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Résultat, la tutelle du ministère de la Communication sur les médias publics s’exerçait au niveau des grands principes et des valeurs –une responsabilité politique- dans l’élaboration des cahiers des charges. «Et c’était aux professionnels des télévisions et des radios publiques de décliner ces principes dans la programmation. Les équipes de la SNRT et de SOREAD 2M travaillaient donc en étroite collaboration avec la direction des études du ministère de la Communication. Il n’était pas question pour les gens du ministère de faire le boulot des professionnels de la télé et de la radio. De toutes les manières, ils n’ont pas la compétence pour ce faire. Chacun son métier !», s’exclame cet ex-membre de l’équipe de Nabil Benabdallah qui était ministre de la Communication dans le gouvernement de Driss Jettou tout en relevant avec force que «le rôle d’un ministre de la Communication n’a jamais été celui d’un directeur des programmes ».
A l’évidence Mostafa El Khalfi n’a pas résisté à la tentation de la programmation. A la radio, les journalistes sont en tout cas nombreux à le penser et, surtout, à s’en inquiéter. L’exemple de la métamorphose programmée de Chaîne inter, la radio de langue française de la SNRT, catalyse à lui seul l’instrumentalisation politique des médias publics. Conformément au nouveau cahier des charges, Chaîne inter devient désormais «Radio internationale» et ne diffusera plus ses programmes en langue française. Dans la foulée, l’appel à la prière fait son apparition sur cette radio.
Fonction de divertissement
en dernier ressort
Mais reprenons depuis le début. Le ministre de la Communication qui a fait, on le sait, de la Constitution sa bible, a pris la décision, «politique» arguent ses collaborateurs, d’introduire la langue arabe dans les programmes de la chaîne internationale. L’arabe est la langue officielle du pays –elle n’est pas la seule puisque le tamazight l’est tout autant depuis l’adoption de la nouvelle constitution- et donc M. El Khalfi s’est engagé à appliquer à la lettre cette disposition constitutionnelle qui a existé depuis la toute première Constitution du pays. Problème, la Radio nationale de la même SNRT et voisine de palier de la défunte Chaîne inter diffuse ses émissions en langue arabe. La cible de cette radio a également changé à la faveur du changement de gouvernement. Elle ne s’adresse plus aux jeunes urbains du Maroc. Radio généraliste, elle doit désormais faire connaître le Maroc, sa culture, son histoire, son patrimoine, aux auditeurs étrangers…
En élaborant le cahier des charges de l’ex-Chaîne inter devenue «Radio internationale», une chaîne qui doit désormais diffuser ses programmes en arabe, français, anglais et espagnol, la mission de divertissement vient en dernier ressort. Le nouveau cahier des charges préparé par M. El Khalfi et ses équipes parle d’abord d’une fonction d’information, d’éducation et de culture. «Toutes les radios du monde ont d’abord et avant tout une mission d’informations et de divertissement. Nous n’allons pas inventer l’eau chaude. Le rôle d’une radio n’a jamais été d’éduquer les citoyens. De plus, il est clairement stipulé que la chaîne internationale s’adresse principalement aux auditeurs étrangers. Faudra-t-il les éduquer eux aussi ?», se demande cette productrice de Chaîne inter qui ne sait plus à quel saint médiatique se vouer.
Programmation encore et toujours. La chaîne internationale doit diffuser au moins quatre journaux radiophoniques par jour, en arabe, français, anglais et espagnol, organiser des émissions de débat quotidiennement. Des émissions thématiques ont également été prévues, comme celle, en arabe, consacrée au Maghreb et au développement de cette région et avec comme invités (même cela est prévu par le cahier des charges !) des acteurs économiques et politiques maghrébins.
Une émission consacrée au tourisme marocain est aussi au programme. L’article 158 des cahiers des charges précise qu’une telle émission est hebdomadaire et qu’elle est destinée à présenter les atouts touristiques du Maroc, les stratégies de développement et les opportunités d’investissement en terre marocaine. Le cahier des charges a tout prévu, y compris les invités. Les producteurs de ce programme sont sommés d’inviter en studio les opérateurs économiques et touristiques.
La chaîne internationale et la radio nationale se feront concurrence !
L’histoire contemporaine du Maroc est elle aussi prévue dans la grille de la chaîne internationale, grâce aux bons services de M. El Khalfi faisant des heures supplémentaires dans la programmation.
Cette même radio dite internationale est invitée à diffuser tous les jours des émissions de service visant «à expliquer les procédures administratives», «à sensibiliser sur le Code de la route et la protection de l’environnement». L’article 156 du cahier des charges va encore plus loin et rentre dans le détail avec la programmation d’émissions «aidant les citoyens à exercer leur citoyenneté et les étrangers résidant au Maroc à avoir accès aux différents services administratifs».
La production nationale –au nom de l’identité marocaine, le cheval de bataille de M. El Khalfi – doit constituer 50% de la programmation musicale de la chaîne internationale, désormais en concurrence avec la chaîne nationale de la SNRT. «Deux radios qui risquent de diffuser les mêmes émissions, la même musique et qui auront souvent les mêmes invités. Dans notre jargon, on appelle cela doublonner», soupire un animateur de la chaîne internationale.
Le ministre de la Communication affirme sur tous les tons ne pas intervenir dans la programmation des médias publics. Pourtant, le cahier des charges qui vient d’être adopté est une véritable grille des programmes notamment pour la radio et la chaîne internationale. «Le ministre dit avoir rencontré une quarantaine d’associations et d’organismes. C’est très bien. Mais tout ce beau monde ne saurait être responsable d’une grille. La télévision et la radio n’ont jamais été aussi performantes que lorsqu’elles sont confiées aux professionnels», affirme avec force ce journaliste de la radio.
Reste enfin la question qui se pose à tous les étages de la SNRT et des locaux exigus de la radio. Le ministre PJDiste a-t-il les moyens humains et financiers de ses ambitions audiovisuelles ? «Qui fera toutes ces émissions qu’il propose pour la Radio internationale ? A-t-il seulement pensé à cela ?», se demande une animatrice du service de la production de celle qui est encore pour quelques jours, quelques semaines Chaîne inter.