-
Les Mexicains encouragés à déposer leurs armes dans des églises
-
En Ile-de-France, des biodéchets de restaurants transformés en compost pour les agriculteurs
-
Dans les rues d'Addis Abeba, les Lada disparaissent peu à peu
-
Le gouvernement espagnol veut interdire les boissons sucrées dans les cantines
-
La Lune prend un petit coup de vieux
Au milieu des lignes de production qui débitent des pièces métalliques, la jeune femme parle d'un ton enjoué, en anglais, à ses abonnés étrangers - et potentiels clients.
Elle fait partie de ces enfants de patrons d'usine en Chine qui tentent, via internet, de soutenir l'entreprise face à la hausse des coûts et aux tensions géopolitiques.
Robyn dit avoir grandi avec "le bruit des machines tournant jour et nuit". Mais travailler dans ce secteur n'a pas toujours été son premier choix.
Enfant, ses parents l'encourageaient à viser un emploi de bureau, loin du vacarme de l'usine située à Nantong (est de la Chine).
"Quand ils ont monté l'usine, leur objectif (...) c'était que je puisse avoir une bonne éducation" et ne plus être obligée de vivre à la campagne, souligne-t-elle.
Le plan a fonctionné: diplômée de la prestigieuse université américaine Yale, elle a travaillé quelques années dans une entreprise d'expertise-conseil.
Mais Robyn dit désormais vouloir "rendre au secteur manufacturier" ce qu'il lui "a donné".
Elle a créé une entreprise de marketing qui connecte directement des usines chinoises avec un public étranger, via des vidéos sur Instagram et TikTok - des plateformes bloquées en Chine mais accessibles avec un réseau privé virtuel (VPN) que nombre de Chinois utilisent.
Une manière de promouvoir ses produits qui contraste avec celle de la génération de ses parents, qui devaient passer par de multiples intermédiaires - ce qui grignotait leurs marges.
Dans ses vidéos, Robyn présente la Chine comme une destination manufacturière idéale. On la voit ainsi devant des chaînes de montage, à expliquer la situation du pays en la matière, mais aussi dans les rues de Shanghai, à vanter la cuisine locale.
Ses parents ont fondé l'entreprise dans les années 1990, surfant sur la vague d'entrepreneuriat qui soufflait sur la Chine avec les grandes réformes économiques, lancées une décennie plus tôt.
La Chine devenait alors l'usine du monde.
Mais la hausse des salaires et les tensions avec les Etats-Unis ont rendu d'autres pays comme le Cambodge ou le Bangladesh de plus en plus attrayants pour les clients internationaux.
Sans compter la faiblesse de la consommation ces dernières années.
Résultat: la famille Qiu a perdu des contrats.
Mais elle s'est adaptée, en investissant dans des machines plus modernes ou en fabriquant ses propres produits, au lieu de simplement produire des pièces pour des clients.
Tout comme Robyn Qiu, une autre influenceuse, Rose Law, fille d'un propriétaire d'usine de cosmétiques dans la province du Guangdong (sud), espère via son activité avoir une influence "positive sur le secteur".
Responsable du développement des produits pour l'entreprise familiale, elle a également lancé sa propre marque de shampoings.
"Du temps de mes parents", avec l'ouverture économique, "tous les secteurs étaient nouveaux, tout le monde était sur la même ligne de départ et se faisait concurrence", déclare-t-elle à l'AFP.
Beaucoup étaient de simples sous-traitants et devaient batailler. Mais aujourd'hui, avoir sa propre marque est gage de revenus plus stables, souligne-t-elle.
"Le fait d'être vu" sur les réseaux sociaux est ainsi "très important", précise-t-elle.
Selon Robyn Qiu, plus de 500 acheteurs l'ont ainsi contactée depuis mai et elle compte 150.000 abonnés sur Instagram.
Ces femmes sont ce qu'on appelle en Chine les "changerdai" ("enfants de patrons d'usines"), une expression construite en écho à une autre, très populaire: les "fuerdai" ("enfants de riches").
Nombre de contenus produits par cette jeune génération sont devenus viraux.
Sur Instagram, l'entreprise LC Sign, de Canton (sud), qui produit des panneaux lumineux, a attiré un demi-million d'abonnés avec des vidéos où un jeune homme réalise des imitations de Donald Trump.
Sur les réseaux sociaux chinois, un court-métrage intitulé "L'empire de la serviette", réalisé par un "changerdai" d'une usine de serviettes, cumule des milliards de vues.
Aujourd'hui, "si vous voulez attirer l'attention des gens, vous devez investir dans ces vidéos courtes", résume Robyn Qiu.