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Le calvaire de ce survivant de la violence par armes à feu, qui tue et blesse des dizaines de milliers de personnes tous les ans aux Etats-Unis, dure depuis 13 ans.
Ce jour d'été de juin 2010, l'adolescent se prépare à faire la fête avec des amis à Yonkers, une ville de la grande banlieue nord de New York, lorsqu'il est atteint au cou par une balle tirée dans un échange de coups de feu entre deux individus à une station-service.
Ralph Norman ressort vivant de l'hôpital mais presque entièrement paralysé, tétraplégique, ne pouvant bouger que la tête et les épaules. Depuis, il dépend d'une personne aidante jour et nuit pour manger, se laver, se coucher et même vider sa salive de son tube respiratoire.
Mais pendant des années, il a menti sur les raisons qui l'ont cloué pour toujours dans un fauteuil roulant. "Jusqu'à ces deux dernières années, je ne disais jamais, à personne, qu'on m'avait tiré dessus", avoue le trentenaire en recevant l'AFP chez lui à Yonkers. "Je parlais toujours d'un +accident de voiture+ parce que j'avais honte et peur d'être jugé comme membre d'un gang, ce qui n'était pas le cas". "La violence par armes à feu, c'est stigmatisant", lâche M. Norman.
Après des années de dépression -- "Vous en voulez au monde entier et à la personne qui vous a fait ça. C'est ça la maladie, quand on commence à déprimer" -- l'homme demande de l'aide.
Aujourd'hui, grâce à la communication virtuelle sur ordinateur, il participe chaque jour à un groupe de parole de victimes des armes à feu aux Etats-Unis: partages d'expériences et discussions sur la terrible actualité quotidienne américaine, comme lorsque trois enfants et trois adultes ont été assassinés lundi dans une école de Nashville, dans le Tennessee (sud des Etats-Unis).
Environ 400 millions d'armes à feu sont en circulation aux Etats-Unis, où elles ont provoqué en 2020 plus de 45.000 décès, que ce soit par suicide, accident, ou homicide, selon les derniers chiffres des Centres de prévention et de lutte contre les maladies (CDC).
Pour la première fois cette année-là, les armes sont devenues la première cause de mortalité chez les moins de 19 ans, avec 4.368 décès, devant les accidents de voiture et les overdoses, d'après les CDC.
Et les victimes de cette violence par arme à feu sont majoritairement des jeunes hommes noirs ou hispaniques issus des milieux les plus défavorisés.
En outre, souligne Elinore Kaufman, chirurgienne et traumatologue à l'hôpital Penn Presbyterian Medical Center à Philadelphie (Pennsylvanie, nord-est), le nombre de blessés représente près du double de celui des décès, soit 80.000 personnes par an.
Même avec une blessure légère, cela "altère votre vie complètement et pour toujours", déplore la professeure de médecine auprès de l'AFP.
Et "la moitié de nos patients développent des troubles du stress post-traumatique (TSPT) ou une dépression, aussi graves que ceux de nos anciens combattants" des forces armées américaines, alerte Mme Kaufman.
Pour la première puissance mondiale, l'impact économique de cette violence par arme à feu peut se chiffrer en dizaines de milliards de dollars en frais de santé et perte de productivité, rappellent les autorités.
Oronde McClain n'avait que dix ans quand il fut "déclaré mort durant deux minutes et 17 secondes", touché d'une balle dans la nuque alors qu'il tentait de fuir des échanges de tirs à Philadelphie. Sa tête est parsemée de cicatrices.
L'homme noir de 33 ans, marié à une infirmière et père de cinq enfants, souffre de migraines récurrentes et de tremblements, mais ce qui lui " fait le plus mal, ce sont les souvenirs", témoigne-t-il.
Par le dialogue avec d'autres victimes, "quand j'aide un autre survivant, je m'aide moi-même", souffle Oronde McClain qui espère qu'"ensemble, politiciens, policiers, tout le monde, on puisse arrêter cela".