Définition du métier de guide de tourisme & conditions d’exercice
Autres articles
-
Défis d'infrastructure et d'accessibilité : Une entrave à la croissance du tourisme dans la région Tanger-Tétouan- Al Hoceima
-
L’accident du Lancater WU 26 à Khémis Mtouh
-
Un essai d'évaluation de l'empreinte carbone de la guerre contre Gaza
-
La mobilité spatiale de la population marocaine
-
RECIT D'UN LIEU. Zagora : Domaine expérimental du palmier dattier l’INRA
Extrait de la loi 05-12 réglementant la profession de guide de tourisme.
Chapitre I
Définition de la profession de guide de tourisme
Article 1
Est guide de tourisme toute personne physique qui, contre rémunération, accompagne les touristes et veille à leur sécurité et leur tranquillité et qui leur fournit les informations nécessaires.
La profession de guide de tourisme comporte deux catégories :
La catégorie des guides des villes et des circuits touristiques ;
La catégorie des guides des espaces naturels.
Chacune de ces catégories de la profession est exercée à titre exclusif.
Article 2
L’activité de guide des villes et des circuits touristiques consiste à fournir aux touristes toute information à caractère géographique, historique, architectural, culturel, social, économique ou autres, et à les assister et les accompagner, à pied ou à bord des véhicules de transport, sur la voie publique et les sites touristiques, à l’intérieur des monuments, des musées, des lieux d’intérêt culturel ou artistique, des établissements touristiques et des lieux publics.
Article 3
L’activité de guide des espaces naturels consiste à accompagner et assister les touristes au cours d’excursions ou de randonnées au niveau des sites naturels tels que montagnes, déserts, villages ou autres, à pied, ou à dos de bêtes de somme ou encore dans des véhicules de transport appropriés, sur des circuits comportant des pistes, des sentiers ou des voies praticables sans le recours aux techniques de l’escalade, de l’alpinisme ou du ski et à leur fournir les informations sur les zones et sites visités, aussi bien à caractère naturel, historique, géographique, culturel, économique ou social.
Article 4
Le guide des villes et des circuits touristiques et le guide des espaces naturels exercent, chacun selon sa compétence, sur l’ensemble du territoire national.
Chapitre II
Des conditions d’exercice de la profession de guide de tourisme
Article 5
Nul ne peut exercer la profession de guide de tourisme s’il n’est titulaire d’un agrément délivré par l’administration compétente.
Article 6
Pour obtenir l’agrément visé à l’article 5 ci-dessus, le candidat à l’exercice de la profession de guide de tourisme doit :
Etre de nationalité marocaine ;
Etre âgé d’au moins 18 ans ;
Etre apte physiquement à l’exercice de la profession ; justifier d’une formation et de compétences professionnelles telles que fixées par voie réglementaire ;
N’avoir pas fait l’objet d’une condamnation à une peine d’emprisonnement pour crime ou délit, à l’exclusion des infractions involontaires.
L’agrément est délivré selon les conditions et modalités fixées par voie réglementaire.
Tout refus de délivrance de l’agrément doit être motivé et intervenir dans les délais légaux en vigueur.
Article 7
L’âge limite d’exercice de la profession de guide de tourisme est fixé à 60 ans. Au-delà de cet âge, le guide de tourisme peut être autorisé à continuer à exercer son activité dans les conditions et selon les modalités fixées par voie réglementaire.
Chapitre III
Des modalités d’exercice de la profession de guide de tourisme
Article 8
L’activité de guide de tourisme est exercée :
Soit à titre indépendant ;
Soit sous forme d’une société de guides de tourisme telle que définie au chapitre IV de la présente loi ;
Soit à titre de salarié d’un organisme touristique ou d’une entreprise touristique ou d’une société de guides de tourisme.
Article 9
Le guide de tourisme travaillant à titre de salarié d’un organisme touristique, d’une entreprise touristique ou d’une société de guides de tourisme, doit être lié à son employeur par un contrat de travail conformément à la législation et à la réglementation du travail en vigueur.
Article 10
Pendant l’exercice de leur activité, les guides de tourisme doivent être porteurs d’une carte professionnelle et d’un badge qui leur sont délivrés par l’administration compétente en même temps que l’agrément visé à l’article 5 ci-dessus et qu’ils doivent présenter à tout moment sur réquisition des agents assermentés et dûment mandatés, à cet effet, par l’administration.
Article 11
La carte professionnelle et le badge sont nominatifs et délivrés à titre personnel.
ROLES MAJEURS DU GUIDE DE TOURISME
La diplomatie parallèle
Si Feu Sa Majesté le Roi Hassan II a donné le titre d’«Ambassadeur» au guide de tourisme, c’est parce que, grand visionnaire qu’il fut, il était conscient du rôle important que joue ce citoyen exemplaire dans le développement de la diplomatie parallèle. En effet, bien que la quasi majorité des touristes voyageant à titre individuel, mais en groupe particulièrement, passe par le biais de Tour-Operateurs ou d’agences de voyages pour organiser son séjour, il n’en demeure pas moins vrai qu’une fois arrivés au Maroc, c’est le guide de tourisme qui est leur seul interlocuteur direct. Il va de soi, par conséquent et indépendamment de la durée passée en compagnie du guide de tourisme, que ce dernier dissipe certaines ambiguïtés et parvienne à convaincre les touristes majoritairement dupes et conditionnés par les médias à revoir leurs a priori quant aux diverses questions sociales, économiques, culturelles, confessionnelles ou politiques soient-elles. Généralement polyglotte, armé de connaissances générales, négociateur chevronné, grand diplomate et patriote convaincu, le guide de tourisme a toujours été l’un des mieux placés pour défendre l’intégrité territoriale, souligner le pluralisme qui caractérise le paysage global marocain et qui est une composante majeure de la démocratie, mettre l’accent sur la tolérance et la cohabitation des confessions au Maroc et remodeler les opinions préconçues de certains touristes. Tout cela et plus loin des discours redondants, monotones et parfois chauvins des politiques. En effet, c’est la bonne impression que le guide de tourisme donne et la confiance et l’amitié qui s’installent entre lui et ses clients qui lui confèrent tant de crédibilité et de pouvoir de persuasion dont sont dépourvus T.O, agences de voyages et politiciens tous réunis.
La Médiation culturelle
Le patrimoine et la culture sont deux éléments indispensables et indissociables qui constituent la stratégie du Maroc en matière de tourisme. Toutefois, l’essor du tourisme dépend étroitement de la stratégie mise en œuvre pou valoriser d’abord ce patrimoine et ensuite favoriser sa découverte par le visiteur.
Si les deux composantes susmentionnées sont le plus souvent utilisées juste comme un «label marketing» ou un «appât» pour drainer davantage de touristes et réaliser certains objectifs qui le plus souvent manquent de réalisme, c’est parce que l’on se soucie peu sinon jamais de la nature réelle du patrimoine et de son appréhension pour une valorisation optimale. Par ailleurs, hormis la nécessité de sa conservation -slogan désuet et redondant qu’on brandit à chaque occasion- le patrimoine se trouve face à un sérieux obstacle qui est la médiation. Cela dit, c’est là qu’intervient heureusement le guide de tourisme pour jouer ce rôle de médiateur. En effet, si la mise en valeur du patrimoine requiert la formulation d’un discours à même de permettre d’exprimer la signification du lieu pour la transmettre au touriste, il n’y a que le guide de tourisme qui accomplit actuellement cette mission délicate. Il va de soi que le patrimoine soit muet, mais c’est au guide qu’incombe de « remédier » à cette mutité en faisant appel à sa culture, à ses propres techniques de communication et à son grand talent d’animateur. En conséquence, étant parfaitement conscient que sa médiation doit être percutante, ce médiateur digne et incontestable veille toujours à assurer une concordance parfaite entre le message qu’il diffuse et l’identité des lieux visités. Selon Widad Tebba, ex-doyen et professeur chercheur à la Faculté des lettres & des sciences humaines, «il y a dans la médiation, une dimension pédagogique, une tâche de sensibilisation et une construction du sens… Le médiateur est un passeur qui crée des liens entre un LIEU, une CULTURE et un ou des PUBLICS… ».
La prescription
Nul ne pourrait nier le rôle important que joue le guide de tourisme dans le développement d’un secteur aussi porteur que fragile qu’est le tourisme. A juste titre, c’est en remplissant ses deux autres missions d’ambassadeur et de médiateur culturel que le guide de tourisme devient un prescripteur crédible qui participe effectivement à repositionner directement ou indirectement «le produit» Maroc pour davantage de visibilité et de commercialisation. Les spécialistes et les férus du marketing touristique qui souscrivent à «l’effet de recommandation» ne peuvent que confirmer cette thèse.
N’est-ce pas grâce à la participation effective du guide de tourisme que l’effet de retour est plus ou moins maintenu en dépit d’une conjoncture défavorable et d’une concurrence acharnée ? Si les plus pessimistes affichent une toute autre attitude vis-à-vis de cette opinion, il n’en demeure pas moins vrai qu’un client satisfait en vaut deux et qu’en conséquence, selon Bill Gates, « la meilleure des publicités est un client satisfait ».
N’est-ce pas aussi grâce au guide que certains produits qui font la fierté de l’artisanat marocain sont vendus ?
Bon nombre de raisons confirment incontestablement le rôle important et indéniable que joue ce prescripteur et agent commercial chevronné et indépendant dans le développement du PIB.
AUSCULTATION DU METIER DE GUIDE DE TOURISME
Un environnement hostile : (récession, usurpation du métier et complicité des agences de voyages)
La profession traverse une situation chaotique et alarmante qui prévaut et justifie pleinement l’inquiétude des professionnels du secteur touristique. Tout d’abord, il y a les effets néfastes de la récession sur le revenu de plus en plus maigre du guide de tourisme. Ces effets sont aggravés par le pullulement des guides clandestins étrangers qui sous le couvert de «l’investissement», entre autres, se permettent de piétiner toute loi au vu et au su des autorités locales et de la Brigade Touristique. Il y en a même qui sillonnent tout le pays sans jamais avoir froid aux yeux et en toute impunité, vraisemblablement en raison de ce que j’appelle personnellement « le complexe d’allégeance à l’étranger ». C’est devenu un véritable fléau dont les conséquences ne peuvent qu’être préjudiciables non seulement à la corporation des guides de tourisme mais également à l’image de marque de la destination Maroc. En effet, ces guides clandestins - auxquels je rajoute nos compatriotes usurpateurs du métier de guide touristique et dont le nombre ne cesse de croître- se permettent de fournir aux touristes dupes des informations complètement erronées sur notre culture, nos valeurs morales et spirituelles, nos traditions, bref sur tout ce qui a trait à l’identité marocaine. Véhiculant ainsi des messages fallacieux et nuisibles auprès de touristes déjà imprégnés de préjugés qui ne demandent qu’à être confirmés, les guides clandestins, étrangers notamment, aliènent les touristes. Corollairement, des effets tant souhaités tels que celui du «retour» et de la «recommandation ou de la prescription» sont largement compromis, se soldant ipso facto par un manque à gagner qui explique le fait que le Maroc n’ait pas tiré de profit tangible du «Printemps arabe». En parallèle, certains TO étrangers envoient au Maroc leurs propres accompagnateurs qui ne s’adjoignent jamais un guide marocain à défaut de langue, prétendent-ils, alors qu’en réalité, la corporation des guides de tourisme marocains est fière de compter parmi ces membres des polyglottes hautement qualifiés qui maîtrisent même les langues dites «rares». De plus, certaines agences de voyages, peu soucieuses de la qualité des services de guidage touristique et du rôle primordial du guide agréé, engagent des guides clandestins par économie.
Le lobbysme des bazaristes :
Le lobbysme des «bazaristes» constitue, depuis plusieurs années déjà, l’épée de Damoclès qui menace le métier de guide de tourisme. Il s’agit notamment de certains «bazars» qui à force de soudoyer les autorités locales, la Brigade Touristique et les opérateurs du secteur touristique (T.O, agences de voyages, concierges d’hôtels, maisons d’hôtes, compagnies de transport touristique) sont devenus de véritables parrains qui font régner un climat de monopole et de divergence extrême dans les rangs des guides de tourisme. Par conséquent, il est devenu tout à fait normal que les bazars s’immiscent dans le dispatching des missions de guidage touristique favorisant une poignée de guides alliés par rapport à leurs confrères et au détriment de la compétence, du savoir-faire, du professionnalisme et de la qualité optimale du service.
Lacunes, ambiguïtés et contradictions de la loi 05-12 :
Cette nouvelle loi est intervenue alors que les répercussions de la récession économique mondiale commencent à peser sur le secteur. On s’attendait à une nouvelle loi à même de résoudre les problèmes qui entravent la bonne marche du métier et son épanouissement, mais en vain. La loi 30-96 abrogée n’a sincèrement rien à envier à la nouvelle loi 05-12. Les lacunes, les ambiguïtés et les contradictions de certains articles de cette loi sont manifestes; à savoir en particulier les articles 4 et 31 qui suscitent la polémique. L’on se demande légitimement, en conséquence, si le ministère de tutelle ne s’est pas écarté des objectifs de la «Vision 2030» qui table sur le tourisme comme moteur du développement économique. En plus, si on estime que le guide de tourisme est l’ambassadeur de son pays auprès des touristes auxquels il fait découvrir le Maroc et ses attraits particuliers, il va de soi que ce métier soit davantage tiré vers le haut. Cependant, l’article 31 de ladite loi ne présage que le maintien du statu quo tant controversé.
(A suivre)
Chapitre I
Définition de la profession de guide de tourisme
Article 1
Est guide de tourisme toute personne physique qui, contre rémunération, accompagne les touristes et veille à leur sécurité et leur tranquillité et qui leur fournit les informations nécessaires.
La profession de guide de tourisme comporte deux catégories :
La catégorie des guides des villes et des circuits touristiques ;
La catégorie des guides des espaces naturels.
Chacune de ces catégories de la profession est exercée à titre exclusif.
Article 2
L’activité de guide des villes et des circuits touristiques consiste à fournir aux touristes toute information à caractère géographique, historique, architectural, culturel, social, économique ou autres, et à les assister et les accompagner, à pied ou à bord des véhicules de transport, sur la voie publique et les sites touristiques, à l’intérieur des monuments, des musées, des lieux d’intérêt culturel ou artistique, des établissements touristiques et des lieux publics.
Article 3
L’activité de guide des espaces naturels consiste à accompagner et assister les touristes au cours d’excursions ou de randonnées au niveau des sites naturels tels que montagnes, déserts, villages ou autres, à pied, ou à dos de bêtes de somme ou encore dans des véhicules de transport appropriés, sur des circuits comportant des pistes, des sentiers ou des voies praticables sans le recours aux techniques de l’escalade, de l’alpinisme ou du ski et à leur fournir les informations sur les zones et sites visités, aussi bien à caractère naturel, historique, géographique, culturel, économique ou social.
Article 4
Le guide des villes et des circuits touristiques et le guide des espaces naturels exercent, chacun selon sa compétence, sur l’ensemble du territoire national.
Chapitre II
Des conditions d’exercice de la profession de guide de tourisme
Article 5
Nul ne peut exercer la profession de guide de tourisme s’il n’est titulaire d’un agrément délivré par l’administration compétente.
Article 6
Pour obtenir l’agrément visé à l’article 5 ci-dessus, le candidat à l’exercice de la profession de guide de tourisme doit :
Etre de nationalité marocaine ;
Etre âgé d’au moins 18 ans ;
Etre apte physiquement à l’exercice de la profession ; justifier d’une formation et de compétences professionnelles telles que fixées par voie réglementaire ;
N’avoir pas fait l’objet d’une condamnation à une peine d’emprisonnement pour crime ou délit, à l’exclusion des infractions involontaires.
L’agrément est délivré selon les conditions et modalités fixées par voie réglementaire.
Tout refus de délivrance de l’agrément doit être motivé et intervenir dans les délais légaux en vigueur.
Article 7
L’âge limite d’exercice de la profession de guide de tourisme est fixé à 60 ans. Au-delà de cet âge, le guide de tourisme peut être autorisé à continuer à exercer son activité dans les conditions et selon les modalités fixées par voie réglementaire.
Chapitre III
Des modalités d’exercice de la profession de guide de tourisme
Article 8
L’activité de guide de tourisme est exercée :
Soit à titre indépendant ;
Soit sous forme d’une société de guides de tourisme telle que définie au chapitre IV de la présente loi ;
Soit à titre de salarié d’un organisme touristique ou d’une entreprise touristique ou d’une société de guides de tourisme.
Article 9
Le guide de tourisme travaillant à titre de salarié d’un organisme touristique, d’une entreprise touristique ou d’une société de guides de tourisme, doit être lié à son employeur par un contrat de travail conformément à la législation et à la réglementation du travail en vigueur.
Article 10
Pendant l’exercice de leur activité, les guides de tourisme doivent être porteurs d’une carte professionnelle et d’un badge qui leur sont délivrés par l’administration compétente en même temps que l’agrément visé à l’article 5 ci-dessus et qu’ils doivent présenter à tout moment sur réquisition des agents assermentés et dûment mandatés, à cet effet, par l’administration.
Article 11
La carte professionnelle et le badge sont nominatifs et délivrés à titre personnel.
ROLES MAJEURS DU GUIDE DE TOURISME
La diplomatie parallèle
Si Feu Sa Majesté le Roi Hassan II a donné le titre d’«Ambassadeur» au guide de tourisme, c’est parce que, grand visionnaire qu’il fut, il était conscient du rôle important que joue ce citoyen exemplaire dans le développement de la diplomatie parallèle. En effet, bien que la quasi majorité des touristes voyageant à titre individuel, mais en groupe particulièrement, passe par le biais de Tour-Operateurs ou d’agences de voyages pour organiser son séjour, il n’en demeure pas moins vrai qu’une fois arrivés au Maroc, c’est le guide de tourisme qui est leur seul interlocuteur direct. Il va de soi, par conséquent et indépendamment de la durée passée en compagnie du guide de tourisme, que ce dernier dissipe certaines ambiguïtés et parvienne à convaincre les touristes majoritairement dupes et conditionnés par les médias à revoir leurs a priori quant aux diverses questions sociales, économiques, culturelles, confessionnelles ou politiques soient-elles. Généralement polyglotte, armé de connaissances générales, négociateur chevronné, grand diplomate et patriote convaincu, le guide de tourisme a toujours été l’un des mieux placés pour défendre l’intégrité territoriale, souligner le pluralisme qui caractérise le paysage global marocain et qui est une composante majeure de la démocratie, mettre l’accent sur la tolérance et la cohabitation des confessions au Maroc et remodeler les opinions préconçues de certains touristes. Tout cela et plus loin des discours redondants, monotones et parfois chauvins des politiques. En effet, c’est la bonne impression que le guide de tourisme donne et la confiance et l’amitié qui s’installent entre lui et ses clients qui lui confèrent tant de crédibilité et de pouvoir de persuasion dont sont dépourvus T.O, agences de voyages et politiciens tous réunis.
La Médiation culturelle
Le patrimoine et la culture sont deux éléments indispensables et indissociables qui constituent la stratégie du Maroc en matière de tourisme. Toutefois, l’essor du tourisme dépend étroitement de la stratégie mise en œuvre pou valoriser d’abord ce patrimoine et ensuite favoriser sa découverte par le visiteur.
Si les deux composantes susmentionnées sont le plus souvent utilisées juste comme un «label marketing» ou un «appât» pour drainer davantage de touristes et réaliser certains objectifs qui le plus souvent manquent de réalisme, c’est parce que l’on se soucie peu sinon jamais de la nature réelle du patrimoine et de son appréhension pour une valorisation optimale. Par ailleurs, hormis la nécessité de sa conservation -slogan désuet et redondant qu’on brandit à chaque occasion- le patrimoine se trouve face à un sérieux obstacle qui est la médiation. Cela dit, c’est là qu’intervient heureusement le guide de tourisme pour jouer ce rôle de médiateur. En effet, si la mise en valeur du patrimoine requiert la formulation d’un discours à même de permettre d’exprimer la signification du lieu pour la transmettre au touriste, il n’y a que le guide de tourisme qui accomplit actuellement cette mission délicate. Il va de soi que le patrimoine soit muet, mais c’est au guide qu’incombe de « remédier » à cette mutité en faisant appel à sa culture, à ses propres techniques de communication et à son grand talent d’animateur. En conséquence, étant parfaitement conscient que sa médiation doit être percutante, ce médiateur digne et incontestable veille toujours à assurer une concordance parfaite entre le message qu’il diffuse et l’identité des lieux visités. Selon Widad Tebba, ex-doyen et professeur chercheur à la Faculté des lettres & des sciences humaines, «il y a dans la médiation, une dimension pédagogique, une tâche de sensibilisation et une construction du sens… Le médiateur est un passeur qui crée des liens entre un LIEU, une CULTURE et un ou des PUBLICS… ».
La prescription
Nul ne pourrait nier le rôle important que joue le guide de tourisme dans le développement d’un secteur aussi porteur que fragile qu’est le tourisme. A juste titre, c’est en remplissant ses deux autres missions d’ambassadeur et de médiateur culturel que le guide de tourisme devient un prescripteur crédible qui participe effectivement à repositionner directement ou indirectement «le produit» Maroc pour davantage de visibilité et de commercialisation. Les spécialistes et les férus du marketing touristique qui souscrivent à «l’effet de recommandation» ne peuvent que confirmer cette thèse.
N’est-ce pas grâce à la participation effective du guide de tourisme que l’effet de retour est plus ou moins maintenu en dépit d’une conjoncture défavorable et d’une concurrence acharnée ? Si les plus pessimistes affichent une toute autre attitude vis-à-vis de cette opinion, il n’en demeure pas moins vrai qu’un client satisfait en vaut deux et qu’en conséquence, selon Bill Gates, « la meilleure des publicités est un client satisfait ».
N’est-ce pas aussi grâce au guide que certains produits qui font la fierté de l’artisanat marocain sont vendus ?
Bon nombre de raisons confirment incontestablement le rôle important et indéniable que joue ce prescripteur et agent commercial chevronné et indépendant dans le développement du PIB.
AUSCULTATION DU METIER DE GUIDE DE TOURISME
Un environnement hostile : (récession, usurpation du métier et complicité des agences de voyages)
La profession traverse une situation chaotique et alarmante qui prévaut et justifie pleinement l’inquiétude des professionnels du secteur touristique. Tout d’abord, il y a les effets néfastes de la récession sur le revenu de plus en plus maigre du guide de tourisme. Ces effets sont aggravés par le pullulement des guides clandestins étrangers qui sous le couvert de «l’investissement», entre autres, se permettent de piétiner toute loi au vu et au su des autorités locales et de la Brigade Touristique. Il y en a même qui sillonnent tout le pays sans jamais avoir froid aux yeux et en toute impunité, vraisemblablement en raison de ce que j’appelle personnellement « le complexe d’allégeance à l’étranger ». C’est devenu un véritable fléau dont les conséquences ne peuvent qu’être préjudiciables non seulement à la corporation des guides de tourisme mais également à l’image de marque de la destination Maroc. En effet, ces guides clandestins - auxquels je rajoute nos compatriotes usurpateurs du métier de guide touristique et dont le nombre ne cesse de croître- se permettent de fournir aux touristes dupes des informations complètement erronées sur notre culture, nos valeurs morales et spirituelles, nos traditions, bref sur tout ce qui a trait à l’identité marocaine. Véhiculant ainsi des messages fallacieux et nuisibles auprès de touristes déjà imprégnés de préjugés qui ne demandent qu’à être confirmés, les guides clandestins, étrangers notamment, aliènent les touristes. Corollairement, des effets tant souhaités tels que celui du «retour» et de la «recommandation ou de la prescription» sont largement compromis, se soldant ipso facto par un manque à gagner qui explique le fait que le Maroc n’ait pas tiré de profit tangible du «Printemps arabe». En parallèle, certains TO étrangers envoient au Maroc leurs propres accompagnateurs qui ne s’adjoignent jamais un guide marocain à défaut de langue, prétendent-ils, alors qu’en réalité, la corporation des guides de tourisme marocains est fière de compter parmi ces membres des polyglottes hautement qualifiés qui maîtrisent même les langues dites «rares». De plus, certaines agences de voyages, peu soucieuses de la qualité des services de guidage touristique et du rôle primordial du guide agréé, engagent des guides clandestins par économie.
Le lobbysme des bazaristes :
Le lobbysme des «bazaristes» constitue, depuis plusieurs années déjà, l’épée de Damoclès qui menace le métier de guide de tourisme. Il s’agit notamment de certains «bazars» qui à force de soudoyer les autorités locales, la Brigade Touristique et les opérateurs du secteur touristique (T.O, agences de voyages, concierges d’hôtels, maisons d’hôtes, compagnies de transport touristique) sont devenus de véritables parrains qui font régner un climat de monopole et de divergence extrême dans les rangs des guides de tourisme. Par conséquent, il est devenu tout à fait normal que les bazars s’immiscent dans le dispatching des missions de guidage touristique favorisant une poignée de guides alliés par rapport à leurs confrères et au détriment de la compétence, du savoir-faire, du professionnalisme et de la qualité optimale du service.
Lacunes, ambiguïtés et contradictions de la loi 05-12 :
Cette nouvelle loi est intervenue alors que les répercussions de la récession économique mondiale commencent à peser sur le secteur. On s’attendait à une nouvelle loi à même de résoudre les problèmes qui entravent la bonne marche du métier et son épanouissement, mais en vain. La loi 30-96 abrogée n’a sincèrement rien à envier à la nouvelle loi 05-12. Les lacunes, les ambiguïtés et les contradictions de certains articles de cette loi sont manifestes; à savoir en particulier les articles 4 et 31 qui suscitent la polémique. L’on se demande légitimement, en conséquence, si le ministère de tutelle ne s’est pas écarté des objectifs de la «Vision 2030» qui table sur le tourisme comme moteur du développement économique. En plus, si on estime que le guide de tourisme est l’ambassadeur de son pays auprès des touristes auxquels il fait découvrir le Maroc et ses attraits particuliers, il va de soi que ce métier soit davantage tiré vers le haut. Cependant, l’article 31 de ladite loi ne présage que le maintien du statu quo tant controversé.
(A suivre)
La panoplie de décrets d’application :
La panoplie de décrets d’application -manifestement ingénus- de certains articles de ladite loi controversée tramés unilatéralement à l’insu de la corporation des guides de tourisme au moment où leur Fédération, écartée du processus de définition et de ratification des décrets en question, était provisoirement dissoute ou son activité vraisemblablement gelée en raison de la démission de son président. Un vide que le ministère a tourné à son avantage pour entériner un ensemble de décisions peu orthodoxes, préjudiciables au devenir d’une profession - qui certes a du plomb dans l’aile - et provocatrices de fronde, de courroux et de désarroi parmi les guides de tourisme. Rappelons, à titre d’exemple, la “formation” basique et indéniablement médiocre décidée et appliquée hâtivement par le ministère de tutelle en 2017 et dont les “ingénieurs” n’ont tenu compte ni de l’hétérogénéité de la population des guides de tourisme ni de la diversité de leurs formations. Pour doubler ses torts d’un affront, le même ministère a recouru en 2018 à la mise en vigueur des dispositions de l’article 31 de la loi 05-12 causant ainsi le “dumping” de la profession du guidage touristique par de nouveaux venus majoritairement non qualifiés, nonobstant la conjoncture défavorable, le surplus des guides de tourisme et des protestations des associations représentatives du secteur. Cependant, alors que l’on s’attendait à ce que le ministère de tutelle réajuste sa stratégie défaillante de la gouvernance d’un dossier aussi épineux que celui de la profession de guide de tourisme, notamment après la nomination du nouveau ministre, la série des aberrations des dispositifs dudit ministère ne fait que persister. En effet, pour comble d’insulte, voilà qu’il impose de nouvelles conditions saugrenues et irrationnelles pour le renouvellement des documents de travail des guides de tourisme qui sont, d’ores et déjà, appelés à s’y conformer triennalement faute d’abrogation de leurs agréments. L’on se demande légitimement si, au lieu de tirer le métier de guide vers le haut en instaurant un plan d’action à même de garantir sa pérennisation et la dignité de ses professionnels, les divers dispositifs ministériels arbitraires et contraignants n’aspirent au contraire qu’à semer un nouveau vent de panique chez les guides de tourisme en les plongeant dans davantage d’instabilité morale et matérielle, de zizanie et de malaise. Malheureusement, force est de constater que par le truchement de cette dernière mesure lésante, le ministère du Tourisme cherche à substituer le nouveau badge biométrique temporaire à l’agrément permanent.
L’absence d’une stratégie globale et bien définie pour le développement du métier de guide de tourisme à l’instar des pays concurrents et leaders du secteur.
La réticence des tribunaux marocains quant à l’application de l’article 381 du Code pénal à l’encontre des usurpateurs de la profession de guide de tourisme, ce qui favorise la prolifération de l’anarchie.
Etat des lieux alarmant
Comme toute autre activité, celle du guide de tourisme est assujettie à des fluctuations parfois des plus imprévisibles. Il est, donc, tout à fait normal qu’un vent de panique souffle sur ce métier et le secousse compte tenu surtout des nombreux déboires essuyés. L’on s’inquiète de plus en plus pour son gagne-pain mais l’on nourrit tout de même un petit brin d’espoir qui fait que la corporation des guides de tourisme soit aujourd’hui plus que jamais auparavant à même de relever de nouveaux défis. En témoigne, d’ailleurs, le sit-in organisé simultanément dans bon nombre de villes touristiques le 25 juin 2013. A vrai dire, l’on s’estime heureux et fier que la corporation des guides de tourisme compte aujourd’hui plusieurs centaines de titulaires de doctorats, de masters et de licences. Autrement dit, l’époque où la quasi-majorité des guides étaient sans diplômes voire même analphabètes est révolue. Cependant, en raison du contexte de morosité économique actuel qui frappe de plein fouet les marchés émetteurs, il va de soi que le comportement des touristes soit affecté et leurs bourses avec. Tant que la récession persiste, les guides de tourisme continueront, à l’instar d’autres secteurs dépendant du tourisme, à en subir les conséquences. Franchement, l’ère du touriste dépensier et les périodes de vaches grasses sont, semble-t-il, des années-lumière derrière nous. L’on se contente à présent de lutter pour la survie mais tout en réorganisant, en assainissant et en restructurant la profession pour pouvoir un jour remonter la pente.
Enjeux difficilement mesurables
& desiderata légitimes
A défaut d’une vision claire et bien définie et d’une appréhension adéquate des enjeux stratégiques de la profession de guide de tourisme qui peine toujours à maintenir le cap, le ministère du Tourisme ne cesse de «patauger» et d’improviser des solutions souvent saugrenues et inefficaces pour pallier des problèmes sectoriels qui requièrent des mesures radicales. Corollairement, les professionnels de ce secteur d’activité qui constitue une composante importante de la chaîne des valeurs du tourisme se sentent lésés, ce qui explique le vent de fronde et de tollé qui souffle parmi leurs rangs.
S’agissant de leurs revendications par rapport à la nouvelle loi sur le métier du guidage, tout en étant cartésiens jusqu’à la moelle, il faut d’abord préciser qu’elles ne sont guère effarantes. Au contraire, elles sont très réalistes et ne visent qu’à tirer le métier vers le haut et à redorer son blason par le truchement d’une politique d’assainissement du milieu dans lequel il s’exerce pour le débarrasser une fois pour toutes des clichés et des préjugés qui y sont étroitement liés. Or, les desiderata légitimes des guides de tourisme se déclinent grosso modo comme suit :
L’abrogation de l’article 31 de la nouvelle loi 05-12 qui stipule textuellement «A titre transitoire et pendant une durée maximum de deux ans à compter de la date de publication de la présente loi au Bulletin officiel, il pourra être procédé selon les modalités fixées par voie réglementaire, à la délivrance d’agréments à des personnes ne remplissant pas les conditions de formation et de compétences professionnelles prévues à l’article 6 de la présente loi, mais disposant de compétences acquises sur le terrain».
L’amendement de l’article 4 de la même loi compte tenu des effets négatifs qu’il est susceptible d’engendrer, notamment le phénomène de transhumance des guides de tourisme et le déséquilibre qui en résulte : la concentration des guides de tourisme dans une ville particulière au détriment d’autres où le besoin serait fortement prononcé.
La lutte contre les courtiers, les intermédiaires et les lobbys puissants qui remplacent de plus en les agences de voyages et s’approprient leur rôle. En effet, certaines agences de voyages corrompues et, du même coup, une poignée de guides de tourisme sans vergogne sont aujourd’hui prises à la gorge, manipulées et exploitées par ces nouveaux parrains du tourisme qualifiés de «sangsues».
La mise en pratique et le renforcement du rôle ou de la mission de la Brigade Touristique en vue de contrôles efficaces, continus et rigoureux des maisons d’hôtes clandestines et des usurpateurs de la profession de guide de tourisme dans les souks et au sein même des monuments historiques sans omettre la lutte contre des phénomènes saillants tels que les vols, les agressions, la mendicité, l’agressivité de certains artistes de variété de la Place Jamâa Lafna par exemple et de vendeurs à l’intérieur comme à l’extérieur des souks.
L’exhortation à l’application de l’article 381 du Code pénal à l’encontre des usurpateurs du métier de guidage touristique.
Mettre fin aux agissements immoraux et aux pratiques malhonnêtes de certains chauffeurs de taxis qui sont préjudiciables à la réputation du tourisme marocain et du pays.
La constitution d’un comité commun composé de la Délégation du Tourisme, des autorités locales et de représentants des guides de tourisme pour le suivi et le contrôle des campagnes de lutte contre l’ensemble des phénomènes nuisibles mentionnés précédemment.
La concertation continue avec la corporation des guides de tourisme et leur implication dans les prises de décisions et dans la définition des stratégies afférentes à leur métier.
La construction par les conseils régionaux et l’autorité de tutelle de kiosques dédiés aux guides de tourisme, et ce à proximité de certains hôtels pour leur permettre, d’une part, d’être à l’abri des intempéries et préserver ainsi leur dignité en leur qualité d’ambassadeurs. D’autre part, cela leur permettra de mieux renseigner et de mieux servir les touristes qui en l’absence de cette « infrastructure rudimentaire » sont la proie facile des guides clandestins, des racoleurs, des agresseurs…
La condamnation de l’exclusion des guides de tourisme et la nécessité de faire appel à leurs services à l’occasion des grands congrès qui se tiennent par exemple à Marrakech et qui ne bénéficient actuellement qu’aux transporteurs, aux hôteliers et aux restaurateurs.
La définition et la limitation des services de certaines compagnies de transport touristique qui transcendent le cadre restreint de leur activité pour usurper le métier de guide de tourisme, ce qui constitue une transgression grave de la loi.
Role de l’Etat dans la pérennisation
du métier de guide de tourisme
Selon la loi 05-12 régissant la profession de guide de tourisme, tout usurpateur de ce métier est passible des sanctions prévues par l’article 381 du Code pénal. Malheureusement, même quand un usurpateur est pris en flagrant délit et poursuivi en justice, les tribunaux n’appliquent pas cet article pour des raisons inconnues, ce qui incite davantage d’hors-la-loi à élire domicile au Maroc et à usurper la profession de guide de tourisme en toute impunité. Il y en a même qui ont eu l’arrogance de défier tout le monde en construisant leurs propres sites web, en se proclamant conseillers de tourisme et guides touristiques professionnels et en dénigrant les guides marocains agréés. Les tribunaux marocains sont, par conséquent, appelés à assumer leur responsabilité en appliquant l’article susmentionné à l’encontre de ces hors-la-loi. Ainsi, elles participeraient à l’assainissement du paysage dans lequel s’exerce le métier de guide et contribueraient à sa pérennisation.
D’ailleurs, à l’occasion du sit-in du 25 juin 2013 qui était censé mettre en lumière ce fléau dangereux, l’Association régionale des guides de tourisme de Marrakech a envoyé des demandes de couverture médiatique à plusieurs chaînes de télévision pour sensibiliser l’opinion publique quant à l’ampleur du phénomène, mais sans qu’aucune chaîne ne lève le petit doigt, comme si la situation critique de la profession du guidage ne revêtait aucune importance.
Cela dit, l’ex-ministre du Tourisme Lahcen Haddad, ayant appris que le sit-in allait se tenir dans diverses villes touristiques, a 48 heures auparavant invité l’ensemble des Associations régionales des guides de tourisme à une table ronde pour écouter leurs doléances et débattre des solutions aux problèmes qui préoccupaient les professionnels du guidage touristique. A l’issue de cette réunion spéciale, le ministre du Tourisme a donné ses instructions à ses collaborateurs pour :
Envoyer des lettres à ses homologues, M. le ministre de la Justice et M. le ministre de l’Intérieur en vue de davantage de contrôle des étrangers (qui sous le couvert d’investissement ou de résidence au Maroc usurpent le métier de guide du tourisme) et de l’application inconditionnelle de l’article 381 du Code pénal à l’encontre de tout usurpateur (étranger ou marocain soit-il) ;
Ordonner aux délégués du tourisme de diffuser cette instruction auprès des maisons d’hôtes et des transporteurs du tourisme;
Mettre en garde les accompagnateurs étrangers et les sensibiliser à la nécessité de s’adjoindre un guide marocain.
Cependant, eu égard à la lenteur administrative qui caractérise notre pays et pénalise toute action, urgente soit-elle, et loin d’être sceptique, l’on doit se contenter de dire que pour le moment, la corporation des guides de tourisme laissera du temps au temps mais ne baissera jamais les bras.
Il est à noter, par ailleurs, que dans des pays concurrents tels que la Turquie, l’Egypte et vraisemblablement la Tunisie aussi, les guides de tourisme jouissent d’un statut nettement meilleur que celui de leurs homologues marocains. Nous savons pertinemment qu’en Egypte et en Turquie, les corporations des guides de tourisme disposent de locaux (bâtiment comprenant entre autres une administration, des salles de réunions et de formation continue, une bibliothèque et un cafétéria) que leurs Etats ou ministères de tutelle ont mis à leur disposition pour une organisation et une qualité de services optimales sans oublier les divers programmes de soutien dont elles bénéficient. Il s’agit d’une politique d’accompagnement de laquelle nous espérons que le Maroc puisse un jour s’inspirer pour le repositionnement du métier de guide de tourisme. Nous avons tous les atouts pour tourner cette profession en un vrai label de qualité et d’excellence reconnu à l’échelle mondiale et, pourquoi pas, en une technicité exportable. Malheureusement, ce n’est encore aujourd’hui qu’un rêve à atteindre peut-être un jour mais non sans parcours du combattant.
La panoplie de décrets d’application -manifestement ingénus- de certains articles de ladite loi controversée tramés unilatéralement à l’insu de la corporation des guides de tourisme au moment où leur Fédération, écartée du processus de définition et de ratification des décrets en question, était provisoirement dissoute ou son activité vraisemblablement gelée en raison de la démission de son président. Un vide que le ministère a tourné à son avantage pour entériner un ensemble de décisions peu orthodoxes, préjudiciables au devenir d’une profession - qui certes a du plomb dans l’aile - et provocatrices de fronde, de courroux et de désarroi parmi les guides de tourisme. Rappelons, à titre d’exemple, la “formation” basique et indéniablement médiocre décidée et appliquée hâtivement par le ministère de tutelle en 2017 et dont les “ingénieurs” n’ont tenu compte ni de l’hétérogénéité de la population des guides de tourisme ni de la diversité de leurs formations. Pour doubler ses torts d’un affront, le même ministère a recouru en 2018 à la mise en vigueur des dispositions de l’article 31 de la loi 05-12 causant ainsi le “dumping” de la profession du guidage touristique par de nouveaux venus majoritairement non qualifiés, nonobstant la conjoncture défavorable, le surplus des guides de tourisme et des protestations des associations représentatives du secteur. Cependant, alors que l’on s’attendait à ce que le ministère de tutelle réajuste sa stratégie défaillante de la gouvernance d’un dossier aussi épineux que celui de la profession de guide de tourisme, notamment après la nomination du nouveau ministre, la série des aberrations des dispositifs dudit ministère ne fait que persister. En effet, pour comble d’insulte, voilà qu’il impose de nouvelles conditions saugrenues et irrationnelles pour le renouvellement des documents de travail des guides de tourisme qui sont, d’ores et déjà, appelés à s’y conformer triennalement faute d’abrogation de leurs agréments. L’on se demande légitimement si, au lieu de tirer le métier de guide vers le haut en instaurant un plan d’action à même de garantir sa pérennisation et la dignité de ses professionnels, les divers dispositifs ministériels arbitraires et contraignants n’aspirent au contraire qu’à semer un nouveau vent de panique chez les guides de tourisme en les plongeant dans davantage d’instabilité morale et matérielle, de zizanie et de malaise. Malheureusement, force est de constater que par le truchement de cette dernière mesure lésante, le ministère du Tourisme cherche à substituer le nouveau badge biométrique temporaire à l’agrément permanent.
L’absence d’une stratégie globale et bien définie pour le développement du métier de guide de tourisme à l’instar des pays concurrents et leaders du secteur.
La réticence des tribunaux marocains quant à l’application de l’article 381 du Code pénal à l’encontre des usurpateurs de la profession de guide de tourisme, ce qui favorise la prolifération de l’anarchie.
Etat des lieux alarmant
Comme toute autre activité, celle du guide de tourisme est assujettie à des fluctuations parfois des plus imprévisibles. Il est, donc, tout à fait normal qu’un vent de panique souffle sur ce métier et le secousse compte tenu surtout des nombreux déboires essuyés. L’on s’inquiète de plus en plus pour son gagne-pain mais l’on nourrit tout de même un petit brin d’espoir qui fait que la corporation des guides de tourisme soit aujourd’hui plus que jamais auparavant à même de relever de nouveaux défis. En témoigne, d’ailleurs, le sit-in organisé simultanément dans bon nombre de villes touristiques le 25 juin 2013. A vrai dire, l’on s’estime heureux et fier que la corporation des guides de tourisme compte aujourd’hui plusieurs centaines de titulaires de doctorats, de masters et de licences. Autrement dit, l’époque où la quasi-majorité des guides étaient sans diplômes voire même analphabètes est révolue. Cependant, en raison du contexte de morosité économique actuel qui frappe de plein fouet les marchés émetteurs, il va de soi que le comportement des touristes soit affecté et leurs bourses avec. Tant que la récession persiste, les guides de tourisme continueront, à l’instar d’autres secteurs dépendant du tourisme, à en subir les conséquences. Franchement, l’ère du touriste dépensier et les périodes de vaches grasses sont, semble-t-il, des années-lumière derrière nous. L’on se contente à présent de lutter pour la survie mais tout en réorganisant, en assainissant et en restructurant la profession pour pouvoir un jour remonter la pente.
Enjeux difficilement mesurables
& desiderata légitimes
A défaut d’une vision claire et bien définie et d’une appréhension adéquate des enjeux stratégiques de la profession de guide de tourisme qui peine toujours à maintenir le cap, le ministère du Tourisme ne cesse de «patauger» et d’improviser des solutions souvent saugrenues et inefficaces pour pallier des problèmes sectoriels qui requièrent des mesures radicales. Corollairement, les professionnels de ce secteur d’activité qui constitue une composante importante de la chaîne des valeurs du tourisme se sentent lésés, ce qui explique le vent de fronde et de tollé qui souffle parmi leurs rangs.
S’agissant de leurs revendications par rapport à la nouvelle loi sur le métier du guidage, tout en étant cartésiens jusqu’à la moelle, il faut d’abord préciser qu’elles ne sont guère effarantes. Au contraire, elles sont très réalistes et ne visent qu’à tirer le métier vers le haut et à redorer son blason par le truchement d’une politique d’assainissement du milieu dans lequel il s’exerce pour le débarrasser une fois pour toutes des clichés et des préjugés qui y sont étroitement liés. Or, les desiderata légitimes des guides de tourisme se déclinent grosso modo comme suit :
L’abrogation de l’article 31 de la nouvelle loi 05-12 qui stipule textuellement «A titre transitoire et pendant une durée maximum de deux ans à compter de la date de publication de la présente loi au Bulletin officiel, il pourra être procédé selon les modalités fixées par voie réglementaire, à la délivrance d’agréments à des personnes ne remplissant pas les conditions de formation et de compétences professionnelles prévues à l’article 6 de la présente loi, mais disposant de compétences acquises sur le terrain».
L’amendement de l’article 4 de la même loi compte tenu des effets négatifs qu’il est susceptible d’engendrer, notamment le phénomène de transhumance des guides de tourisme et le déséquilibre qui en résulte : la concentration des guides de tourisme dans une ville particulière au détriment d’autres où le besoin serait fortement prononcé.
La lutte contre les courtiers, les intermédiaires et les lobbys puissants qui remplacent de plus en les agences de voyages et s’approprient leur rôle. En effet, certaines agences de voyages corrompues et, du même coup, une poignée de guides de tourisme sans vergogne sont aujourd’hui prises à la gorge, manipulées et exploitées par ces nouveaux parrains du tourisme qualifiés de «sangsues».
La mise en pratique et le renforcement du rôle ou de la mission de la Brigade Touristique en vue de contrôles efficaces, continus et rigoureux des maisons d’hôtes clandestines et des usurpateurs de la profession de guide de tourisme dans les souks et au sein même des monuments historiques sans omettre la lutte contre des phénomènes saillants tels que les vols, les agressions, la mendicité, l’agressivité de certains artistes de variété de la Place Jamâa Lafna par exemple et de vendeurs à l’intérieur comme à l’extérieur des souks.
L’exhortation à l’application de l’article 381 du Code pénal à l’encontre des usurpateurs du métier de guidage touristique.
Mettre fin aux agissements immoraux et aux pratiques malhonnêtes de certains chauffeurs de taxis qui sont préjudiciables à la réputation du tourisme marocain et du pays.
La constitution d’un comité commun composé de la Délégation du Tourisme, des autorités locales et de représentants des guides de tourisme pour le suivi et le contrôle des campagnes de lutte contre l’ensemble des phénomènes nuisibles mentionnés précédemment.
La concertation continue avec la corporation des guides de tourisme et leur implication dans les prises de décisions et dans la définition des stratégies afférentes à leur métier.
La construction par les conseils régionaux et l’autorité de tutelle de kiosques dédiés aux guides de tourisme, et ce à proximité de certains hôtels pour leur permettre, d’une part, d’être à l’abri des intempéries et préserver ainsi leur dignité en leur qualité d’ambassadeurs. D’autre part, cela leur permettra de mieux renseigner et de mieux servir les touristes qui en l’absence de cette « infrastructure rudimentaire » sont la proie facile des guides clandestins, des racoleurs, des agresseurs…
La condamnation de l’exclusion des guides de tourisme et la nécessité de faire appel à leurs services à l’occasion des grands congrès qui se tiennent par exemple à Marrakech et qui ne bénéficient actuellement qu’aux transporteurs, aux hôteliers et aux restaurateurs.
La définition et la limitation des services de certaines compagnies de transport touristique qui transcendent le cadre restreint de leur activité pour usurper le métier de guide de tourisme, ce qui constitue une transgression grave de la loi.
Role de l’Etat dans la pérennisation
du métier de guide de tourisme
Selon la loi 05-12 régissant la profession de guide de tourisme, tout usurpateur de ce métier est passible des sanctions prévues par l’article 381 du Code pénal. Malheureusement, même quand un usurpateur est pris en flagrant délit et poursuivi en justice, les tribunaux n’appliquent pas cet article pour des raisons inconnues, ce qui incite davantage d’hors-la-loi à élire domicile au Maroc et à usurper la profession de guide de tourisme en toute impunité. Il y en a même qui ont eu l’arrogance de défier tout le monde en construisant leurs propres sites web, en se proclamant conseillers de tourisme et guides touristiques professionnels et en dénigrant les guides marocains agréés. Les tribunaux marocains sont, par conséquent, appelés à assumer leur responsabilité en appliquant l’article susmentionné à l’encontre de ces hors-la-loi. Ainsi, elles participeraient à l’assainissement du paysage dans lequel s’exerce le métier de guide et contribueraient à sa pérennisation.
D’ailleurs, à l’occasion du sit-in du 25 juin 2013 qui était censé mettre en lumière ce fléau dangereux, l’Association régionale des guides de tourisme de Marrakech a envoyé des demandes de couverture médiatique à plusieurs chaînes de télévision pour sensibiliser l’opinion publique quant à l’ampleur du phénomène, mais sans qu’aucune chaîne ne lève le petit doigt, comme si la situation critique de la profession du guidage ne revêtait aucune importance.
Cela dit, l’ex-ministre du Tourisme Lahcen Haddad, ayant appris que le sit-in allait se tenir dans diverses villes touristiques, a 48 heures auparavant invité l’ensemble des Associations régionales des guides de tourisme à une table ronde pour écouter leurs doléances et débattre des solutions aux problèmes qui préoccupaient les professionnels du guidage touristique. A l’issue de cette réunion spéciale, le ministre du Tourisme a donné ses instructions à ses collaborateurs pour :
Envoyer des lettres à ses homologues, M. le ministre de la Justice et M. le ministre de l’Intérieur en vue de davantage de contrôle des étrangers (qui sous le couvert d’investissement ou de résidence au Maroc usurpent le métier de guide du tourisme) et de l’application inconditionnelle de l’article 381 du Code pénal à l’encontre de tout usurpateur (étranger ou marocain soit-il) ;
Ordonner aux délégués du tourisme de diffuser cette instruction auprès des maisons d’hôtes et des transporteurs du tourisme;
Mettre en garde les accompagnateurs étrangers et les sensibiliser à la nécessité de s’adjoindre un guide marocain.
Cependant, eu égard à la lenteur administrative qui caractérise notre pays et pénalise toute action, urgente soit-elle, et loin d’être sceptique, l’on doit se contenter de dire que pour le moment, la corporation des guides de tourisme laissera du temps au temps mais ne baissera jamais les bras.
Il est à noter, par ailleurs, que dans des pays concurrents tels que la Turquie, l’Egypte et vraisemblablement la Tunisie aussi, les guides de tourisme jouissent d’un statut nettement meilleur que celui de leurs homologues marocains. Nous savons pertinemment qu’en Egypte et en Turquie, les corporations des guides de tourisme disposent de locaux (bâtiment comprenant entre autres une administration, des salles de réunions et de formation continue, une bibliothèque et un cafétéria) que leurs Etats ou ministères de tutelle ont mis à leur disposition pour une organisation et une qualité de services optimales sans oublier les divers programmes de soutien dont elles bénéficient. Il s’agit d’une politique d’accompagnement de laquelle nous espérons que le Maroc puisse un jour s’inspirer pour le repositionnement du métier de guide de tourisme. Nous avons tous les atouts pour tourner cette profession en un vrai label de qualité et d’excellence reconnu à l’échelle mondiale et, pourquoi pas, en une technicité exportable. Malheureusement, ce n’est encore aujourd’hui qu’un rêve à atteindre peut-être un jour mais non sans parcours du combattant.