42èmes Assises de l’UPF : La responsabilité des médias à l’ordre du jour


M’Hamed Hamrouch
Mercredi 2 Juin 2010

Un événement en vaut deux. D’une part, il y a ce 60ème anniversaire de la création de l’Union de la presse francophone. Et de l’autre, l’inauguration hier à Rabat des 42èmes Assises de cette organisation regroupant tout ce que le monde francophone compte en termes de médias. Pour ce double événement, l’UPF a choisi un thème assez problématique qui renvoie à la face des maîtres de cérémonie une vérité qui n’est pas forcément bonne à dire : «La responsabilité politique et sociétale des médias». Le déplacement massif de responsables gouvernementaux africains, dont des ministres de la Communication, était d’autant plus significatif qu’il devrait nous alerter au moins sur une réalité : c’est que les pouvoirs publics, africains ou non-africains, ne sont pas prêts à lâcher prise. Le message délivré par le président de l’Organisation internationale de la Francophonie, Abdou Diouf, est à cet égard très édifiant. «Le rapport entre les médias et le pouvoir est très difficile», a souligné l’ancien président sénégalais, dans ce message lu par son conseiller politique Ousmane Paye. Rapport fait certes de conflits et de tensions mais qui cacherait, à en croire une journaliste roumaine, des accointances qui ne sont surtout pas pour servir le plus beau métier du monde. Soit on verse dans l’anti-gouvernementalisme absolu, avec ce que cela implique en termes de négationnisme, soit on sombre dans le gouvernementalisme aveugle et c’est encore pire. Dans les deux cas d’espèce, les journalistes ne remplissent pas leur noble mission qui est avant et après tout d’informer. Le métier de journaliste qui consiste à porter la plume à la blessure, quand il n’obéit pas au diktat des lobbies financiers, souscrit aveuglément à la tentation du pouvoir officiel. On est donc loin de la formule d’Albert Camus «la presse, c’est la conscience d’une nation», citée à juste titre par l’ancien patron de l’Agence France Press (AFP), Jean Miot, lors de son intervention hier en ouverture des 42 Assises de l’UPF. Ce ballottement entre l’asservissement au pouvoir, aveugle et néanmoins rémunéré, et l’excès anti-gouvernemental, nihiliste et tout aussi intéressé, est aujourd’hui pointé comme la cause directe de la crise du lectorat que connaît aujourd’hui le monde entier.
Pour le deuxième volet du fil conducteur de ce débat, soit «la responsabilité sociétale des médias», il va sans dire que «les historiens de l’éphémère», ou du moins nombre d’entre eux, ont également failli à leur engagement. Le fameux slogan «les médias miroir de la société» n’a plus aucun sens, ou presque. La dialectique pouvoir/argent a fait que le social est relégué aujourd’hui au dernier rang, tellement les enjeux sont politico-financiers. S’agissant d’une certaine presse inféodée au pouvoir, «l’enjeu» est de justement maquiller cette problématique sociale. Cette presse a poussé la complaisance jusqu’à oser mettre en doute des revendications sociales, en provenance de mécanismes syndicaux ou d’autres structures à vocation sociale. En ce qui concerne la presse anti-gouvernementaliste, l’exercice n’en est pas moins dangereux. D’autant plus dangereux que sa ligne éditoriale se réduit à une compilation infinie de «ni, ni», au détriment de l’exigence de vérité qui n’est pas souvent laide. Cette presse contribue à la mise en péril de la société, tant et si bien qu’elle risque d’étouffer toute velléité d’initiative, qu’elle provienne des autorités ou des citoyens eux-mêmes.
Face à ces deux extrêmes, il va de soi que c’est ce «juste milieu» qui manque cruellement à la presse d’aujourd’hui. Et pour conclure, faut-il rappeler que le journaliste n’est ni un justicier, ni un flic, mais tout simplement cet «œil» qui ne dort pas et qui renvoie à la société ses vertus comme ses vices. 


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