​Hassan Diab, le “professeur”, jette l'éponge après des crises à répétition

Hassan Diab n'a pas su convaincre l'opinion, même si le mouvement de contestation -ou tout du moins une partie-, était prêt à lui accorder une chance


Jeudi 13 Août 2020

Le Premier ministre libanais Hassan Diab, qui a présenté lundi la démission de son gouvernement, est un universitaire sans assise populaire qui a dû affronter un soulèvement, une faillite économique et la pandémie avant de déclarer forfait après l'explosion au port de Beyrouth.
Ce sexagénaire sans grande expérience politique clamait son indépendance lorsqu'il a été nommé en décembre 2019, deux mois après l'éclatement du soulèvement populaire qui avait poussé Saad Hariri à la démission.
Peu connu du grand public, l'enseignant en ingénierie de 61 ans à l'Université américaine de Beyrouth (AUB) a formé son gouvernement de "technocrates" en janvier, après de longues semaines de tractations.
Il avait promis un nouveau style de gouvernement mais il a été accusé par ses détracteurs d'être soumis au parti du président Michel Aoun, le Courant patriotique libre, et son allié indéfectible, le puissant Hezbollah pro-iranien.
Hassan Diab n'a pas su convaincre l'opinion, même si le mouvement de contestation -ou tout du moins une partie-, était prêt à lui accorder une chance.
De l'aveu même de ses soutiens, son caractère "obstiné" ne l'a pas aidé à se forger une popularité auprès du mouvement de contestation, qu'il avait pourtant qualifié d'"historique", saluant "le peuple libanais (...) uni pour défendre ses droits à une vie libre et digne".
Peu après son entrée en fonction, la colère grondait de nouveau au sein d'une population confrontée à une pandémie dans un pays en plein naufrage économique, qui a fait défaut sur sa dette et n'est pas parvenu à négocier un plan de sauvetage avec le Fonds monétaire international (FMI).
Puis après l'explosion dévastatrice mardi dernier de grosses quantités de nitrate d'ammonium stockées depuis des années dans le port de Beyrouth, beaucoup de Libanais ont de nouveau dénoncé la corruption et l'incompétence de leurs dirigeants, y compris M. Diab, qu'ils accusent d'être responsables du drame.
Lundi, sous la pression de la rue et après plusieurs jours de manifestations de colère, le Premier ministre a annoncé la démission du gouvernement.
Dans un discours à la nation, il a accusé la classe politique d'être la cause de ses échecs et dénoncé la "corruption" ayant conduit à "ce séisme qui a frappé le pays".
Après son départ du poste de ministre de l'Education (2011-2014), Hassan Diab était resté à l'écart des projecteurs, le professeur aux cheveux noirs soigneusement peignés se présentant sur son site Internet comme "l'un des rares ministres technocrates depuis l'indépendance".
Mais, au sein du mouvement de contestation populaire, on l'a également critiqué pour avoir participé à un gouvernement incompétent et corrompu entre 2011 et 2014.
D'autres avaient attaqué un volumineux ouvrage vantant ses mérites et son bilan de ministre, qu'il avait fait publier par le ministère de l'Education après son départ.
Père de trois enfants, il a obtenu en 1985 un doctorat en génie informatique à l'Université de Bath, au Royaume-Uni.
Il a occupé plusieurs postes à l'Université américaine de Beyrouth, dont celui de vice-président, depuis qu'il y est entré en tant que professeur assistant à l'âge de 26 ans.
Un différend l'a cependant opposé, après sa nomination au poste de Premier ministre, à la direction de l'université au sujet d'arriérés non payés, suscitant, en plein naufrage économique, de nombreuses critiques dans le pays.
Défenseur d'une réforme du système éducatif au Liban, il a signé plusieurs ouvrages et articles universitaires sur le sujet.
"Je suis sûr que la solution à la plupart des défis économiques, sociaux, financiers ou encore liés au chômage, repose sur l'éducation sous toutes ses formes", écrit-il encore sur son site Internet. 


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