Axel Kahn, un scientifique français humaniste et engagé


Personne ne me fera dire ce que je n'ai pas envie de dire, personne ne me fera non plus fermer ma gueule

Libé
Mercredi 7 Juillet 2021

Médecin généticien et essayiste français, Axel Kahn était un scientifique de renom connu du grand public pour ses prises de positions sur des questions allant des tests génétiques au Covid-19, jusqu'à sa propre disparition. Lorsque la pandémie du Covid-19 perturbe les soins, il monte au front pour défendre les malades atteints de cancer, alerte sur les retards de diagnostic, s'insurge contre les complotistes et les "antivax". Sans mâcher ses mots, fidèle à son habitude, y compris quand il s'agit de personnalités politiques. "Personne ne me fera dire ce que je n'ai pas envie de dire, personne ne me fera non plus fermer ma gueule", expliquait-il à l'AFP. "Je suis un homme d'engagement", ajoutait celui qui se définissait comme "plus un homme de gauche" que "de droite". Né le 5 septembre 1944, docteur en médecine et docteur ès sciences, Axel Kahn a eu un parcours jalonné de succès. Humaniste à l'esprit éclectique, il a été directeur de recherche à l'Inserm, directeur de l'Institut Cochin (2002-2007), sans oublier d'être "peut-être le membre le plus brillant" du Comité consultatif national d'éthique (1992-2004), selon les termes de son président d'honneur, le Pr Didier Sicard, qui le décrivait comme "un mélange impressionnant de radicalité et de vérité". Il a également été président de l'université Paris-Descartes (2007- 2011) et à ce titre, mis en cause par certains plaignants dans le scandale du Centre du don des corps, ce qu'il avait contesté. Une ombre au tableau dans un parcours brillant pour celui qui était devenu en 2019 l'emblématique président de la Ligue nationale contre le cancer. Et puis, il marche. L'œil vif, la silhouette fine et nerveuse, il sillonne la France à pied en 2013 et 2014, livrant ses réflexions sur un blog qu'il alimente très régulièrement et poursuit avec la crise sanitaire liée au Covid-19. Ce périple était "une décision personnelle qui ne devait rien à personne, qui ne répondait pas à une sollicitation ou à une occasion saisie, contrairement à la presque totalité des épisodes de ma vie", expliquait-il. "J'ai plusieurs fois pleuré d'émotion devant la beauté de mon pays, mais je ne m'attendais pas à y croiser autant de gens en souffrance, accablés par la dureté du présent, désespérant de l'avenir, et repliés sur euxmêmes...". Mai 2021: il annonce que "l'aggravation de sa maladie cancéreuse" l'oblige à se mettre en retrait de ses fonctions de président de La Ligue contre le cancer. "Etant moi-même cancérologue, le plus probable est que je sois en train de parcourir l'itinéraire final de ma vie", commente-t-il sur France Inter. Et de revenir sur les deux moments marquants de sa vie: le suicide en 1970 de son père, philosophe de formation, qui lui écrit peu avant "Sois raisonnable et humain", et "la perte de la foi" chrétienne à 15 ans. Hanté par l'ultime message paternel, il est devenu un chercheur insatiable. Spécialiste des maladies génétiques, notamment hématologiques, ses travaux menés (cancer du foie, expression des gènes, thérapie génique...) ont fait l'objet de près de 600 articles dans des revues internationales et de nombreux ouvrages. "J'ai fait beaucoup de livres de sciences, mais aujourd'hui la quête philosophique m'intéresse plus", expliquait cet auteur prolifique aux grands éclats de rire. Parmi ses nombreux livres, reflétant sa passion de l'éthique et de la philosophie: "Et l'Homme dans tout ça ?" (éditions Nil, 2000), "L'homme ce roseau pensant... essai sur les racines de la nature humaine" (Nil 2007) et "Et le bien dans tout ça" (Stock, 2021). Ancien communiste, il s'est frotté à la politique. Lors des législatives de 2012 muni de l'investiture socialiste, il affronte François Fillon dans la 2e circonscription de Paris et perd avec un score honorable au second tour (43,5% contre 56,5%) Cadet du journaliste Jean-François Kahn, marié trois fois, père de quatre enfants, Axel Kahn était aussi fin cuisinier et amateur de chevaux. Avant de mourir, il était allé dire adieu à sa jument Hélène.


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