Naguère érigé en modèle démocratique en Afrique de l’Ouest, le Mali s’est enlisé dans une situation de non-droit où l’impunité règne et où la corruption de la classe politique, le népotisme, la complicité avec les terroristes et la collusion avec les trafiquants de drogues sont devenus monnaie courante, abandonnant les Maliens à un destin tragique. Un tour d’horizon qu’Ibrahim Boubacar Keita, candidat aux prochaines élections présidentielles, n’a pas manqué de faire lors d’une conférence tenue au siège central de l’USFP à Rabat sous le thème « La situation au Sahel et les défis de la reconstruction du Mali ». Tous les clignotants sont au rouge, mais à la veille des prochaines échéances électorales, les espoirs sont permis. Evoquant la situation actuelle qui sévit dans le pays, l’intervenant n’a pas trouvé mieux que cette maxime « Gérer, c’est prévoir », pour l’illustrer. Chose qui n’a malheureusement pas été prise en compte. « Tout ce qui est arrivé au Mali était prévisible mais le gouvernement n’a rien entrepris pour l’éviter malgré la multitude de mises en garde qui lui ont été faites », s’insurge-t-il. Et du coup, la question du Nord-Mali, qui s’inscrit donc dans une très longue série de rébellions armées qui viennent ponctuer son histoire, a été propulsée au-devant de la scène. L’insatisfaction des populations nomades du Nord, le cycle de violences et de représailles quasiment continu et l’affaiblissement progressif des structures de l’Etat malien ont débouché sur un bras de fer entre les parties belligérantes. Ces dernières n’ont eu de cesse de chercher une issue au conflit. L’occasion pour M. Boubacar Keita de revenir sur l’accord d’Alger qu’il a dénoncé encore une fois. Selon lui « les dispositions de cet accord sont une insulte pour l’intelligence des Maliens ». D’aucuns parmi les militants maliens les ont qualifiées d’« accords de la honte ». Signés le 4 juillet 2006, les accords d’Alger pour la restauration de la paix, de la sécurité et du développement dans la région de Kidal prévoient une démilitarisation du Nord et la création « d’unités spéciales mixtes » composées en grande partie de Touaregs. En d’autres termes, l’armée malienne se retire d’une partie importante du territoire national au profit d’unités spéciales composées d’anciens rebelles. Le leader malien y voit même une atteinte à la souveraineté malienne.
Mais depuis un an et demi, c’est vraiment la descente aux enfers. Le coup d’Etat militaire du 22 mars 2012 a servi d’occasion pour les rebelles du Nord d’avancer dans leur conquête de certaines régions déstabilisant fortement le pays. Par ailleurs, comme l’a rappelé encore M. Boubacar Keita, le retour de Libye d’anciens mercenaires de Kadhafi et notamment de leur arsenal d’armement a en quelque sorte servi d’étincelle à un cocktail explosif dont tous les éléments étaient déjà réunis. C’est ainsi que «quelque 3000 tonnes de matériel militaire sont passés au Mali », a encore précisé l’intervenant en évoquant la chute en cascade de plusieurs villes du Nord et le MNLA qui a tout massacré sur son passage. Heureusement, le pays a été sauvé in extremis par l’intervention française. « L’opération Serval a sauvé ce qui pouvait l’être encore au Mali » a-t-il clamé.
Malgré tout, M. Boubacar Keita se veut très rassurant quant à l’avenir du pays. Instaurer la démocratie à travers les futures présidentielles est un défi à relever. Il s’engage à refonder l’Etat et à veiller à la promotion des ressources humaines qui, selon lui, détiennent irrémédiablement les clés de la réussite.