​Dr Mohamed Ferroudji : Donner un cadre de vie plus adapté aux enfants handicapés


Propos recueillis par Alain Bouithy
Jeudi 11 Juin 2015

​Dr Mohamed Ferroudji : Donner un cadre de vie plus adapté aux enfants handicapés
Président-fondateur de l’organisation «Connaissances médicales sans frontières» (ASBL Cosaf), une 
organisation dédiée au bien-être des enfants handicapés, Dr M. Ferroudji est médecin urgentiste, assistant en traumatologie et orthopédie dans plusieurs établissements hospitaliers en Belgique. 
Il présente les principales actions de cette organisation au Maroc.


Libé : Comment est née la Cosaf?

Mohamed Ferroudji : Bien qu’étant médecin, j’avais l’impression que le concept handicap me paraissait assez vague. Pour mieux en saisir le sens réel, j’ai réuni un groupe de médecins afin d’organiser des tables rondes autour de ce concept. Dès lors,  j’ai initié des congrès médicaux à travers lesquels des spécialistes devaient tenter d’apporter leurs contributions à ce sujet. C’est d’ailleurs pour cette raison que notre organisation a été dénommée «Connaissances médicales sans frontières».
C’est ainsi que j’ai organisé un congrès en 2007 pour l’échange d’expériences entre professeurs éminents dans ce domaine afin de comprendre pourquoi nous avions tant de handicapés en milieu rural.
Au-delà, l’idée était de réunir des médecins pour échanger des idées sur cette thématique médicale et surtout nous aider à faire de petites consultations dans les régions rurales où l’intervention d’une équipe pluridisciplinaire est importante. En effet, pour organiser une caravane médico-sociale digne de ce nom, il nous fallait un chirurgien, un pédiatre, un médecin  généraliste et surtout un psychologue afin d’avoir une idée multidisciplinaire de la situation.
Ainsi est née l’idée de  la Cosaf.

Comment les familles des enfants handicapés ont-elles accueilli l’idée d’installer la COSAF au Maroc?

Il faut préciser qu’au départ, notre programme consistait à sélectionner un village dont on devait s’occuper pendant un an en fonction des besoins des enfants. A titre d’exemple, on menait plusieurs opérations selon les problèmes exposés dans la région où l’on se trouvait: forage de puits,  rénovation d’école pour enfants handicapés et centres médicaux, suivi médical, acquisition d’ambulance. En plus d’encourager les médecins et infirmiers de la place, on donnait une petite fête (distribution de cadeaux et spectacles de clown) à la fin du projet avant de passer à un autre village.
Les choses se sont passées différemment à Mohammedia.  Après une petite animation organisée à l’hôpital Moulay Abdallah, des parents nous ont exposé ce qu’ils considèrent être leur préoccupation majeure. A savoir le transport des enfants handicapés dans le cadre de la thérapie qu’ils suivent.
Pour répondre à leur demande, et sachant qu’on n’avait travaillé jusqu’alors que dans des zones rurales, on a donc mené une étude avec des étudiants en médecine de la région de Casablanca afin de bien comprendre la problématique. Celle-ci a effectivement révélé qu’environ 40% des problèmes vécus par les habitants de la région étaient liés au transport. 
Suite à quoi, on a frappé à toutes les portes afin qu’on nous aide à faire entrer une camionnette au Maroc. Mais en vain. D’ailleurs, les demandes sont toujours déposées dans certaines administrations. Vu l’urgence, j’ai dû la dédouaner grâce notamment à mes émoluments de garde.
Ceci pour dire que c’est grâce à ces familles qu’on a décidé de nous installer à Mohammedia et d’ouvrir un local afin de répondre à ce problème et à bien d’autres.

Comment expliquez-vous les difficultés d’avoir un soutien pour une cause aussi noble?

Depuis 2010, date de la création de COSAf Maroc, je n’ai cessé de solliciter des aides pour soutenir les enfants handicapés. Malheureusement, je n’ai essuyé que refus, tout au plus des promesses. Par exemple, je n’ai pu obtenir un local, alors que ceux du centre du Croissant Rouge étaient abandonnés. Tout comme je n’ai pu avoir un local à rénover pour  installer un système d’ambulance pour la physiothérapie.
La réalité est que quel que soit le sérieux de votre programme, vous ne trouvez ni appui ni aide logistique. Je suis un médecin qui veut combattre le handicap et c’est vraiment décourageant d’être pris dans les tracasseries administratives et bureaucratiques. En tant que médecin, mon problème est d’essayer de comprendre pourquoi il y a tant de handicapés et ne pas de savoir comment faire entrer une ambulance dans mon pays. C’est décourageant d’attendre deux à trois jours à la douane pour qu’on vous laisse entrer une ambulance.

Quelles sont les actions menées par Cosaf à ce jour?

En premier lieu, on a un service de transport gratuit pour les enfants de la région de Mohammedia souffrant d’un handicap et inscrits à notre association qui leur permet de se rendre à l’école, chez le médecin, à l‘hôpital ou chez le kinésithérapeute sans se faire des soucis. Vu que les centres sont en général trop chers, on assure aussi le transport des enfants vers les cliniques de Bernoussi où ils reçoivent gratuitement des soins.
Pour les familles peu ou pas satisfaites des prestations d’un centre de kinésithérapie, on assure aussi le transport vers d’autres établissements. D’ailleurs, c’est partant de ce constat qu’on a créé au sein de la Cosaf une salle de physiothérapie au profit de nos enfants.
Des parents nous ont également rapporté avoir reçu à la fin de l’année dernière une note leur demandant de garder chez eux leurs enfants au prétexte que l’établissent qu’ils fréquentaient n’était pas adapté à leur handicap. Elles ont appris aussi, par la même occasion que les frais de scolarité devaient être augmentés s’ils souhaitaient continuer à les amener en classe. Ne disposant pas assez de moyens financiers, la plupart des familles ont voulu garder leurs enfants à la maison. Chose qu’on ne pouvait admettre, sachant que l’éducation est tout aussi importante pour leurs progénitures. C’est ainsi qu’on a essayé de créer une classe adaptée aux besoins de ces derniers. Malheureusement, le manque de budget n’a pas permis de concrétiser ce projet.
Enfin, on a mis en place un service d’ambulance pour le transport des enfants vers l’hôpital.

Un mot sur les activités récréatives organisées au sein de la Cosaf?

Il s’agit pour l’essentiel de spectacles de clown, de sorties à la plage et dans les bois, de pique-nique en compagnie des mamans qui, faut-il le rappeler, sont pour la plupart livrées à elles-mêmes alors que le père a quitté le foyer pour des raisons que l’on ignore. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’on garde leurs enfants toute la journée pour leur permettre un temps pour elles, d’aller au travail ou à l’école. L’idée est aussi de les encourager à s’occuper parce qu’on doit bannir l’assistanat. Dans tous les cas, le plus important est qu’on garde le sourire de ces enfants.
Par ailleurs, on espère que nos petits projets vont être examinés par les décideurs et que ceux-ci vont appliquer toutes les conventions signées par le Maroc à Genève.
Sachez aussi qu’en plus de toutes ces activités,  on mène aussi la prévention et la lutte contre la mortalité maternelle et infantile pendant la grossesse et lors de l’accouchement dans les régions rurales. Outre les consultations et distributions gratuites de médicaments et de matériel pour enfants handicapés, on dispense également des formations pour les ambulanciers. 


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1.Posté par Hassaini le 21/04/2018 21:57 (depuis mobile)
Pas de nouveautés à vos projets monsieur ferrougji

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