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Hassan Diab, chargé jeudi de former un gouvernement au Liban à la faveur du soutien du mouvement chiite Hezbollah, est un universitaire et ancien ministre de l'Education qui clame son indépendance et s'est autoproclamé "technocrate", en écho aux revendications de la rue. Peu connu du grand public, cet enseignant en ingénierie de 60 ans à l'Université américaine de Beyrouth (AUB) prend la succession de Saad Hariri après des semaines d'intenses tergiversations. Sa désignation intervient plus de deux mois après le début d'un mouvement populaire de contestation dans un contexte de crise économique sans précédent depuis la fin de la guerre civile (1975- 1990). Il a été poussé au poste de Premier ministre, réservé à un sunnite, avec le soutien des mouvements chiites Hezbollah et Amal, ainsi que celui du Courant patriotique libre (CPL), la formation du président Michel Aoun, un chrétien. Mais le principal bloc sunnite et ses alliés chrétiens n'ont pas apporté leur soutien à ce sexagénaire né à Beyrouth, faisant craindre l'émergence d'un clivage susceptible de compliquer encore plus la tâche que représente la formation d'un gouvernement dans ce pays multiconfessionnel. La demande des manifestants d'un gouvernement de technocrates indépendants sera aussi un défi pour M. Diab. Resté à l'écart des projecteurs depuis son départ du poste de ministre de l'Education en 2014, il s'est dit résolument "indépendant" à sa sortie d'un entretien avec le président Michel Aoun jeudi soir. Hassan Diab n'est membre avéré d'aucun parti politique, et ne soutient pas de groupe en particulier. Sur son site Internet, il se présente en outre comme "l'un des rares ministres technocrates depuis l'indépendance". Père de trois enfants, Hassan Diab a obtenu en 1985 un doctorat en génie informatique à l'Université de Bath, au RoyaumeUni. Il est actuellement professeur en génie informatique et en ingénierie électrique à l'Université américaine de Beyrouth, où il a occupé plusieurs postes --tant dans l'enseignement que dans l'administratif--, dont celui de vice-président, depuis qu'il y est entré en tant que professeur assistant à l'âge de 26 ans. Défenseur autoproclamé d'une réforme du système éducatif au Liban, il a signé plusieurs ouvrages et articles universitaires sur le sujet. "Je suis sûr que la solution à la plupart des défis économiques, sociaux, financiers ou encore liés au chômage, réside dans l'éducation sous toutes ses formes", écrit-il sur son site Internet. Il fut ministre de l'Education de 2011 à 2014, brève expérience dans la politique dans un contexte de forte polarisation politique, au sein d'un gouvernement dominé par le Hezbollah et ses alliés après l'effondrement d'une coalition gouvernementale déjà dirigée à l'époque par M. Hariri. Selon des observateurs, l'histoire pourrait se répéter. "Le prochain gouvernement sera dominé par le Hezbollah (et ses alliés) sans couverture politique pour Hariri et les sunnites", estime Imad Salamey, chercheur en sciences politiques à l'Université libanaise américaine (LAU). Tout comme il était arrivé à la tête du ministère de l'Education, M. Diab accède au poste de Premier ministre après le retrait de Saad Hariri. M. Hariri était vu comme le choix le plus probable à la tête d'un gouvernement de technocrates mais a annoncé tard mercredi renoncer à sa succession face à l'opposition de ses rivaux politiques à un tel cabinet, selon lui. Il avait démissionné le 29 octobre, près de deux semaines après le début du mouvement de contestation contre l'ensemble de la classe dirigeante. Trois jours après le déclenchement de cette contestation, M. Diab avait lui qualifié le mouvement d'"historique", écrivant sur les réseaux sociaux que "le peuple libanais" s'était "uni pour défendre ses droits à une vie libre et digne". Mais des militants et des manifestants l'ont critiqué pour avoir précédemment participé à ce qu'ils considèrent comme un gouvernement incompétent et corrompu. D'autres, sur les réseaux sociaux, ont attaqué un livre vantant ses mérites et son bilan de ministre, publié par le ministère de l'Education après son départ. Interrogée par l'AFP, Samar Hamdan, une voisine depuis 15 ans, dit n'avoir "vu que des bonnes choses venant de lui". "C'est un éminent universitaire (...) qui est resté humble en devenant ministre", a-t-elle affirmé à l'AFP.