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Mohammedia, 7h15. Un lundi de ce mois de mars. A cette heure matinale, les clients permanents de M’dina bus de la ligne 900 s’arrangent tant bien que mal pour rejoindre la capitale économique. Les retardataires assidus ne se soucient ni de l’absence des bus ni de leurs retards. Ils préfèrent prendre leur café juste en face de la station de bus en attendant le «salut». D’autres acceptent les services des transporteurs clandestins dont les prix varient selon la qualité du véhicule utilisé. Le cas le plus spectaculaire est celui du fameux car bleu que tout le monde connaît. Il n’a pas d’heure fixe, mais il est toujours là quand les bus de M’dina bus sont absents. Les employés ne sont autres que le chauffeur toujours en colère et le receveur qui fait semblant de le calmer quand un passager se plaint de sa conduite indélicate. Arrivé sur place, à 7h25, le car ne tarde pas à faire le plein. Surchargé, pourtant il s’arrête à chaque arrêt pour embarquer des retardataires las d’attendre les bus verts qui n’arrivent pas. Le tour de la ville ne prend pas plus de 10 minutes sous les regards insoucieux des agents de la circulation habitués, paraît-il, à sa présence. Certains agents tournent même la tête pour s’empêcher volontairement de le voir.
Sur la route côtière menant à Casablanca, le chauffeur trouve enfin son plaisir quotidien : la grande vitesse. Inconscient de l’état de son tacot rouillé, il préfère accélérer malgré la présence des centaines d’usagers. Soudain, un passager panique. Il commence à crier contre le chauffeur. Le receveur, vêtu d’un treillis qui pue l’alcool et dont l’odeur donne des nausées, tente de le calmer. Mais le jeune manifeste sa colère contre la conduite du chauffeur qui s’emploie à doubler les autres voitures à grande vitesse.
Pour ne plus entendre ses réclamations, le chauffeur augmente le son de la radio digne des porte-voix utilisés par les marchands ambulants dans les souks ruraux. Ne pouvant plus, le jeune se dirige vers lui et l’oblige à s’arrêter. Une fois débarrassé de ce passager involontaire, le chauffeur poursuit sa route en accélérant comme s’il voulait montrer qu’il était le seul maître à bord. Entre-temps, le receveur encaisse le prix de la «traversée». Contre 6 DH, le passager reçoit un grand ticket non validé et jamais contrôlé car, dans ce business, le propriétaire ne prévoit pas de contrôleur à mi-chemin à l’instar des autres transporteurs légaux. «Le butin de quelque 540 dirhams ramassés auprès des 89 passagers, sert également à payer les faux frais du déplacement. Pour un aller-retour, les charges supplémentaires varient entre 100 et 150 DH. Tout dépend des journées», se plaint le receveur.
Arrivé au milieu de la route, le car s’arrête. C’est le barrage permanent de la gendarmerie Royale. Le receveur descend en courant et échange quelques mots avec un gendarme à proximité de la jeep devant une vieille bâtisse détruite récemment. Les nouveaux clients font montre d’inquiétude. «Ils vont saisir le car et conduire le chauffeur et le receveur en prison.», s’inquiète une passagère. Une inquiétude que partagent d’autres passagers non habitués à ce trafic routier. Surtout que l’état du véhicule est calamiteux : des sièges lacérés et déglingués, des vitres brisées non réparées, un son de radio assourdissant et un comportement inqualifiable du receveur. Sans oublier la mauvaise conduite du chauffeur et des freins qui ne fonctionnent pratiquement pas bien. Les bruits du moteur et l’odeur des échappements donnent le tournis à des passagers malgré eux. Le parquet du car et son toit sont troués. Les petits cafards s’ajoutent au décor et aux mauvaises odeurs que dégagent les bouts de tissu et du cuir qui couvrent les sièges. En un mot : le car mérite bien la casse. D’où l’inquiétude des nouveaux usagers de ce car très populaire auprès des gens qui font la navette entre Mohammedia et Casablanca. Seuls les clients permanents de ce tas de ferraille, les plus expérimentés, leur apportent un certain réconfort: «Il n’y a pas à s’inquiéter... Ça va s’arranger… nous allons reprendre la route dans très bientôt… ». Effectivement, le receveur retourne à son tacot et frappe sur la carrosserie rouillée, donnant le fameux signal au chauffeur : «Roule… !». Et c’est reparti. Le receveur, paraît-il, doit bien avoir trouvé la bonne formule pour échapper aux sanctions du Code de la route. Et comme dit l’adage : «A chacun ses arguments ».
Après 30 minutes, le car arrive à destination. Pour remercier ses passagers pour leur patience et surtout de leur fidélité, il n’hésite pas à s’arrêter à la demande de chaque passager. Il ne respecte pas les arrêts de bus. Il peut le faire même au beau milieu de la route ou même aux feux rouges. Ce qui perturbe la circulation à l’entrée de la ville où l’embouteillage est quotidiennement à son pic à cette heure matinale.
De loin, les passagers doivent bien se demander comment cette ferraille a pu les transporter plus de 37 km. Et pas n’importe comment : à grande vitesse défiant tous les radars et les barrages fixes des agents de la circulation. Certes, il ne s’agit pas d’un miracle, mais d’une sérieuse violation du Code de la route et de toutes les législations du transport en commun en vigueur. On peut bien tolérer, à contrecœur, que le transport clandestin puisse passer inaperçu avec des petites voitures. Mais quand il s’agit d’un car dans un tel état, bonjour l’hécatombe !