«Je suis prêt à être premier ministre !»
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Et mardi soir dans son «Hiwar», A. Benkirane n’a pas hésité à assumer les pages qui se tournent –peu importe à ses yeux qu’on les ait lues- et celles qui s’ouvrent. L’homme nous avait habitués à des sorties tonitruantes, parfois non contrôlées et à un tempérament fougueux. Il faudra aujourd’hui s’habituer à ses accents consensuels… «Je lance un appel au Roi pour que soient libérées toutes les personnes arrêtées abusivement dans le cadre du 16 mai, ceux de la Salafya Jihadya qui n’ont rien fait et les cinq politiques de l’affaire Belliraj. Tournons la page».
Benkirane devient donc un homme fréquentable. Quelques figures présentés sur le plateau de «Hiwar» et qui ont répondu à l’invitation du patron des islamistes confortent cette hypothèse. Première surprise, le ministre RNI de la Jeunesse et des Sports, celui-là même dont la famille politique s’est fixé comme ligne rouge… le PJD, est au premier rang. La présence de Moncef Belkhayat est-elle annonciatrice de la fin des lignes de rupture d’un Rassemblement national des indépendants qui dans la foulée sonne le glas de devoir de clarification ?
Des lignes de rupture sont-elles en passe de s’effacer, dans un magma politique où tout le monde ressemble à tout le monde ? Le PPS, un parti qui a toujours proclamé sa profonde divergence avec le PJD, n’a pas boudé l’invitation de Benkirane.
Parmi le public, deux personnalités du parti, dont Amine Sbihi, membre du bureau politique et réputé proche de Nabil Benabdallah. Faut-il en déduire un rapprochement des anciens communistes avec les islamistes ? Ou encore une accalmie d’un champ politique qui n’hésitait pourtant pas à affirmer que trop de consensus tue le consensus ? Revenons-en aux nouvelles positions du patron du PJD qui ne demande qu’à être en phase avec la nouvelle page constitutionnelle en gestation. Sur la monarchie, sa position a le mérite d’être claire et sans ambiguïté aucune. Au PJD, on est pour un Roi qui règne et qui gouverne. «Sur la question de la réforme du code de la famille, à quoi nous aurait servi un Roi qui ne fait que régner?» s’exclame Benkirane qui refuse de s’engouffrer dans la brèche d’une monarchie encombrée de qualificatifs. Peu importe qu’elle soit parlementaire ou constitutionnelle, pourvu que le principe de la séparation et de l’équilibre des pouvoirs soit sauf.
Un conseil auprès du Roi à l’iranienne
Que l’on se rassure, la question de la responsabilité et de la reddition des comptes est au cœur de la conception démocratique des islamistes. Le chef de gouvernement est responsable de son programme, de son équipe, de ses décisions. Dans le même temps, une sorte de conseil est installé aux côtés du Roi pour débattre des choix et décisions stratégiques, calqué sur le modèle iranien, «parce que l’Iran a aussi de bonnes choses». En faisant l’inventaire des propositions du PJD à la commission en charge de la révision de la Constitution, Benkirane se gardera bien de s’étaler ce mardi soir sur le principe de la primauté de la loi nationale sur les conventions internationales que défend âprement sa famille politique.
Le chantier de la révision constitutionnelle sur fond du Mouvement du 20 février lave-t-il plus blanc ? Peut-être mais pas jusqu’au bout. En bon leader islamiste, Abdelilah Benkirane défendra la constitutionnalisation du Conseil des oulémas et leur indépendance. Ceux et celles qui se demandent ce que viennent faire les oulémas dans une réforme politique et sociale peuvent toujours s’interroger. Le successeur d’El Othmani évite de répondre à de telles questions qui engagent.
Abdelilah Benkirane devient un homme fréquentable et le fait savoir. «Est-ce que vous vous préparez à être premier ministre demain si votre parti est classé premier aux élections ?» lui demande le journaliste interviewer. La question-aubaine ! «Je ne me prépare pas à être premier ministre, je suis prêt», rétorque Abdelilah Benkirane. Le leader islamiste qui ne porte jamais de cravate s’empressera de rassurer ceux et celles qui ont forcément des craintes face à une telle perspective. Qu’on se le dise, il n’interdira pas la vente de l’alcool. Il ne fermera pas les casinos et n’obligera pas les femmes à porter le voile. «Je m’attaquerai aux vrais problèmes des Marocains : santé, emploi, enseignement, logement», promet Abdelilah Benkirane. Promesse pré-électorale ? Gage de «fréquentabilité» de l’islamiste en chef ? A moins que ce ne soit un vent de changement qui souffle réellement sur le Maroc…