Rabii El Jawhari : “Siga ” est un message pour battre en brèche la propagande coloniale visant à séparer les habitants du Sahara marocain de leurs ancêtres Idrissides


​Pour son dernier film "Siga", projeté vendredi dernier en avant-première, le réalisateur Rabii El Jawhari répond aux questions de la MAP

Libé
Dimanche 10 Avril 2022

Qu'est-ce qui vous a inspiré pour la réalisation du film "Siga"?

J’ai été vivement touché par le discours prononcé par SM le Roi Mohammed VI à l’occasion du 39ème anniversaire de la glorieuse Marche Verte et dans lequel le Souverain avait notamment affirmé que "les Marocains, c’est un brassage civilisationnel authentique entre toutes les composantes constitutives de l’identité marocaine". J’ai tenté de refléter mon interprétation de cet inspirant discours Royal dans la réalisation du film "Siga", en incluant l’ensemble du "brassage civilisationnel authentique entre toutes les composantes constitutives de l’identité marocaine", à travers une équipe originaire de tout le Royaume et un scénario qui réunit des personnages utilisant les différents dialectes du pays.

Pourquoi le titre "Siga"?

Même si je voulais laisser maintenir le suspense autour de ce nom, je le dévoile quand-même. "Siga" est le nom donné à un jeu qui ressemble au jeu de dés et se pratique sur le sable. J’ai voulu par cette métaphore souligner que la marocanité du Sahara est un conflit créé de toutes pièces.

Quel est le principal message de "Siga"?

Il s’agissait pour moi, en tant que réalisateur, de battre en brèche la propagande coloniale visant à séparer les habitants du Sahara marocain de leurs ancêtres Idrissides. Le film est certes une fiction, mais il s'inspire de faits réellement vécus par des anciens séquestrés dans les camps de Tindouf. C’est ainsi que nombre de protagonistes font cohabiter plusieurs histoires tissées profondément par le même lien.

Quels sont les moments forts du tournage de "Siga"?

Malgré l’importance de son budget, le film a été auto-produit avec une grande équipe composée de 40 acteurs, avec à la clé une diversification de plans et d’effets spéciaux et numériques. En outre, le tournage a été lancé juste après les trois mois de confinement qui ont suivi l’état d’urgence sanitaire avec ses diverses retombées, notamment la limitation des déplacements au niveau du territoire national. Néanmoins, les autorités locales de la ville d’Ouarzazate, lieu du tournage, ont été d’un soutien précieux, pour avoir allégé la dureté de cette situation combien particulière.

Par contre, les membres de l’équipe, qui par leur diversité représentaient toutes les régions du Royaume, ont tissé des liens solides d’amitié et de fraternité, ce qui a favorisé une atmosphère de joie et de partage intense.

Pourquoi introduire cinq histoires dans un seul film?

L'approche que j'ai adoptée n’est pas linéaire mais post-narrative, avec cinq histoires: la première se déroule dans les années 80, la deuxième au 13ème siècle, la troisième marque un retour aux années 80, la quatrième se déroule à la fin du 19ème siècle et enfin la cinquième a eu lieu dans les années 90.

En effet, il existe une pluralité d'histoires mais au fond avec un seul fil conducteur et un seul lien existant. Le défi consistait à fragmenter la narration et à maintenir vivace le suspense du public pour une durée de 2h30min, d'autant plus que le film, n'étant pas porté par un seul héros, se démarque par une technique narrative non linéaire.

Propos recueillis par Sofia El Aouni (MAP)


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