Entretien avec Aboulkacem Chebri, directeur du Centre d’études et de recherches sur le patrimoine maroco-lusitanien

“En tant que mémoire nationale, le site de Mazagan-El Jadida mérite plus d’attention”


Propos recueillis par Mouhib Bouchra (stagiaire)
Jeudi 18 Juillet 2013

Entretien avec Aboulkacem Chebri, directeur du Centre d’études et de recherches sur le patrimoine maroco-lusitanien
Archéologue, conservateur principal des monuments historiques et sites
archéologiques, Aboulkacem Chebri est aussi membre
du Comité du patrimoine mondial d’origine
portugaise (WHPO)
à Coïmbra. Le Directeur
du Centre d’études et de
recherches sur le patrimoine maroco-lusitanien (CERPML) répond
à nos questions en marge
de l’exposition « Patrimoine mondial du Maroc » qui se tient du 9 au 31 juillet
à El Jadida.


Libé : Voulez-vous nous présenter l’exposition «Patrimoine mondial au Maroc» ?

Aboulkacem Chebri: L’exposition «Patrimoine mondial au Maroc», initiée par le Centre d’études et de recherches sur le patrimoine maroco-lusitanien, présente toutes les villes et sites du Maroc inscrits sur la liste du patrimoine mondial. A savoir : Fès, Marrakech, Ksar Aït Benhaddou (Ouarzazat), Meknès, Volubilis, Tétouan, Essaouira, El Jadida et Rabat.
A ce patrimoine matériel, nous avons associé dans l’exposition les éléments du patrimoine mondial immatériel tels la Place Jamaa Lefna, Moussem de Tan Tan, la Diète Méditerranéenne (4 pays) représentée par Chefchaouen, Moussem des cerises de Sefrou et la fauconnerie qui fut représentée par les Kouassem d’Ouled Frej de Doukkala avec onze pays.
Par cette exposition, nous avons voulu associer toutes les composantes marocaines du patrimoine mondial matériel et immatériel à la célébration du 9ème anniversaire de l’inscription de Mazagan/El Jadida sur la liste du patrimoine mondial. C’est pourquoi nous avons aussi invité  dernièrement les gestionnaires des villes marocaines classées patrimoine mondial au colloque sur «Le patrimoine mondial au Maroc : Gestion et solutions».

Pourquoi cette exposition en ce moment ?

L’exposition «Patrimoine mondial au Maroc», inaugurée auparavant (27 juin) par le gouverneur de la province d’El Jadida, est organisée cette année avec la Fondation Abdelouahed El Kadiri jusqu’au 31 juillet, à l’occasion du 9ème anniversaire de l’inscription de Mazagan/El-Jadida sur la liste du patrimoine mondial. Un événement, célébré le 30 juin de chaque année.  Pour rappel, notre ville fut inscrite sur cette liste le 30 juin 2004 à Suzhou en Chine.

Quel est l’objectif de cette exposition ?

Notre objectif est de pousser les responsables, intellectuels et associations à reposer sans cesse la question du patrimoine mondial et ce qu’il faut faire pour honorer les engagements du Maroc vis-à-vis de la communauté internationale. Principalement l’élaboration du Plan de gestion exigé pour tout site du patrimoine mondial et qui, hélas, nous fait défaut au Maroc, sauf pour Aït Benhaddou et Rabat. Aussi, nous voulons offrir au public l’occasion de découvrir les éléments de son pays qui ont reçu le titre de patrimoine mondial, matériel ou immatériel.
Nous espérons aussi appuyer notre proposition formulée à l’Unesco pour adopter une «Journée mondiale du patrimoine universel». Nous voulons également inciter toutes les villes marocaines inscrites en tant que patrimoine mondial de fêter la date de leurs inscriptions respectives, dans le but de créer un lobbying, pour le bien de notre patrimoine mondial.

Est-ce la première fois, cette célébration?

Depuis 2008, le CERPML célèbre l’inscription de Mazagan sur la liste du patrimoine mondial, sauf en 2011 car le pays était occupé par le vote de la nouvelle Constitution. Même avec certaines difficultés, le CERPML fait de son mieux pour rappeler à tout le monde que ce site classé patrimoine mondial nécessite un intérêt sérieux en tant que mémoire nationale d’abord et que l’Etat a des engagements à l’égard de l’Unesco qu’il faut honorer avant que cette organisation ne nous fasse des remarques ou des reproches. Il faut dire que le fait de fêter cet anniversaire donne chaque année de bons résultats, rien qu’en mesurant l’impact de sensibilisation sur le large public. Cette année, nous avons été parrainés par les autorités locales, nous avons reçu l’aval et l’appui du ministère de la Culture et nous avons été vivement félicités par les instances de l’Unesco, pour ne citer que ceux-là. La société civile était aussi de la partie, à l’image de l’Association de la cité portugaise et la Fondation Abdelouahed El Kadiri qui abrite l’exposition et les activités parallèles. La presse nationale nous a bien épaulés et continue encore de rapporter au public la consistance de notre action à dimension universelle.

Quels sont les programmes parallèles à l’exposition ?

Du fait que cette action s’inscrit dans la démarche de sensibilisation, le CERPML et la Bibliothèque de la Fondation El Kadiri, ont voulu associer le maximum des composantes de la société. Ainsi, en plus du large public, jeune et adulte, qui est appelé à visiter l’exposition du patrimoine mondial, du jour comme après le ftour et tarawih, nous avons également ciblé les intellectuels et les associations en programmant une conférence sur les Conventions du patrimoine mondial de 1972 et de 2003 (à présenter par Aboulkacem Chebri), la présentation du livre «Mémoire des Doukkala» d’Ahmed Dourrachad, une soirée poétique avec notamment le grand poète de la ville Saïd Ettachfini et autres poètes et zejjalines.

Quelles sont vos prévisions concernant la visite de l’exposition ?

Il faut dire que le mois sacré de Ramadan, au lieu d’être un handicap comme certains le croient à tort, est au contraire très encourageant pour ce genre d’activités. Les gens cherchent à s’épanouir au niveau, à la fois, intellectuel et sportif. Il donne donc l’avantage à notre exposition d’être visitée par ceux et celles qui ont besoin de «meubler» leur journée avant le Ftour, pour se cultiver ou juste comme passe-temps, ainsi que par ceux et celles qui aiment les sorties nocturnes. A ne pas oublier que l’exposition suscite l’engouement des étudiants et chercheurs qui fréquentent massivement la Bibliothèque El Kadiri. Selon nos estimations, l’exposition pourra passer le cap de mille visiteurs, ce qui sera une grande réussite.

Entretien avec Aboulkacem Chebri, directeur du Centre d’études et de recherches sur le patrimoine maroco-lusitanien


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