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A l’occasion de la clôture de la deuxième session de la deuxième année de la onzième législature, la presse nationale a publié une déclaration du président de la Chambre des représentants dans laquelle il expose le bilan de la session clôturée, indiquant que le Parlement a veillé au strict respect des dispositions de la Constitution et du règlement intérieur de la première Chambre, notamment les délais constitutionnels et institutionnels relatifs aux différentes missions de l’action parlementaire.
Il a reconnu, au niveau du contrôle parlementaire de l’action gouvernementale par le biais des questions écrites, que les membres de la Chambre des représentants ont adressé aux membres du gouvernement environ 2.700 questions, et que ces derniers ont présenté 1.331 réponses, soit un taux d'environ 50%. Il est à noter, du point de vue critique, que le bilan chiffré de l’action parlementaire doit citer le nombre exact des questions et des réponses, et ne doit pas contenir des données statistiques approximatives en utilisant l’expression « environ ».
Contrairement aux propos de cette déclaration, le Groupe socialiste- Opposition ittihadie a précisé, lors d’un point de presse, que le bilan de la session clôturée révèle clairement la violation par le gouvernement des dispositions constitutionnelles et des articles du règlement interne de la première Chambre. Les ministres n’ont pas pu répondre à un grand nombre de questions écrites, ni dans les délais constitutionnels, ni en dehors de ces délais.
L'Opposition ittihadie a confirmé que les membres du gouvernement n'avaient répondu qu'à moins de 39% des questions écrites, soit la réponse à 516 questions sur 1.324 questions écrites dépassant le délai de vingt jours prévu au deuxième alinéa du chapitre 100 de la Constitution (le gouvernement doit donner sa réponse dans les vingt jours suivant la date à laquelle il a été saisi de la question).
Commentant les précisions de l'Opposition ittihadie, le membre du gouvernement en charge des relations avec le Parlement et son porte-parole officiel a déclaré que l'année législative clôturée a connu «une importante production en matière de contrôle parlementaire, démontrant un certain nombre d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs signifiants», y compris le bilan des réponses du gouvernement aux questions écrites soumises par les membres des deux Chambres du Parlement.
A cet égard, le porte-parole du gouvernement a reconnu que les ministres ont répondu à 6.290 questions sur un nombre global de 9.520 questions écrites.
J'ai passé en revue ces déclarations relatives à l’évaluation de l’action parlementaire en matière de contrôle, tout en analysant le style argumentatif du président de la Chambre des représentants et du ministre chargé des Relations avec le Parlement.
Le constat de cette analyse m’a rappelé le paralogisme de l’épouvantail utilisé par les logiciens, les théoriciens de l’argumentation et les rhétoriciens pour décrire le recours d’une personne à l’usage d’un argument de son adversaire en le déformant afin de donner l’impression de la non crédibilité de sa position. Une technique argumentative qui fait appel, dans le discours politique, aux émotions au lieu de se baser sur la raison, l’objectivité et la réflexion rationnelle.
L’objectif étant d’éviter l’essentiel du débat, en utilisant ce qu’on appelle dans les théories de l’argumentation le sophisme de l'épouvantail qui représente une sorte d'argument allégué donnant l'impression de réfuter un argument que l'adversaire n'a pas présenté. Cette technique vise l’utilisation de données indépendamment du contexte du débat, ou la concentration sur des détails marginaux du sujet en question, ou l’orientation de la discussion vers des aspects qui n’ont aucune importance dans la résolution du problème posé.
Dans les déclarations susmentionnées, la question se pose sur l’essentiel : la violation par le gouvernement de la disposition constitutionnelle relative aux délais des réponses qu’il doit présenter aux membres du Parlement, ou le fait que les ministres ont répondu à la moitié ou aux deux tiers des questions soumises par les parlementaires.
A quoi doit-on donner l’importance: une réalité montrant que le gouvernement respecte fermement les dispositions de la Constitution, ou une tentation d’un acteur politique et parlementaire démontrant les efforts déployés par le gouvernement en vue de respecter ces dispositions ?
Quelle signification aura le taux de 50% dans les propos du président du Parlement? Et quel message nous retiendrons des propos présentés par le membre du gouvernement en charge des relations avec le Parlement lorsqu'il parle «d'indicateurs quantitatifs et qualitatifs signifiants » ?
Selon les données statistiques fournies par les deux personnalités, et en effectuant une opération arithmétique simple, on conclut que 3.230 questions écrites n'ont fait l’objet d'aucune réponse du gouvernement, soit 1.369 questions à la Chambre des représentants et 1.834 à la Chambre des conseillers. Une conclusion qui démontre le vrai visage de la logique de l'épouvantail qui s’éloigne de l’axe central du débat politique et constitutionnel visant le renforcement de la construction démocratique et institutionnelle dans le Maroc prometteur.
L’important dans ce débat n'est pas le nombre de questions écrites auxquelles le gouvernement a répondu, ni le nombre de réponses qu'il a fournies, mais plutôt la volonté du gouvernement et de ses membres pour respecter les dispositions constitutionnelles. Une volonté qui reste toujours contestée si une seule question parlementaire n’a fait l’objet d’aucune réponse gouvernementale dans les délais fixés par la Constitution.
Une ou plusieurs questions parlementaires sans réponses gouvernementales, cela présente le même indicateur de violation de la Constitution par le gouvernement qui doit donner l’exemple, dans le reste de son mandat, par des pratiques qui donnent la priorité absolue à la suprématie de la Constitution.
Une question sans réponse gouvernementale dans tout système démocratique pèse lourd dans le sens où elle reflète, de manière indiscutable, le niveau de transparence, d'ouverture et de communication gouvernementale. Une question parlementaire avec ou sans réponse gouvernementale est la traduction concrète de l'équilibre institutionnel qui existe entre les deux pouvoirs législatif et exécutif, et le respect des droits de l'opposition politique et parlementaire.
Sans aucun doute, les faits parlementaires d’aujourd’hui prouvent que le gouvernement est responsable d'avoir violé les dispositions de la Constitution, et que le chef du gouvernement doit assumer cette responsabilité vu son rôle de coordination et de supervision de l’ensemble des affaires gouvernementales. Il ressort de son devoir national, politique et moral d’obliger les membres de son gouvernement à respecter la Constitution et les lois en vigueur, et d’accomplir ses engagements cités dans le programme gouvernemental relatifs au respect des délais constitutionnels.
Il est nécessaire que le gouvernement fasse face aux dysfonctionnements soulevés lors de la dernière session parlementaire, non seulement par rapport aux délais des réponses gouvernementales aux questions parlementaires, mais aussi par rapport à l’ensemble des travaux parlementaires liés à la législation, au contrôle de l’action gouvernementale et à l’évaluation des politiques publiques (refus des propositions de lois, absence des membres du gouvernement lors des séances plénières consacrées aux questions orales, programmation des réunions des commissions permanentes en présence des ministres, …).
Les acquis de notre pays en matière de démocratisation et de développement exigent une forte mobilisation de tous les acteurs gouvernementaux et parlementaires pour défendre la suprématie de la Constitution. Ces acteurs sont appelés à adopter un comportement politique responsable basé sur le respect des dispositions constitutionnelles, et une approche collective fondée sur les orientations de Sa Majesté le Roi Mohammed VI qui a souligné, dans son discours d’ouverture de la première session de la troisième année législative de la neuvième législature, vendredi 11 octobre 2013, «la nécessité d'un dialogue constructif et d’une coopération étroite et équilibrée entre le Parlement et le gouvernement, dans le respect du principe de séparation des pouvoirs. Car il s’agit de garantir une pratique politique saine, fondée sur l'efficacité, la cohérence et la stabilité institutionnelle».
Il a reconnu, au niveau du contrôle parlementaire de l’action gouvernementale par le biais des questions écrites, que les membres de la Chambre des représentants ont adressé aux membres du gouvernement environ 2.700 questions, et que ces derniers ont présenté 1.331 réponses, soit un taux d'environ 50%. Il est à noter, du point de vue critique, que le bilan chiffré de l’action parlementaire doit citer le nombre exact des questions et des réponses, et ne doit pas contenir des données statistiques approximatives en utilisant l’expression « environ ».
Contrairement aux propos de cette déclaration, le Groupe socialiste- Opposition ittihadie a précisé, lors d’un point de presse, que le bilan de la session clôturée révèle clairement la violation par le gouvernement des dispositions constitutionnelles et des articles du règlement interne de la première Chambre. Les ministres n’ont pas pu répondre à un grand nombre de questions écrites, ni dans les délais constitutionnels, ni en dehors de ces délais.
L'Opposition ittihadie a confirmé que les membres du gouvernement n'avaient répondu qu'à moins de 39% des questions écrites, soit la réponse à 516 questions sur 1.324 questions écrites dépassant le délai de vingt jours prévu au deuxième alinéa du chapitre 100 de la Constitution (le gouvernement doit donner sa réponse dans les vingt jours suivant la date à laquelle il a été saisi de la question).
Commentant les précisions de l'Opposition ittihadie, le membre du gouvernement en charge des relations avec le Parlement et son porte-parole officiel a déclaré que l'année législative clôturée a connu «une importante production en matière de contrôle parlementaire, démontrant un certain nombre d’indicateurs quantitatifs et qualitatifs signifiants», y compris le bilan des réponses du gouvernement aux questions écrites soumises par les membres des deux Chambres du Parlement.
A cet égard, le porte-parole du gouvernement a reconnu que les ministres ont répondu à 6.290 questions sur un nombre global de 9.520 questions écrites.
J'ai passé en revue ces déclarations relatives à l’évaluation de l’action parlementaire en matière de contrôle, tout en analysant le style argumentatif du président de la Chambre des représentants et du ministre chargé des Relations avec le Parlement.
Le constat de cette analyse m’a rappelé le paralogisme de l’épouvantail utilisé par les logiciens, les théoriciens de l’argumentation et les rhétoriciens pour décrire le recours d’une personne à l’usage d’un argument de son adversaire en le déformant afin de donner l’impression de la non crédibilité de sa position. Une technique argumentative qui fait appel, dans le discours politique, aux émotions au lieu de se baser sur la raison, l’objectivité et la réflexion rationnelle.
L’objectif étant d’éviter l’essentiel du débat, en utilisant ce qu’on appelle dans les théories de l’argumentation le sophisme de l'épouvantail qui représente une sorte d'argument allégué donnant l'impression de réfuter un argument que l'adversaire n'a pas présenté. Cette technique vise l’utilisation de données indépendamment du contexte du débat, ou la concentration sur des détails marginaux du sujet en question, ou l’orientation de la discussion vers des aspects qui n’ont aucune importance dans la résolution du problème posé.
Dans les déclarations susmentionnées, la question se pose sur l’essentiel : la violation par le gouvernement de la disposition constitutionnelle relative aux délais des réponses qu’il doit présenter aux membres du Parlement, ou le fait que les ministres ont répondu à la moitié ou aux deux tiers des questions soumises par les parlementaires.
A quoi doit-on donner l’importance: une réalité montrant que le gouvernement respecte fermement les dispositions de la Constitution, ou une tentation d’un acteur politique et parlementaire démontrant les efforts déployés par le gouvernement en vue de respecter ces dispositions ?
Quelle signification aura le taux de 50% dans les propos du président du Parlement? Et quel message nous retiendrons des propos présentés par le membre du gouvernement en charge des relations avec le Parlement lorsqu'il parle «d'indicateurs quantitatifs et qualitatifs signifiants » ?
Selon les données statistiques fournies par les deux personnalités, et en effectuant une opération arithmétique simple, on conclut que 3.230 questions écrites n'ont fait l’objet d'aucune réponse du gouvernement, soit 1.369 questions à la Chambre des représentants et 1.834 à la Chambre des conseillers. Une conclusion qui démontre le vrai visage de la logique de l'épouvantail qui s’éloigne de l’axe central du débat politique et constitutionnel visant le renforcement de la construction démocratique et institutionnelle dans le Maroc prometteur.
L’important dans ce débat n'est pas le nombre de questions écrites auxquelles le gouvernement a répondu, ni le nombre de réponses qu'il a fournies, mais plutôt la volonté du gouvernement et de ses membres pour respecter les dispositions constitutionnelles. Une volonté qui reste toujours contestée si une seule question parlementaire n’a fait l’objet d’aucune réponse gouvernementale dans les délais fixés par la Constitution.
Une ou plusieurs questions parlementaires sans réponses gouvernementales, cela présente le même indicateur de violation de la Constitution par le gouvernement qui doit donner l’exemple, dans le reste de son mandat, par des pratiques qui donnent la priorité absolue à la suprématie de la Constitution.
Une question sans réponse gouvernementale dans tout système démocratique pèse lourd dans le sens où elle reflète, de manière indiscutable, le niveau de transparence, d'ouverture et de communication gouvernementale. Une question parlementaire avec ou sans réponse gouvernementale est la traduction concrète de l'équilibre institutionnel qui existe entre les deux pouvoirs législatif et exécutif, et le respect des droits de l'opposition politique et parlementaire.
Sans aucun doute, les faits parlementaires d’aujourd’hui prouvent que le gouvernement est responsable d'avoir violé les dispositions de la Constitution, et que le chef du gouvernement doit assumer cette responsabilité vu son rôle de coordination et de supervision de l’ensemble des affaires gouvernementales. Il ressort de son devoir national, politique et moral d’obliger les membres de son gouvernement à respecter la Constitution et les lois en vigueur, et d’accomplir ses engagements cités dans le programme gouvernemental relatifs au respect des délais constitutionnels.
Il est nécessaire que le gouvernement fasse face aux dysfonctionnements soulevés lors de la dernière session parlementaire, non seulement par rapport aux délais des réponses gouvernementales aux questions parlementaires, mais aussi par rapport à l’ensemble des travaux parlementaires liés à la législation, au contrôle de l’action gouvernementale et à l’évaluation des politiques publiques (refus des propositions de lois, absence des membres du gouvernement lors des séances plénières consacrées aux questions orales, programmation des réunions des commissions permanentes en présence des ministres, …).
Les acquis de notre pays en matière de démocratisation et de développement exigent une forte mobilisation de tous les acteurs gouvernementaux et parlementaires pour défendre la suprématie de la Constitution. Ces acteurs sont appelés à adopter un comportement politique responsable basé sur le respect des dispositions constitutionnelles, et une approche collective fondée sur les orientations de Sa Majesté le Roi Mohammed VI qui a souligné, dans son discours d’ouverture de la première session de la troisième année législative de la neuvième législature, vendredi 11 octobre 2013, «la nécessité d'un dialogue constructif et d’une coopération étroite et équilibrée entre le Parlement et le gouvernement, dans le respect du principe de séparation des pouvoirs. Car il s’agit de garantir une pratique politique saine, fondée sur l'efficacité, la cohérence et la stabilité institutionnelle».
Il est évident, pour conclure, que toute pratique politique responsable exige la production de discours politiques argumentés permettant aux acteurs politiques et parlementaires le recours aux inférences rationnelles pour une meilleure représentation de la réalité politique. Loin des illusions, la démocratie se construit par des acteurs politiques qui croient à la rationalité, et non au paralogisme de l’épouvantail.
Par Ahmed El Aked
Chercheur en communication politique et analyse de discours.
Par Ahmed El Aked
Chercheur en communication politique et analyse de discours.