De jeunes Irakiens ravivent la flamme de la musique traditionnelle


AFP
Samedi 20 Avril 2013

De jeunes Irakiens ravivent la  flamme de la musique traditionnelle
Hussein cale son oud, le plus emblématique des instruments irakiens, contre ses côtes. Il effleure les cordes de son luth et souffle, résigné: “Les Irakiens n’ont cure de leur patrimoine musical. A la télé, il n’y en a que pour les chanteurs sans voix”.
Hussein Abdallah, 25 ans, a la passion du oud, quand les jeunes de son âge préfèrent les boîtes à rythme et les chanteuses à la voix trafiquée à la musique traditionnelle irakienne, sur le déclin.
Il suffit de passer dans Jadriyah, un quartier du centre de Bagdad plein à craquer le jeudi soir, pour s’en convaincre. Des restaurants s’échappent plus souvent les mélodies sirupeuses du chanteur égyptien Amr Diab que le oud irakien.
Pourtant ils sont de plus en plus nombreux à étudier, comme Hussein, les instruments traditionnels à l’Institut d’études musicales de Bagdad, temple de l’orthodoxie musicale irakienne et écurie de jeunes talents. C’est dans son bureau que le directeur de l’institut, Sattar Naji, reçoit les candidats qui souhaitent, un jour, percer dans la musique traditionnelle irakienne.
“Nous nous portons mieux”, assure M. Naji à l’AFP. Après l’invasion de l’Irak en 2003, “nous n’avions plus que 30 étudiants, aujourd’hui nous en comptons plus de 150”, s’enthousiasme-t-il.
Mohammed Ali Mohammed, 18 ans, le cheveu gominé, s’avance. M. Naji, assisté de trois professeurs, lui demande de reproduire un rythme en frappant dans ses mains, puis de fredonner un air. Un peu maladroitement, Mohammed s’exécute. A l’issue de l’examen d’une dizaine de minutes, M. Naji consulte ses confrères. “Pas mal”, lance-t-il. “On va le prendre, il va s’améliorer avec le temps.”
Mais Mohammed n’a pas la vocation d’Hussein. “En fait, j’aurais préféré intégrer +Iraq Star+ (l’équivalent de la Nouvelle Star), mais je devais aller à l’école et j’ai pas pu y aller”, confie Mohammed après son examen. Pendant quatre ans le jeune homme devra bûcher le oud, le chant, mais aussi le qanûn (la cithare arabe) et le violon. Au bout du compte, Mohammed n’est pas sûr de trouver son public.
“Malheureusement, nous, les Irakiens, avons perdu nos traditions”, se lamente Moustapha Zaïr, professeur de oud, et lui-même concertiste de renom.
A partir de 2006, l’Irak a sombré dans une redoutable guerre interconfessionnelle dans laquelle la musique, même dans sa forme traditionnelle, était, au mieux, le cadet des soucis des insurgés, et au pire, un ennemi pour les islamistes.
“En 2005-2007, à l’époque où j’étudiais à l’Institut d’études musicales”, se remémore Mourad, flûtiste dans un orchestre de musique traditionnelle, “j’avais peur de porter mes instruments dans la rue. Je craignais même de dire à mes voisins que j’étudiais la musique”.
Depuis, l’Irak s’est stabilisé et les violences, bien que toujours présentes, ont largement baissé. Mais, faute de moyens et d’amateurs, le maqâm, la langoureuse musique des débuts de l’Irak moderne, ne séduit plus guère que les oreilles expertes et meurt de sa belle mort. D’autres veulent éviter que le très sage oud connaisse le même sort.
Le gouvernement irakien reconnaît qu’il a “d’autres priorités que d’encourager la musique”, comme le constate, avec regret, Hassan Chakarji, directeur des Affaires musicales au ministère de la Culture, lors d’un entretien accordé à l’AFP.
“Mais on ne peut pas combattre la violence uniquement par les armes. La culture est la base de tout. La musique, la littérature, la poésie ont aussi une grande influence”, assure-t-il.
Il est surtout difficile de lutter contre les tubes pop qui envahissent les écrans irakiens. Sattar Naji, le directeur de l’Institut d’études musicales, le voit d’ailleurs tous les jours. “Les chaînes satellitaires détruisent notre patrimoine. Elles passent de la musique frivole avec des filles nues. Les chansons ne parlent qu’aux instincts les plus bas, elles n’évoquent pas la passion”, tonne M. Naji.


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1.Posté par chanteur le 21/04/2013 00:32
J'adore la musique irakienne...

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