Les armateurs en appellent à une intervention urgente de l’Etat : Avis de tempête sur le pavillon national


L.M
Mardi 10 Janvier 2012

Les armateurs en appellent à une intervention urgente de l’Etat : Avis de tempête sur le pavillon national
Un coup de semonce ? Même s’il en a l’air, il n’en est pas un. La sortie du Comité central des armateurs marocains (CCAM) appelant le gouvernement à une intervention urgente pour sauver le secteur maritime, au lendemain de la saisie conservatoire prise par les autorités maritimes françaises contre deux navires marocains au port de Sète, est la seconde bouteille que les armateurs ont jetée à la mer inutilement et en fort peu de temps.
En pleines langueurs aoûtiennes, ils avaient déjà fait fonctionner leurs cornes de brumes. Le manque de visibilité et les écueils étaient tels qu’ils ne pouvaient plus naviguer sereinement.
Les statistiques sectorielles étaient en berne : le chiffre d’affaires «s’est inscrit en net recul de 25%  entre 2009 et 2010 avec 3,5 milliards de DH, alors que le C.A réalisé par les armateurs étrangers s’est inscrit lui en nette hausse de 16,4% à plus de 14,66 milliards de DHS (en devises)», avait affirmé El Mostafa Fakhir, secrétaire permanent dudit Comité dans une déclaration à Libé. Ce qui montre, selon lui, que les armateurs étrangers bénéficient pleinement de l’ouverture et de la libéralisation du marché au détriment des compagnies maritimes marocaines déficitaires qui accusent les responsables étatiques du secteur de manquement à leur devoir et leur demandent de les protéger contre les retombées de la libéralisation. Surtout que «la politique gouvernementale n’accompagne pas l’effort d’investissement des armateurs privés marocains par la mise en place de mesures pour améliorer la compétitivité du pavillon national comme prévu», nous avait-il indiqué.
Pire, selon lui, «le Code du commerce maritime n’est pas non plus refondu, alors que la concurrence de plus en plus rude des flottes de pavillon de complaisance comme ceux de Panama ou du Liberia diminue la part de marché des opérateurs nationaux».Et pourtant, à titre d’exemple, «les armateurs privés marocains principalement les Groupes IMTC et Comarit ont réalisé en 2007-2010 des investissements de l’ordre de 5 milliards de DH pour le renouvellement et la modernisation de leur flotte», poursuit-il. Et ce, dans l’objectif de suivre le développement du secteur qui couvre plus de 95% du commerce extérieur. Mais, selon les professionnels, «la conjoncture économique défavorable au transport maritime international au niveau mondial durant les années 90 et le vieillissement de la flotte nationale en ont  décidé autrement puisque l’armement marocain subit une profonde restructuration : réduction des effectifs et de la flotte principalement des compagnies maritimes publiques (Comanav et Marphocean)».
 D’après le secrétaire général du CCAM, «cette restructuration ne s’accompagne guère de mesures de mise à niveau de ses entreprises qui continueront à connaître une situation déficitaire, car la libéralisation n’a inclus aucune réciprocité pour le pavillon national dans les pays dont les flottes pourraient opérer librement au Maroc».
C’est ce même genre de discours que tient le communiqué du Comité central des armateurs marocains qui a fait suite à la saisie conservatoire des navires de la Comarit et de la Comanav.
«Si aucune mesure n’est entreprise par les autorités de tutelle, le Royaume sera sans aucun moyen naval pour couvrir le transport maritime de plus 70 millions de tonnes de marchandises de ses échanges avec l’extérieur et de 4 millions de passagers», indique-t-il après avoir rappelé que le pavillon national emploie d’une manière directe plus de 5.000 personnes et réalise un chiffre annuel de 4 milliards de dirhams. Il s’agit également de 660.000 véhicules qui entrent au Maroc annuellement par voie maritime et 2,5 millions de résidents marocains à l’étranger qui préfèrent se rendre au Royaume par voie maritime en raison de son rapport qualité/prix très avantageux.
A quelques mois seulement du début des préparatifs de l’opération de transit 2012, « nos compatriotes à l’étranger risquent d’annuler leur voyage au Maroc en l’absence d’un moyen de transport économique qui leur assure les meilleures conditions pour une traversée confortable », avertit le comité, en précisant que «les compagnies maritimes étrangères risquent de profiter de la situation de crise des compagnies nationales pour imposer leur monopole sur le marché du transport des passagers ».
Selon le comité, «la nécessité pour le Maroc de sécuriser par ses propres moyens maritimes une partie de ses échanges de biens avec l’extérieur et le transport de masse de ses MRE, lui impose aujourd’hui d’initier une nouvelle politique maritime», capable de lui assurer des acteurs nationaux compétitifs pouvant faire face à la concurrence des compagnies étrangères qui s’est exacerbée suite à la politique de libéralisation du secteur initiée en 2007. Certes le ministère de tutelle avait commandité, en 2005, une étude stratégique et institutionnelle pour réformer le secteur du transport maritime via «la mise en place d’un secteur du transport maritime, à faible coût, pérenne, au profit de l’économie du pays» et «la mise à niveau de la compétitivité des opérateurs marocains pour leur permettre de prospérer dans un marché fortement concurrentiel». Hélas, la libéralisation du secteur n’a pas été accompagnée par la mise en place des mesures nécessaires de mise à niveau des entreprises nationales qui sont toujours régies par le cadre législatif du Code du commerce maritime de 1919 et d’un régime fiscal qui ne permet pas une concurrence loyale. D’où quelques dramatiques anachronismes.
Le cas des deux navires saisis, le Biladi et le Marrakech n’est dans ce sens qu’un épiphénomène. La gangrène est dans le fruit depuis fort longtemps sans que les pouvoirs publics n’y prennent garde.


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