défense par intérim.
"En 2019, la stratégie de défense nationale restera notre guide", a-t-il tweeté prudemment en prenant ses fonctions.
Depuis, M. Shanahan s'est fait tout petit. Il a très peu pris la parole, n'a donné qu'une conférence de presse et n'a effectué qu'une tournée à l'étranger, en février, qui lui a permis de rendre visite aux troupes américaines à Kaboul et Bagdad.
Il a aussi participé à des réunions internationales à Bruxelles et Munich, où il est apparu un peu emprunté et où son alignement sur les vues de M. Trump lui a valu de sévères critiques des élus du Congrès. Le républicain Lindsey Graham lui a ainsi reproché d'accepter sans discuter la décision controversée de M. Trump de retirer les quelque 2.000 militaires américains déployés dans le nord-est de la Syrie.
M. Trump est finalement revenu sur le retrait total de Syrie mais M. Shanahan a pris grand soin de ne pas prendre le président à rebrousse-poil. De fait, le milliardaire républicain "aime bien" son ministre, a assuré la porte-parole de la Maison Blanche, Sarah Sanders.
Son seul autre déplacement officiel a été à la frontière mexicaine, où il a accepté le positionnement de près de 4.000 soldats et où il a estimé que le Pentagone pourrait contribuer davantage à la surveillance des passages frontaliers.
Après sa déclaration "d'urgence nationale" qui lui permet de puiser dans les fonds fédéraux pour financer la construction de son mur censé empêcher l'immigration clandestine, M. Trump l'a chargé de débloquer 3,6 milliards d'un fonds consacré à la construction militaire, et 2,5 milliards de fonds destinés aux activités de lutte contre la drogue du budget 2019, qui s'achève fin septembre.
Le ministre par intérim a identifié une partie des fonds et des contrats ont été attribués pour un total d'un milliard de dollars.
Interrogé récemment sur la construction du mur au Congrès, M. Shanahan a paru défendre le programme en déclarant qu'elle ne se ferait "pas aux dépens de nos hommes, de notre degré de préparation et de notre modernisation".
Il s'est abstenu de préciser quels projets de construction militaire seraient retardés à cause des milliards redirigés vers le mur. Mais le budget 2020 du Pentagone prévoit le remboursement de cette somme et ajoute une nouvelle enveloppe de 3,6 milliards sur des fonds dits d'urgence, à la demande de la Maison Blanche.


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