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Une femme en larmes dans les rues de Chypre, les deux mains tordues dans une prière désespérée; un marine en état de choc au Vietnam, le visage noir, les yeux dans le vague; un enfant albinos en équilibre sur deux jambes filiformes au Biafra. Le Britannique Don McCullin, auquel le musée londonien Tate Britain consacre une rétrospective, a photographié un demi-siècle de souffrances humaines.
Adoubé comme le “Goya de la photographie de guerre” par Henri Cartier-Bresson, McCullin a photographié la plupart des conflits depuis 1960, illustrant notre époque d’images symboles. Toutes en noir et blanc. Toutes développées par ses soins.
Avec ses cadrages serrés, arrachés en plein coeur de l’action, il photographie pour témoigner. “Parce que ce sont des photos, on ne peut pas prétendre que ces événements n’ont pas eu lieu”, expliquait-il en 2013 au New York Times.
“C’est en regardant dans les yeux des gens que l’on photographie que l’on obtient une vérité, leur profondeur”, confiait-il deux ans plus tard à l’AFP, affirmant avoir éprouvé son plus grand plaisir de photographe en immortalisant des sans-abri londoniens.
McCullin est né en 1935 à Finsbury Park, un quartier misérable du nord de Londres. “Nous vivions à cinq dans un deux pièces en sous-sol et sans toilettes”, disait cet enfant de la guerre au Guardian en 2005. “C’était un monde d’ignorance, d’intolérance, de pauvreté et de violence”.
Son père, infirme, travaille parfois dans une poissonnerie. A sa mort, il n’est qu’un adolescent. Boursier dans un collège d’arts plastiques, il doit arrêter ses études pour subvenir aux besoins de la famille.
“J’ai connu un mauvais départ mais finalement c’est cela qui m’a permis de démarrer dans la vie”, confiait-il en 2010 à The Economist. “J’ai appris la pauvreté, la misère et le malheur et toutes ces choses que j’ai retrouvées plus tard à de multiples occasions sur les champs de bataille, dans les hôpitaux et sur tous ces lieux de tragédies”.
McCullin enchaîne les boulots. Il travaille dans un studio de dessins animés où il développe des films puis fait son service militaire au département photographique de la Royal Air Force où il devient assistant photographe. Il met toutes ses économies dans l’achat d’un petit appareil photo.
Un dimanche après-midi de 1958, il photographie les copains de son gang, “The Guvnors”, impliqués dans la mort d’un policier. Sur une de ses photos qui va devenir culte, on voit la bande de voyous endimanchés, les cheveux gominés, posant depuis le premier étage d’un immeuble en ruines.
“Cette photo a changé ma vie”, raconte-t-il dans son autobiographie “Unreasonable Behaviour, risques et périls” (1992). En 1959, le journal dominical The Observer publie ce cliché qui va devenir un des emblèmes du photojournalisme.
Il a 23 ans et se fait embaucher. Il commence par couvrir la guerre civile à Chypre (prix World press en 1964) puis enchaîne avec le Congo, le Vietnam, le Liban. En 1966, il entre au Sunday Times et sillonne le monde pendant plus de vingt ans, souvent au péril de sa vie. On lui tire dessus au Cambodge, il est emprisonné en Ouganda, expulsé du Vietnam et sa tête est mise à prix au Liban.
Dans cet autre hebdomadaire dominical, les images du photographe-star sont reproduites en pleine page accompagnées de longs papiers de reporters talentueux.
“J’ai parfois eu l’impression de rapporter chez moi des lambeaux de chair humaine plutôt que des négatifs. Comme si je rapportais avec moi la souffrance des gens que j’avais photographiés”, expliquait-il sur le site Internet d’Hamilton Gallery, la galerie londonienne qui le représente.
Il admet avoir été constamment tenaillé par un sentiment de culpabilité parce que “personne n’a le droit de prendre les images” des gens.
En 2015, de retour d’Irak à 80 ans, il affirmait qu’il était désormais plus difficile de couvrir la guerre. “Vous en êtes empêché par toutes sortes de mensonges et de gens qui essaient de vous soutirer de l’argent”, avait-il dit à l’AFP.
Anobli par la reine, fait chevalier en 2017, il vit depuis 30 ans dans le Somerset, une région paisible du sud-ouest de l’Angleterre avec sa troisième femme et leur fils, son cinquième enfant. Là-bas, il photographie des paysages, au petit matin, toujours en noir et blanc. Et du haut de sa longue et solide silhouette, il continue à poser sur le monde ses yeux bleus devenus gris.
Adoubé comme le “Goya de la photographie de guerre” par Henri Cartier-Bresson, McCullin a photographié la plupart des conflits depuis 1960, illustrant notre époque d’images symboles. Toutes en noir et blanc. Toutes développées par ses soins.
Avec ses cadrages serrés, arrachés en plein coeur de l’action, il photographie pour témoigner. “Parce que ce sont des photos, on ne peut pas prétendre que ces événements n’ont pas eu lieu”, expliquait-il en 2013 au New York Times.
“C’est en regardant dans les yeux des gens que l’on photographie que l’on obtient une vérité, leur profondeur”, confiait-il deux ans plus tard à l’AFP, affirmant avoir éprouvé son plus grand plaisir de photographe en immortalisant des sans-abri londoniens.
McCullin est né en 1935 à Finsbury Park, un quartier misérable du nord de Londres. “Nous vivions à cinq dans un deux pièces en sous-sol et sans toilettes”, disait cet enfant de la guerre au Guardian en 2005. “C’était un monde d’ignorance, d’intolérance, de pauvreté et de violence”.
Son père, infirme, travaille parfois dans une poissonnerie. A sa mort, il n’est qu’un adolescent. Boursier dans un collège d’arts plastiques, il doit arrêter ses études pour subvenir aux besoins de la famille.
“J’ai connu un mauvais départ mais finalement c’est cela qui m’a permis de démarrer dans la vie”, confiait-il en 2010 à The Economist. “J’ai appris la pauvreté, la misère et le malheur et toutes ces choses que j’ai retrouvées plus tard à de multiples occasions sur les champs de bataille, dans les hôpitaux et sur tous ces lieux de tragédies”.
McCullin enchaîne les boulots. Il travaille dans un studio de dessins animés où il développe des films puis fait son service militaire au département photographique de la Royal Air Force où il devient assistant photographe. Il met toutes ses économies dans l’achat d’un petit appareil photo.
Un dimanche après-midi de 1958, il photographie les copains de son gang, “The Guvnors”, impliqués dans la mort d’un policier. Sur une de ses photos qui va devenir culte, on voit la bande de voyous endimanchés, les cheveux gominés, posant depuis le premier étage d’un immeuble en ruines.
“Cette photo a changé ma vie”, raconte-t-il dans son autobiographie “Unreasonable Behaviour, risques et périls” (1992). En 1959, le journal dominical The Observer publie ce cliché qui va devenir un des emblèmes du photojournalisme.
Il a 23 ans et se fait embaucher. Il commence par couvrir la guerre civile à Chypre (prix World press en 1964) puis enchaîne avec le Congo, le Vietnam, le Liban. En 1966, il entre au Sunday Times et sillonne le monde pendant plus de vingt ans, souvent au péril de sa vie. On lui tire dessus au Cambodge, il est emprisonné en Ouganda, expulsé du Vietnam et sa tête est mise à prix au Liban.
Dans cet autre hebdomadaire dominical, les images du photographe-star sont reproduites en pleine page accompagnées de longs papiers de reporters talentueux.
“J’ai parfois eu l’impression de rapporter chez moi des lambeaux de chair humaine plutôt que des négatifs. Comme si je rapportais avec moi la souffrance des gens que j’avais photographiés”, expliquait-il sur le site Internet d’Hamilton Gallery, la galerie londonienne qui le représente.
Il admet avoir été constamment tenaillé par un sentiment de culpabilité parce que “personne n’a le droit de prendre les images” des gens.
En 2015, de retour d’Irak à 80 ans, il affirmait qu’il était désormais plus difficile de couvrir la guerre. “Vous en êtes empêché par toutes sortes de mensonges et de gens qui essaient de vous soutirer de l’argent”, avait-il dit à l’AFP.
Anobli par la reine, fait chevalier en 2017, il vit depuis 30 ans dans le Somerset, une région paisible du sud-ouest de l’Angleterre avec sa troisième femme et leur fils, son cinquième enfant. Là-bas, il photographie des paysages, au petit matin, toujours en noir et blanc. Et du haut de sa longue et solide silhouette, il continue à poser sur le monde ses yeux bleus devenus gris.