Multinationales et milliardaires montrés du doigt
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Des taux d’imposition bas
Les millionnaires nord-africains et moyen-orientaux ne font pas, toutefois, l’exception puisque des recherches menées en partenariat avec les administrations fiscales montrent que les milliardaires du monde entier ont des taux d’imposition effectifs très bas, compris entre 0 % et 0,5 % de leur richesse. Dans un pays comme les Etats-Unis, le taux d’imposition effectif des milliardaires semble plus proche de 0,5%, tandis que dans un pays comme la France, il est plus proche de 0%. «Lorsque ces taux sont exprimés en fraction du revenu et en considérant tous les impôts payés à tous les niveaux de gouvernement au-delà des impôts sur les particuliers (y compris les impôts sur les sociétés, les taxes à la consommation, les charges sociales, etc.), les taux d'imposition effectifs des milliardaires semblent nettement inférieurs à ceux de tous les autres groupes de la population», précise ledit document.
L’impôt minimum mondial affaibli
S’agissant des multinationales, ledit rapport indique que depuis l’accord politique de 2021 sur un impôt minimum de 15% sur les bénéfices des multinationales, le minimum mondial a été considérablement affaibli par une liste croissante de lacunes. «L’impôt minimum mondial, dans l’état actuel des choses, ne générerait qu’une fraction des recettes fiscales que l’on pourrait en attendre selon les principes énoncés en 2021: moins de 5% des recettes mondiales de l’impôt sur les sociétés. Plus inquiétant encore, l’impôt minimum mondial permet toujours un nivellement par le bas de l’impôt sur les sociétés (et pourrait le renforcer) car il permet aux entreprises de maintenir leurs taux d’imposition effectifs en dessous de 15% tant qu’elles ont une activité réelle suffisante dans des secteurs à faible fiscalité. Cette exemption – une exception incite les entreprises multinationales à déplacer leur production vers des pays à très faible fiscalité – permet en retour, aux paradis fiscaux de continuer de proposer des taux inférieurs à 15%», souligne ledit rapport. L’économiste Gabriel Zucman, qui a rédigé ce rapport, sur lequel ont travaillé une centaine de chercheurs, a expliqué lundi matin sur France inter que «cette grande évasion se passe avant tout en Europe: Microsoft et Apple enregistrent des dizaines de milliards d’euros de bénéfices en Irlande». Dans le détail, ces spécialistes estiment que sur les 2.800 milliards de dollars de bénéfices réalisés à l’étranger par les entreprises (sur quelque 16.000 milliards de bénéfices mondiaux au total), 1.000 milliards ont été transférés dans des paradis fiscaux, soit 35%. Destinations favorites de ces transferts dont les multinationales américaines sont les championnes (avec près de la moitié de leurs profits réalisés à l’étranger concernés): l’Irlande, les Pays-Bas, les Îles Vierges ou encore les Îles Caïman.
De nouveaux paradis fiscaux
Cet état des lieux a eu pour contrepartie l’émergence de nouvelles formes de concurrence fiscale qui apparaissent, avec des effets négatifs sur les recettes publiques et les inégalités. Ainsi et «au cours des quinze dernières années, de nombreux pays ont introduit des régimes fiscaux préférentiels pour attirer des groupes socioéconomiques spécifiques perçus comme particulièrement mobiles. Du point de vue d'un seul pays, cette stratégie peut améliorer la collecte des impôts et stimuler l’activité intérieure. Mais globalement, ces politiques sont à somme négative: les contribuables attirés par un pays réduisent l’assiette fiscale du même montant dans un autre, et la collecte des recettes fiscales mondiales diminue. Parce que les régimes spéciaux ciblent principalement les individus fortunés, ils réduisent la progressivité des systèmes fiscaux, alimentant ainsi les inégalités. Les économies d'impôt par bénéficiaire ont élevé les coûts budgétaires pour les gouvernements », observent les spécialistes.
Pertes de recettes fiscales
A ce propos, le rapport constate qu’une grande partie des bénéfices est transférée vers les paradis fiscaux, sans effet perceptible jusqu’à présent. «Une quantité importante et persistante de bénéfices est transférée vers les paradis fiscaux: 1.000 milliards de dollars en 2022. C’est l’équivalent de 35% de tous les bénéfices réalisés par les sociétés multinationales en dehors du pays de leur siège. Les pertes de recettes fiscales sur les sociétés provoquées par ce déplacement sont importantes, équivalant à près de 10% des recettes fiscales collectées à l’échelle mondiale. Les multinationales américaines sont responsables d’environ 40% des transferts de bénéfices mondiaux, et les pays d’Europe continentale semblent être les plus touchés par cette évasion », rapporte l’Observatoire européen de la fiscalité.
Une évasion fiscale offshore divisée par trois
Cependant, les rédacteurs dudit rapport constatent que grâce à l’échange automatique d’informations bancaires, l’évasion fiscale offshore a été divisée par trois environ en moins de 10 ans. «Avant 2013, les ménages détenaient l’équivalent de 10% du PIB mondial. Aujourd’hui, la richesse financière des ménages offshore représente encore l’équivalent de 10% du PIB mondial, mais dans notre scénario central, seulement 25% environ de cette richesse échappe à l’impôt. Cette réduction est une réussite majeure qui montre que des progrès rapides peuvent être réalisés dans la lutte contre l’évasion fiscale s’il existe une volonté politique de le faire», constate le rapport. Et de conclure qu’:«un impôt minimum mondial sur les milliardaires permettrait de récolter des sommes importantes. Un impôt minimum sur les milliardaires égal à 2% de leur richesse permettrait de lutter contre cette évasion et générerait près de 250 milliards de dollars auprès de moins de 3.000 individus ».