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Du discours de Bloomberg 2013
jusqu’au sommet européen du
19-20 octobre 2017 à Bruxelles,
qu’est-ce qui a changé pour
préparer la sortie effective
du Royaume-Uni en mars 2019
et quelles sont les conséquences
économiques ?
“British First’’, l’Europe est à la carte et pas un menu imposé pour les Britanniques. Un divorce après 44 ans de mariage pour des raisons économiques et historiques. Les prémices d’un conflit même identitaire remontent à l’après Seconde Guerre mondiale où Churchill a confirmé ad litteram lors du discours de 1946 à Zurich : ‘’L’Angleterre a donc son propre rêve, sa propre mission: elle sympathise avec l’Europe. Mais ce n’est pas pour autant une raison pour se laisser intégrer et absorber’’.
La «mère des Parlements» veut sortir de la suprématie des instances européennes et désire reprendre sa souveraineté. Après une forte british velléité, le fameux discours Bloomberg de David Cameron en 2013 a tranché pour un référendum et a fixé les projecteurs sur un des mots les plus recherchés sur Google en 2013 «Brexit» qui est la contraction de 2 mots British «Bretagne» et Exit qui met le doigt sur l’hypothèse d’une éventuelle sortie.
Les urnes ont répondu favorablement au repli sur soi du Royaume-Uni avec une majorité de 60% en Ecosse et 55,8% en Irlande du Nord. La répartition géographique du scrutin en Angleterre qui a également voté pour avec 53,4% du total des voix a dénoté que le oui était majoritaire au Nord, et que le Sud, prospère grâce à sa proximité des autres pays avait du mal à accepter la sortie du Royaume-Uni. Au niveau des sondages, le clivage générationnel était flagrant en particulier, les jeunes ont majoritairement voté contre le Brexit mais ceux qui ont plus de 50 ans ont voté pour le retrait lors du référendum du 23 juin 2016.
Le discours de Bloomberg engendré a fortiori suite à plusieurs facteurs notamment :
Différence d’optique : l’interprétation juridique anglaise est basée sur la Common law «Droit commun» ; développé sur la base de la magna carta où il faut analyser ce qui est écrit mot par mot. La majorité des pays de l’UE ont un système juridique codifié basé sur la bonne foi et l’intention. L’optique européenne d’interprétation mise sur les intentions des parties. Par contre, toute directive de l’UE serait interprétée mot par mot en common law.
Facteur politique : La pression politique interne du propre parti de Cameron ‘’Conservateurs’’, et la montée du parti ‘’UK Independence Party’’ parti anti-immigration, favorable à un retrait du Royaume-Uni de l’UE et qui est membre du mouvement TEAM (Alliance européenne des mouvements critiques envers l’Union européenne).
Facteur identitaire et historique : La Grande-Bretagne qui se voyait à côté de la France comme étant vainqueur de la Seconde Guerre mondiale, est sortie sans crise économique et a maintenu son indépendance et garder ses colonies. Pourquoi les Anglais doivent-ils dépendre de l’Europe et de ses politiques ? Ils se plaignent de la lourdeur bureaucratique européenne et la tradition anglo-saxonne n’est pas pro-continentale.
Facteur d’immigration : Plus de 50% de l’immigration nette en Grande-Bretagne provient de l’Union européenne (Pologne, Roumanie), et ce facteur influence l’accès à l’emploi pour les citoyens britanniques ; par la suite on trouve une forte concentration des immigrés en matière d’accès aux services publics locaux.
Facteur juridique : Un arsenal juridique dépendant de l’UE à travers ses instances, à savoir le Parlement européen la Cour de justice européenne, la Cour européenne des droits de l’Homme, dicte plus de 70% des textes et loi applicables primant sur la souveraineté et l’indépendance des tribunaux anglais.
Facteur du commerce international: Le commerce international du Royaume-Uni pourrait prospérer en cas d’une éventuelle sortie en signant des accords avec plusieurs pays et des organisations tel le commonwealth.
Que prévoit l’UE en cas de sortie d’un pays membre ?
L’article 50 du Traité de Lisbonne en 2010 stipule : «Tout Etat membre peut décider conformément à ses règles constitutionnelles de se retirer de l’Union». C’est la première fois que cet article sera mis en application. Ledit article, regroupant 5 paragraphes, ne renseigne pas explicitement sur la démarche exhaustive et détaillée du retrait.
Décryptage du Sommet des 27 : Un calendrier chargé avec 13 sommets en 2 ans pour préparer la sortie du Royaume-Uni en mars 2019.
Le Sommet européen tenu les 19 et 20 octobre à Bruxelles et qui a rassemblé les 28 chefs d’Etat et de gouvernement, s’est focalisé sur le dossier «Brexit», la crise de la Catalogne et l’Espagne n’a pas été officiellement évoquée dans les couloirs ; le statu quo ne permet pas à l’UE d’intervenir à l’instant en dépit d’un signal fort pour un soutien absolu à la position de Madrid.
Theresa May, soucieuse de l’avenir des Européens résidant sur le territoire britannique, a adressé une lettre en faveur de ses derniers, à quelques heures de l’ouverture du Conseil européen pour cadrer les conditions de leur résidence permanente d’une manière soft.
Juste après la tenue du Sommet européen, Theresa May a adressé un discours pour cadrer le statu quo et transmettre via les canaux médiatiques l’output de ce Conseil européen, en défendant sa position de sortie ; les perspectives restent optimistes en dépit du long chemin à parcourir, et l’avenir de l’Europe est lié à celui de la Grande-Bretagne, car les visions et les orientations sont communes dans divers domaines, tels que la défense, la sécurité, la politique étrangère vis-à-vis de la Corée du Nord et l’Iran. L’UE et la Grande-Bretagne font face également aux mêmes risques : l’immigration et le terrorisme.
Elle a exprimé son souhait de faire du Royaume-Uni un partenaire spécial jouissant d’un statut privilégié auprès de l’UE après le Brexit, en axant ce partenariat sur la démocratie, le droit, la concurrence loyale et le libre-échange, le consumérisme et l’absence de barrières physiques ainsi que la protection des droits des ressortissants dans les deux territoires.
Le jury des 27 du Conseil européen a qualifié le travail des Anglais sur le dossier de stérile. Il a mis en relief l’absence de “progrès suffisants” dans les négociations sur le sujet tout en soulignant l’absence de lucidité sur trois axes : le droit des citoyens expatriés, l’Irlande et sa frontière et le règlement financier.
Le Conseil européen veut solder les comptes puis préparer un scénario pour un nouveau mariage après divorce, en évitant un retrait sans conditions, et assure que le fait de boucler les modalités du divorce est une affaire de calendrier, et qu’il faut y aller lentement mais sûrement.
Theresa May avait souligné lors de son discours du 22 septembre à Florence qu’elle était prête pour un retrait soft en mobilisant un chèque de 20 milliards d’euros pour honorer les engagements britanniques alors que la facture réelle a frôlé 25,70 milliards d’euros selon la Commission européenne. La seconde proposition est de garantir un délai de deux ans comme période de transition après le départ du Royaume-Uni.
Pourquoi ne pas avancer le shmilblick ?
La crainte de l’effet domino : La famille européenne est supposée être soudée et solidaire. Un retrait d’un pays tout en se montrant laxiste à son égard pourrait propager la fuite de plusieurs pays après.
Nature des relations commerciales post-Brexit : comment l’UE pourra procéder dans ses échanges avec la Grande-Bretagne?
L’amende de la sortie : les Britanniques veulent négocier la facture en jouant sur les possibles accords commerciaux après un nouveau mariage avec l’UE mais les Européens veulent rendre à César ce qui appartient à César : les Britanniques doivent payer d’abord, puis négocier après, les éventuels accords post-Brexit.
Statut des 3 millions d’Européens installés en Grande-Bretagne et 2 millions de Britanniques résidant en Europe.
La nature des libertés de circulation que les deux territoires autoriseront : L’Europe mise sur trois types de libertés, notamment celle de la circulation des (capitaux, personnes et marchandises) alors que Londres cherche à en exclure celle des personnes.
Conséquences économiques :
A priori et en théorie, on peut prévoir d’une manière simple que tout pays qui sort du marché unique, de l’union douanière, verra ses produits devenir un peu plus chers et ipso facto manquera de compétitivité vu que ses articles seront majorés des droits de douane. 50% des exportations britanniques vont vers l’Europe sans quotas ou droits de douane ; en cas de Brexit, le Royaume-Uni se privera du marché unique.
En finance : La place financière de Londres serait concernée par le Brexit, les banques se replieront certainement sur Paris ou Francfort.
Baisse du PIB de 0.3% à 0,6% pour l’UE et 3% pour l’Irlande.
Les cotisations aux budgets européens se répartiront sur d’autres pays de l’Union avec 2 milliards d’euros pour la France et 2,5 milliards pour l’Allemagne.
La dépréciation de la livre sterling entre 11% et 12% accompagnée d’une légère hausse de 0,5% à 1% des prix des produits, et la Bourse de Londres était sous le choc. Une chute du taux de change engendre de facto l’inflation.
Selon les prévisions, l’incertitude qui entoure le Brexit aura pour conséquence la baisse de la croissance économique du Royaume-Uni de 1% à 1,5%.
Statu quo économique du Royaume-Uni : les économistes se sont-ils vraiment trompés?
Les investissements des entreprises se sont beaucoup affaiblis, le prix de l’immobilier a chuté suite à une faible demande de logement.
Le gouvernement a essayé de réduire les effets du choc en prêtant aux banques, en réduisant le taux d’intérêt pour éviter un crash financier. La Banque d’Angleterre était sûre que le Crash allait faire chuter l’économie pour un bon moment ; elle a pris par conséquent des mesures préventives en août 2016. A titre d’exemple, elle a baissé le taux d’intérêt et le gouvernement a relâché l’austérité.
Les Britanniques, ayant vu que la livre sterling allait se déprécier par rapport à l’euro, ont rationnellement compris que les prix des produits importés allaient monter. Ils ont anticipé ce fait par un approvisionnement colossal en produits, en particulier de première nécessité et industriels, ce qui a engendré une augmentation des crédits de consommation.
Le chômage, quant à lui, a baissé à 4,8% en 2016 atteignant son plus bas niveau depuis 2005. La Bourse de Londres en 2017 gagnait du terrain par rapport aux autres Bourses européennes et ignorait le Brexit avec des records historiques. L’Indictefootsie 100 et 250 résistent jusqu’ à présent à la crise, grâce aux mesures de soutien préventives de la Banque d’Angleterre.
Dans tous les cas, une chose est sûre, l’économie du Royaume-Uni ne se portera bien que sur le court terme sauf que l’histoire et la tradition nous ont appris que ce pays, a toujours réussi à s’en sortir des crises ; l’économie anglaise est polyvalente et vigilante et réagit activement aux chocs économiques et financiers.
Ce que vit le Royaume-Uni avec l’Union européenne m’a toujours intrigué et je me rappelle un propos prêté à Aristote : « Platon m’est cher, mais la vérité me l’est encore davantage ».
Il est évident que la Grande-Bretagne a tissé de bonnes relations économiques et diplomatiques avec les pays membres de l’UE ; il est vrai qu’elle perdra des points suite à sa sortie, mais les perspectives s’annoncent mal aussi pour l’UE. Les pays membres perdent leur souveraineté mais aussi leur indépendance en termes de paradigmes, instances, et leur autonomie d’agir sur leurs caisses. En outre, un scénario pessimiste sera envisagé dans 15 ou 20 ans dans le Top ten des puissances mondiales ; aucun pays appartenant à l’UE n’y figurera suite à l’émergence de plusieurs pays : la Chine, l’Inde, Singapour, entre autres. Le Royaume-Uni a préféré être objectif, rationnel et honnête ; son avenir et l’épanouissement de ses citoyens se trouvent loin du périmètre de l’UE.
Est-ce qu’il y aura un nouveau mariage via une nouvelle demande d’adhésion formulée dans quelques années par la jeunesse britannique qui, d’après un échantillonnage, était majoritairement contre le Brexit ?
Probablement oui.
* Cadre au MEF, DGI
Lauréat de l’ENCG Casablanca
Analyste financier et économique
jusqu’au sommet européen du
19-20 octobre 2017 à Bruxelles,
qu’est-ce qui a changé pour
préparer la sortie effective
du Royaume-Uni en mars 2019
et quelles sont les conséquences
économiques ?
“British First’’, l’Europe est à la carte et pas un menu imposé pour les Britanniques. Un divorce après 44 ans de mariage pour des raisons économiques et historiques. Les prémices d’un conflit même identitaire remontent à l’après Seconde Guerre mondiale où Churchill a confirmé ad litteram lors du discours de 1946 à Zurich : ‘’L’Angleterre a donc son propre rêve, sa propre mission: elle sympathise avec l’Europe. Mais ce n’est pas pour autant une raison pour se laisser intégrer et absorber’’.
La «mère des Parlements» veut sortir de la suprématie des instances européennes et désire reprendre sa souveraineté. Après une forte british velléité, le fameux discours Bloomberg de David Cameron en 2013 a tranché pour un référendum et a fixé les projecteurs sur un des mots les plus recherchés sur Google en 2013 «Brexit» qui est la contraction de 2 mots British «Bretagne» et Exit qui met le doigt sur l’hypothèse d’une éventuelle sortie.
Les urnes ont répondu favorablement au repli sur soi du Royaume-Uni avec une majorité de 60% en Ecosse et 55,8% en Irlande du Nord. La répartition géographique du scrutin en Angleterre qui a également voté pour avec 53,4% du total des voix a dénoté que le oui était majoritaire au Nord, et que le Sud, prospère grâce à sa proximité des autres pays avait du mal à accepter la sortie du Royaume-Uni. Au niveau des sondages, le clivage générationnel était flagrant en particulier, les jeunes ont majoritairement voté contre le Brexit mais ceux qui ont plus de 50 ans ont voté pour le retrait lors du référendum du 23 juin 2016.
Le discours de Bloomberg engendré a fortiori suite à plusieurs facteurs notamment :
Différence d’optique : l’interprétation juridique anglaise est basée sur la Common law «Droit commun» ; développé sur la base de la magna carta où il faut analyser ce qui est écrit mot par mot. La majorité des pays de l’UE ont un système juridique codifié basé sur la bonne foi et l’intention. L’optique européenne d’interprétation mise sur les intentions des parties. Par contre, toute directive de l’UE serait interprétée mot par mot en common law.
Facteur politique : La pression politique interne du propre parti de Cameron ‘’Conservateurs’’, et la montée du parti ‘’UK Independence Party’’ parti anti-immigration, favorable à un retrait du Royaume-Uni de l’UE et qui est membre du mouvement TEAM (Alliance européenne des mouvements critiques envers l’Union européenne).
Facteur identitaire et historique : La Grande-Bretagne qui se voyait à côté de la France comme étant vainqueur de la Seconde Guerre mondiale, est sortie sans crise économique et a maintenu son indépendance et garder ses colonies. Pourquoi les Anglais doivent-ils dépendre de l’Europe et de ses politiques ? Ils se plaignent de la lourdeur bureaucratique européenne et la tradition anglo-saxonne n’est pas pro-continentale.
Facteur d’immigration : Plus de 50% de l’immigration nette en Grande-Bretagne provient de l’Union européenne (Pologne, Roumanie), et ce facteur influence l’accès à l’emploi pour les citoyens britanniques ; par la suite on trouve une forte concentration des immigrés en matière d’accès aux services publics locaux.
Facteur juridique : Un arsenal juridique dépendant de l’UE à travers ses instances, à savoir le Parlement européen la Cour de justice européenne, la Cour européenne des droits de l’Homme, dicte plus de 70% des textes et loi applicables primant sur la souveraineté et l’indépendance des tribunaux anglais.
Facteur du commerce international: Le commerce international du Royaume-Uni pourrait prospérer en cas d’une éventuelle sortie en signant des accords avec plusieurs pays et des organisations tel le commonwealth.
Que prévoit l’UE en cas de sortie d’un pays membre ?
L’article 50 du Traité de Lisbonne en 2010 stipule : «Tout Etat membre peut décider conformément à ses règles constitutionnelles de se retirer de l’Union». C’est la première fois que cet article sera mis en application. Ledit article, regroupant 5 paragraphes, ne renseigne pas explicitement sur la démarche exhaustive et détaillée du retrait.
Décryptage du Sommet des 27 : Un calendrier chargé avec 13 sommets en 2 ans pour préparer la sortie du Royaume-Uni en mars 2019.
Le Sommet européen tenu les 19 et 20 octobre à Bruxelles et qui a rassemblé les 28 chefs d’Etat et de gouvernement, s’est focalisé sur le dossier «Brexit», la crise de la Catalogne et l’Espagne n’a pas été officiellement évoquée dans les couloirs ; le statu quo ne permet pas à l’UE d’intervenir à l’instant en dépit d’un signal fort pour un soutien absolu à la position de Madrid.
Theresa May, soucieuse de l’avenir des Européens résidant sur le territoire britannique, a adressé une lettre en faveur de ses derniers, à quelques heures de l’ouverture du Conseil européen pour cadrer les conditions de leur résidence permanente d’une manière soft.
Juste après la tenue du Sommet européen, Theresa May a adressé un discours pour cadrer le statu quo et transmettre via les canaux médiatiques l’output de ce Conseil européen, en défendant sa position de sortie ; les perspectives restent optimistes en dépit du long chemin à parcourir, et l’avenir de l’Europe est lié à celui de la Grande-Bretagne, car les visions et les orientations sont communes dans divers domaines, tels que la défense, la sécurité, la politique étrangère vis-à-vis de la Corée du Nord et l’Iran. L’UE et la Grande-Bretagne font face également aux mêmes risques : l’immigration et le terrorisme.
Elle a exprimé son souhait de faire du Royaume-Uni un partenaire spécial jouissant d’un statut privilégié auprès de l’UE après le Brexit, en axant ce partenariat sur la démocratie, le droit, la concurrence loyale et le libre-échange, le consumérisme et l’absence de barrières physiques ainsi que la protection des droits des ressortissants dans les deux territoires.
Le jury des 27 du Conseil européen a qualifié le travail des Anglais sur le dossier de stérile. Il a mis en relief l’absence de “progrès suffisants” dans les négociations sur le sujet tout en soulignant l’absence de lucidité sur trois axes : le droit des citoyens expatriés, l’Irlande et sa frontière et le règlement financier.
Le Conseil européen veut solder les comptes puis préparer un scénario pour un nouveau mariage après divorce, en évitant un retrait sans conditions, et assure que le fait de boucler les modalités du divorce est une affaire de calendrier, et qu’il faut y aller lentement mais sûrement.
Theresa May avait souligné lors de son discours du 22 septembre à Florence qu’elle était prête pour un retrait soft en mobilisant un chèque de 20 milliards d’euros pour honorer les engagements britanniques alors que la facture réelle a frôlé 25,70 milliards d’euros selon la Commission européenne. La seconde proposition est de garantir un délai de deux ans comme période de transition après le départ du Royaume-Uni.
Pourquoi ne pas avancer le shmilblick ?
La crainte de l’effet domino : La famille européenne est supposée être soudée et solidaire. Un retrait d’un pays tout en se montrant laxiste à son égard pourrait propager la fuite de plusieurs pays après.
Nature des relations commerciales post-Brexit : comment l’UE pourra procéder dans ses échanges avec la Grande-Bretagne?
L’amende de la sortie : les Britanniques veulent négocier la facture en jouant sur les possibles accords commerciaux après un nouveau mariage avec l’UE mais les Européens veulent rendre à César ce qui appartient à César : les Britanniques doivent payer d’abord, puis négocier après, les éventuels accords post-Brexit.
Statut des 3 millions d’Européens installés en Grande-Bretagne et 2 millions de Britanniques résidant en Europe.
La nature des libertés de circulation que les deux territoires autoriseront : L’Europe mise sur trois types de libertés, notamment celle de la circulation des (capitaux, personnes et marchandises) alors que Londres cherche à en exclure celle des personnes.
Conséquences économiques :
A priori et en théorie, on peut prévoir d’une manière simple que tout pays qui sort du marché unique, de l’union douanière, verra ses produits devenir un peu plus chers et ipso facto manquera de compétitivité vu que ses articles seront majorés des droits de douane. 50% des exportations britanniques vont vers l’Europe sans quotas ou droits de douane ; en cas de Brexit, le Royaume-Uni se privera du marché unique.
En finance : La place financière de Londres serait concernée par le Brexit, les banques se replieront certainement sur Paris ou Francfort.
Baisse du PIB de 0.3% à 0,6% pour l’UE et 3% pour l’Irlande.
Les cotisations aux budgets européens se répartiront sur d’autres pays de l’Union avec 2 milliards d’euros pour la France et 2,5 milliards pour l’Allemagne.
La dépréciation de la livre sterling entre 11% et 12% accompagnée d’une légère hausse de 0,5% à 1% des prix des produits, et la Bourse de Londres était sous le choc. Une chute du taux de change engendre de facto l’inflation.
Selon les prévisions, l’incertitude qui entoure le Brexit aura pour conséquence la baisse de la croissance économique du Royaume-Uni de 1% à 1,5%.
Statu quo économique du Royaume-Uni : les économistes se sont-ils vraiment trompés?
Les investissements des entreprises se sont beaucoup affaiblis, le prix de l’immobilier a chuté suite à une faible demande de logement.
Le gouvernement a essayé de réduire les effets du choc en prêtant aux banques, en réduisant le taux d’intérêt pour éviter un crash financier. La Banque d’Angleterre était sûre que le Crash allait faire chuter l’économie pour un bon moment ; elle a pris par conséquent des mesures préventives en août 2016. A titre d’exemple, elle a baissé le taux d’intérêt et le gouvernement a relâché l’austérité.
Les Britanniques, ayant vu que la livre sterling allait se déprécier par rapport à l’euro, ont rationnellement compris que les prix des produits importés allaient monter. Ils ont anticipé ce fait par un approvisionnement colossal en produits, en particulier de première nécessité et industriels, ce qui a engendré une augmentation des crédits de consommation.
Le chômage, quant à lui, a baissé à 4,8% en 2016 atteignant son plus bas niveau depuis 2005. La Bourse de Londres en 2017 gagnait du terrain par rapport aux autres Bourses européennes et ignorait le Brexit avec des records historiques. L’Indictefootsie 100 et 250 résistent jusqu’ à présent à la crise, grâce aux mesures de soutien préventives de la Banque d’Angleterre.
Dans tous les cas, une chose est sûre, l’économie du Royaume-Uni ne se portera bien que sur le court terme sauf que l’histoire et la tradition nous ont appris que ce pays, a toujours réussi à s’en sortir des crises ; l’économie anglaise est polyvalente et vigilante et réagit activement aux chocs économiques et financiers.
Ce que vit le Royaume-Uni avec l’Union européenne m’a toujours intrigué et je me rappelle un propos prêté à Aristote : « Platon m’est cher, mais la vérité me l’est encore davantage ».
Il est évident que la Grande-Bretagne a tissé de bonnes relations économiques et diplomatiques avec les pays membres de l’UE ; il est vrai qu’elle perdra des points suite à sa sortie, mais les perspectives s’annoncent mal aussi pour l’UE. Les pays membres perdent leur souveraineté mais aussi leur indépendance en termes de paradigmes, instances, et leur autonomie d’agir sur leurs caisses. En outre, un scénario pessimiste sera envisagé dans 15 ou 20 ans dans le Top ten des puissances mondiales ; aucun pays appartenant à l’UE n’y figurera suite à l’émergence de plusieurs pays : la Chine, l’Inde, Singapour, entre autres. Le Royaume-Uni a préféré être objectif, rationnel et honnête ; son avenir et l’épanouissement de ses citoyens se trouvent loin du périmètre de l’UE.
Est-ce qu’il y aura un nouveau mariage via une nouvelle demande d’adhésion formulée dans quelques années par la jeunesse britannique qui, d’après un échantillonnage, était majoritairement contre le Brexit ?
Probablement oui.
* Cadre au MEF, DGI
Lauréat de l’ENCG Casablanca
Analyste financier et économique