Le Maroc figure parmi les bons élèves en matière de respect de ses engagements à ne plus construire de nouveaux projets de production d’électricité au charbon. Selon le dernier rapport de Global Energy Monitor, sur les centrales à charbon au monde, les capacités de production d’électricité au charbon (celles préconstruites, en construction, en développement actif ou au placard) avoisinent le zéro. Celles en opération sont estimées à 4.257 mégawatts contre 1.670 pour celles abandonnées. Le Maroc est ainsi classé parmi les pays où tous les plans sont annulés ou présumés annulés, tel est le cas également en République tchèque, Colombie, Djibouti, Côte d’Ivoire, Papouasie-Nouvelle-Guinée, Sri Lanka et Ouzbékistan. A rappeler que notre pays a été parmi les pays signataires du protocole Coal to Clean de la COP26, s’engageant à annuler leurs projets de centrales au charbon ainsi que le financement des énergies fossiles à l’étranger et à défendre la «neutralité carbone». Le nombre total de centrales au charbon ayant reçu une date de démantèlement a pratiquement doublé pour atteindre 750 centrales (550 GW). Toutefois, ce nouveau classement du Maroc laisse perplexe vu l’importance et la place du charbon dans le mix énergétique national. En effet, la part du charbon dans le bilan énergétique national n’a pas cessé de se renforcer en passant de 8% en 1980 à près de 28,5% en 2019. Sa consommation s’est développée surtout dans la génération de l’électricité, avec la mise en service de plusieurs centrales à charbon au Maroc au cours des six dernières années. Et selon des chiffres récents présentés au Parlement par Leila Benali, ministre de la Transition énergétique, le charbon a représenté 38,3% de la production électrique 2021, juste derrière les produits pétroliers (49,6%) alors que le fuel y contribue à hauteur de 16,1%. A noter que le charbon et le fuel sont deux matières stratégiques pour le pays. D’abord pour l’industrie et surtout pour les centrales électriques, notamment celles de Jorf Lasfar qui tournent exclusivement au charbon, et qui assurent près de la moitié des besoins du pays en électricité. Selon l'agence Apicorp Energy Research, le Royaume est considéré comme une exception puisqu'il est le seul pays à consacrer autant d'importance au charbon dans une région majoritairement «pétrolière». Selon la même source, le Maroc a placé le charbon au centre de sa stratégie de diversification, « une orientation qui passe inaperçue, souvent obnubilée par les grands projets solaires et éoliens », précise le rapport. En fait, et jusqu'à 2015, le charbon a représenté 31% du mix énergétique marocain contre 22 et 20% respectivement pour le gaz et le pétrole importés alors que l'énergie hydraulique et l'éolien n'en représentent que 15 et 10%. L'énergie solaire ne représente, quant à elle, que 2%. Aujourd’hui, les stocks en charbon sont en quantité moyenne. En effet et jusqu’au 11 avril dernier, les stocks en charbon se sont élevés à 30.000 tonnes à Jerada, 102.000 t à Mohammédia, 307.000 t à Jorf Lasfar et à 202.000 t à Safi, des quantités qui ne représentent que quelques semaines de stockage. A rappeler que le prix du charbon est passé de 69 dollars/t en 2021 à 415 dollars en mars 2022 sans oublier que 58% du charbon marocain vient de Russie. Le Maroc réussira-t-il à respecter ses engagements ? Personne ne le sait. En fait, tout est possible puisque des capacités nouvelles de production se sont remises à augmenter dans plusieurs pays. Tel est le cas de la Chine où on enregistre plus de la moitié (25,2 GW) des nouvelles centrales entrées en activité l'an dernier. Simultanément, Pékin a « neutralisé » 20 à 10 fois moins de capacités sur ses sites existants. Les autorités chinoises entendent continuer à accroître la production de charbon cette année de 300 millions de tonnes, soit une hausse de 7% par rapport à 2021, année déjà marquée par une progression de 5,7%. Une évolution visant à accroître les capacités de production d'électricité à base de charbon. A souligner enfin que le nombre de pays ayant encore des projets actifs demeure important. Ils sont 34 dans ce cas, contre 41 en janvier 2021. Toutefois, et pour la première fois depuis 2015, les capacités totalisées par les centrales à charbon en développement (annoncées, en phase d'étude, avec un permis de construire, et en construction) se sont remises à baisser. De 525,2 GW, elles sont passées à 456,5 GW, en recul de 13%.