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Manifestation traditionnelle pour marquer l’ouverture du Forum social mondial, une foule bruyante et joyeuse a traversé le centre de Porto Alegre le 25 janvier 2010 au soir. Mais cette année, le rendez-vous est résolument de petite envergure, tourné vers la réflexion et le bilan de dix années de lutte. Pas de véritable slogan unitaire dans le défilé, plus de Bush pour cible, pas d’Obama non plus. Les slogans illustraient la grande diversité du mouvement : outre la traditionnelle défense des Palestiniens, les altermondialistes réclament tout autant la « solidarité avec Cuba », la « légalisation des drogues », une « économie solidaire », la « libération des animaux » « des terres pour les indigènes, maintenant » ou conseillent encore : « Reprends en main ta vie et détruit le patriarcat. »
Dans la marche, beaucoup de jeunes et d’universitaires qui n’étaient pas là en 2001 mais semblent déjà vouloir prendre le relais. Urani Flores, elle, se souvient bien de son premier Forum social qu’elle évoque avec une certaine nostalgie : « Je crois que c’était différent, qu’il y avait plus d’énergie au début, plus de monde aussi, c’était mieux organisé, il y avait plus de choses... La programmation est toujours excellente, mais il y avait encore plus de choix. Je crois aussi qu’il y avait plus de rêves. » Jusqu’au 29 janvier, quelque 20.000 activistes doivent participer aux dizaines de débats et autres séminaires de réflexion. Pour que les altermondialistes établissent le calendrier de leurs actions futures, à commencer par celles de l’année 2010, avec Haïti en tête de liste.
Car bien sûr, le violent séisme du 12 janvier a imposé Haïti dans l’agenda du forum. Derrière les banderoles des mouvements syndicaux et des partis politiques de gauche venait un grand drapeau d’Haïti. « Haïti, urgence : de la nourriture pour ces gens » clamaient les manifestants qui s’inquiètent du grand déploiement militaire sur l’île. « Haïti a besoin de nourriture, pas d’armes », proclamait une immense banderole, « Solidarité sans armes », lisait-on sur certains tee-shirts.
Les militants du Forum social mondial sont prêts à envoyer des brigades de volontaires et des semences dans les zones rurales d’Haïti dévasté le 12 janvier par un violent séisme. La solidarité et la nécessité d’exercer un contrôle citoyen sur l’aide ont été très présentes au premier jour du grand rassemblement antilibéral. « Nous allons nous efforcer d’envoyer, d’ici au mois de mars, des brigades et des semences dans les zones rurales qui ont souffert du séisme et qui doivent accueillir 500.000 personnes qui ont fui Port-au-Prince », a déclaré à l’AFP le leader des Sans Terre du Brésil, Joao Pedro Stédile. Les Sans Terre, qui luttent pour donner des lopins de terres aux déshérités, sont le mouvement social le mieux organisé du Brésil. « Port-au-Prince est une zone militarisée qui recevra l’aide des agences gouvernementales, et nous, les mouvements sociaux, nous irons à l’intérieur » du pays, a-t-il ajouté.
« On a parlé d’un Plan Marshall pour aider Haïti, et cela nous fait un peu peur s’il n’y a pas un contrôle citoyen, parce qu’il n’existe pas de réseaux citoyens à Haïti ni de mouvements forts pour contrôler l’aide. Dans toutes les reconstructions qui ont suivi des guerres, c’est le capitalisme qui est sorti vainqueur », a mis en garde la féministe uruguayenne Lilian Celiberti. « Un autre monde est possible » reste le slogan de cette réunion d’activistes qui réclament un monde plus équitable, respectueux de l’environnement et pacifique. Il se veut le contrepoint du Forum économique mondial de Davos, réunion du gotha politique et économique dans la station de ski chic des Alpes suisses.
Les fondateurs du FSM estiment que leurs idées ont progressé, en voulant pour preuve l’intervention massive des Etats pour contrer la crise ou la mobilisation pour l’environnement. Mais, en dix ans, le mouvement s’est aussi usé et il s’interroge sur son efficacité. « Le Forum social mondial a mis au premier plan la nécessité de changer la culture politique et économique dominante. Maintenant, nous devons définir quel monde nous voulons », a dit à l’AFP l’un de ses fondateurs, le Brésilien Candido Grzybowski. « En 2001, nous étions les seuls à dire que la mondialisation n’accouchera pas d’un monde meilleur. (...). Aujourd’hui, nous devons défier de manière plus tranchante la culture encore hégémonique du marché », a souligné l’Italienne Rafaella Bolini.
Un autre fondateur du Forum social, le Français Bernard Cassen, suggère un rapprochement avec les politiques. Selon lui, l’alternative est de « construire des ponts avec les forces politiques et les gouvernements progressistes qui mettent en pratique les mesures imaginées au Forum ». Une stratégie que de nombreux activistes critiquent.