Neuvième jour de grèves en France et manifestations contre une réforme au forceps


Libé
Vendredi 24 Mars 2023

Les Français sont appelés jeudi à une neuvième journée de mobilisation en deux mois contre une réforme des retraites très impopulaire adoptée au forceps, au lendemain d'une allocution du président Emmanuel Macron qui a électrisé les syndicats et l'opposition.


Les opposants à cette réforme sont appelés par les syndicats à descendre dans la rue et à faire grève, pour la neuvième fois depuis le 19 janvier et pour la première fois au niveau national depuis le passage en force du gouvernement à l'Assemblée nationale, qui les a ulcérés.


Lors d'une interview télévisée très attendue mercredi, après des semaines de tensions sociales, Emmanuel Macron a martelé que cette réforme - projet phare de son second quinquennat - devait être appliquée "avant la fin de l'année", assumant son "impopularité".

"Cette réforme, ce n'est pas un plaisir, ce n'est pas un luxe, c'est une nécessité", a-t-il assuré, invoquant la défense de "l'intérêt général" face à la dégradation financière des caisses de retraite et au vieillissement de la population.


La principale mesure de cette réforme, qui cristallise la colère, est le recul de l'âge légal de départ à la retraite de 62 à 64 ans.

La France est l'un des pays européens où cet âge légal est le plus bas, sans que les systèmes soient complètement comparables.


Les opposants à cette réforme la jugent "injuste", notamment pour les femmes et les salariés aux métiers pénibles.
 Plusieurs actions de blocage, touchant dépôts pétroliers, ports, routes, transport aérien, le secteur gazier et des universités, se sont déroulées mercredi.


Au niveau national, la situation se dégrade légèrement en ce qui concerne le carburant, avec environ 14% des stations service en pénurie d'au moins un type de carburant contre 12% mardi, et 7,13% à sec, contre 6% mardi.


Seule une raffinerie TotalEnergies sur quatre est en fonctionnement en France. 
Le niveau d'approvisionnement en kérosène de la région parisienne et de ses aéroports par la Normandie (ouest) "devient critique", a indiqué jeudi à l'AFP le ministère de la Transition énergétique, qui est prêt à faire réquisitionner des grévistes.


La Direction générale de l'Aviation civile (DGAC) demande pour jeudi aux compagnies aériennes d'annuler 30% de leurs vols à Paris-Orly et 20% dans d'autres aéroports.


Les ports de Marseille-Fos (sud) et de Brest (ouest) étaient totalement bloqués mercredi à l'appel du puissant syndicat CGT.

Jeudi, la compagnie nationale ferroviaire SNCF n'est en mesure de faire rouler que la moitié de ses trains à grande vitesse et le tiers de ses trains express régionaux.


La circulation du métro parisien et des trains de banlieue est prévu "très perturbé" .
La grève des éboueurs parisiens engagée le 6 mars est reconduite jusqu'à lundi.

Mercredi, le président Macron a confirmé qu'il n'allait ni dissoudre l'Assemblée nationale, ni remanier le gouvernement, ni convoquer un référendum sur sa réforme décriée.


Il a dit vouloir "réengager" un dialogue avec les partenaires sociaux sur le rapport au travail, "dans quelques jours, quelques semaines", le temps que les tensions retombent.


Réponse immédiate du leader du syndicat réformiste CFDT Laurent Berger: "Ce sont des mots creux, pour l'instant, il y a un gros conflit social, une crise démocratique, une crise sociale", a-t-il déclaré à l'AFP.


Des analystes estiment que cette réforme et la contestation qu'elle a entraînée laisseront une trace indélébile sur ce second quinquennat. "A l'issue d'une mobilisation, d'un conflit comme celui-ci, on ne peut pas penser qu'on va effacer les choses", a reconnu jeudi le ministre du Travail Olivier Dussopt.

"Il y a un avant et un après, il y a un désaccord qui va persister sur l'âge de départ" à la retraite "mais il y a des sujets qui permettent de renouer avec un dialogue", a-t-il dit sur la radio RTL.

Depuis le 16 mars, date du recours par l'exécutif à l'article 49.3 de la Constitution permettant l'adoption d'un texte sans vote, faute de majorité à l'Assemblée nationale, la contestation donne des signes de radicalisation.


Des échanges tendus opposent chaque soir manifestants et policiers, notamment à Paris. Près d'un millier de personnes ont été interpellées.


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