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L’instabilité d’un flanc du volcan en question
Actuellement, le flanc ouest du volcan Cumbre Vieja (vieux sommet) cristallise toutes les craintes et les attentions. En cause, sa probable instabilité. Un serpent de mer qui ne date pas d’hier. Il y a vingt ans déjà, les géologues et géophysiciens Simon Day et Steven N. Ward ont été les auteurs d’un article qui n’a pas manqué de faire couler beaucoup d’encre. Publié dans la revue “Geophysical Research Letters”, l’article avançait que le flanc ouest du volcan Cumbre Vieja à La Palma était instable. Une instabilité à même d’occasionner un glissement de terrain aux conséquences dévastatrices, et notamment un méga-tsunami d’une hauteur jamais vue auparavant.
Comme il n’y a pas de fumée sans feu, les craintes de Simon Day et Steven N. Ward ne sont pas totalement infondées. En partant du principe que l'île de La Palma fait partie de l'archipel des Canaries, une série d'îles, produit de ce que les géologues appellent un point chaud, La Palma fait l’objet d’une surveillance sismique et volcanologique conséquente, en particulier au niveau de la fissure volcanique active de la Cumbre Vieja. Mais la nouvelle éruption suffit-elle à donner plus de poids et de crédit à l’hypothèse d’un effondrement du flanc ouest du volcan ?
Pour Luis González de Vallejo, directeur de l'Instituto Volcanológico de Canarias (INVOLVCAN), «cette hypothèse a été contestée et écartée par de nombreux chercheurs” et de préciser : “Pour que le flanc du Cumbre Vieja arrive à réunir des conditions proches de l'instabilité, il faudrait simultanément un tremblement de terre de magnitude exceptionnellement élevée et une éruption volcanique explosive de grande ampleur. La probabilité d'une éruption avec un taux d'explosivité élevé et à la fois d'un grand tremblement de terre est extrêmement faible, selon le registre géologique de ce type d'événements sur l'île”. Autrement dit, il y a vraiment peu de chances qu’un tel scénario catastrophe voie le jour.
Un méga-tsunami peu probable
Quand bien même un tel cauchemar devenait réalité, le Maroc ne serait pas particulièrement touché. Le Dr. Simon Day, du Benfield Greig Hazard Research Centre de l'UCL, affirmait lui aussi que le flanc ouest du volcan Cumbre est instable et qu'un glissement pouvait se produire. Selon un modèle suisse, ce glissement de terrain créerait un méga-tsunami dont l'amplitude initiale serait de 650 mètres et se déplacerait à une vitesse de 720 km/h. En dépit de l’atténuation due à la distance, un tel mur d’eau pourrait créer des dégâts jusqu'à 20 km à l'intérieur des terres aux USA. Soit à l'opposé des rives marocaines.
Nacer Jabour, chef de division à l'Institut national de géophysique, ne croit pas non plus au méga-tsunami. Il expliquait récemment qu’en comparaison aux autres scénarios connus dans l’histoire récente des raz-de-marée, ce scénario est peu probable, contrairement à celui d’un tsunami qui serait déclenché à partir d’une source entre le Portugal et le Maroc. “Une zone du domaine Atlantique où sont enregistrés quotidiennement des tremblements de terre à partir d’une faille qui a été à l’origine, par le passé, de grands séismes ayant déclenché par la suite des tsunamis, dont le fameux séisme de Lisbonne au 18ème siècle”, a-t-il ajouté. Ce séisme avait malheureusement causé des dégâts monstrueux sur toute la côte Atlantique Nord du Maroc.
En somme, l’hypothèse d’un méga-tsunami, conséquence de l’effondrement du flanc ouest du volcan Cumbre Vieja, est hautement improbable, d’autant que l’océan atlantique n’est pas un habitué des tsunamis (voir encadré). Cela dit, elle n’est pas totalement chimérique. Il y a un risque très faible certes, mais réel. En tout cas, outre la fumée du volcan qui pourrait atteindre le Maroc, les scientifiques nationaux sont plus inquiétés par la faille sismique située entre le Portugal et le Maroc.
Car si la catastrophe naturelle du 18ème siècle venait à se reproduire, ce serait encore plus dramatique. “A l’époque, les côtes Nord n’étaient pas aussi peuplées. Il n’y avait pas d’agglomérations, d’installations industrielles et encore moins d’infrastructures. Du coup, le Maroc, qui était un pays à tendance continentale par le passé, est devenu un pays à tendance océanique. Résultat, il est plus exposé que par le passé”, conclut Nacer Jabour, chef de division à l'Institut national de géophysique.
Un méga tsunami
Mais a contrario, le système de modélisation suisse souffre de certains manquements. En cause la similitude du modèle réduit qui ne peut être respecté que dans le cas de certains phénomènes, hors tsunami. Par ailleurs, il semblerait que les codes de calcul de l’effet du glissement ne soient pas totalement exacts. Et pour finir, il est à noter que sur les 157 tsunamis des 20 dernières années du vingtième siècle, 138 se sont produits dans le Pacifique, 2 dans l'océan Indien, 9 en Méditerranée, 5 dans les Caraïbes, 1 dans le golfe d'Aqaba, 1 en mer de Chine du Sud, 1 en mer de Marmara. L'Atlantique n'est pas des plus frappés. En clair, l’Atlantique et les tsunamis ne vont pas souvent de pair.