Portrait : François Mitterrand (2/2), de la Résistance à la Présidence


Libé
Mardi 14 Août 2012

Portrait : François Mitterrand (2/2), de la Résistance à la Présidence
François Mitterrand entame un «règne» de 14 ans, comparable par sa durée à celui de Henri IV, de Louis-Philippe ou encore de... Napoléon 1er. Sa présidence s'ouvre sur une fête à la Bastille et une cérémonie au Panthéon, dans l'euphorie de la première victoire de la gauche après 23 ans d'opposition. Le premier gouvernement, dirigé par Pierre Mauroy, maire de Lille, rompt résolument avec la politique de rigueur de Raymond Barre, Premier ministre de 1976-1981. Il renoue avec la politique volontariste de Jacques Chirac (1974-1976) : embauches dans la fonction publique, nationalisations, contrôle des changes...
Le ministre de la Justice, Robert Badinter, abolit la peine de mort et met la France au diapason de l'Europe. A l'étranger, après un discours tiers-mondiste à Cancun, au Mexique, François Mitterrand s'engage résolument aux côtés des Occidentaux contre l'URSS, qui prétend pointer des missiles SS20 vers l'Europe occidentale.
Il prend aussi parti pour Saddam Hussein, dans le conflit qui l'oppose à l'Iran, d'où une vague d'attentats organisés en sous-mains par les services secrets iraniens. Très vite, l'économie montre des signes de faiblesse. Le président change alors de cap et confie le gouvernement à Laurent Fabius (34 ans), plus jeune Premier ministre depuis Decaze, sous le règne de Louis XVIII : privatisations d'entreprises publiques, abrogation de l'«échelle mobile» des salaires (les salaires ne sont plus indexés sur l'inflation).
La progression du chômage et des inégalités sociales entraîne un retournement de l'opinion. L'impopularité de la gauche atteint des sommets. A la veille des élections législatives de 1986, les affiches du parti socialiste avertissent : «Au secours, la droite revient !» Comme prévu, les nouvelles élections ramènent la droite au gouvernement et Jacques Chirac, chef de l'opposition, devient le Premier ministre de François Mitterrand. C'est la première cohabitation de la Ve République entre un président et un Premier ministre de bords opposés.
Les maladresses de Jacques Chirac entraînent deux ans plus tard la réélection triomphale de François Mitterrand. Sous la pression de l'opinion, le président appelle son ennemi intime, Michel Rocard, à la tête du gouvernement. En 3 ans, celui-ci pacifie la Nouvelle-Calédonie. Il instaure la CSG, un impôt sur l'ensemble des revenus, et le RMI, une allocation de survie destinée aux victimes de la crise rampante des années 80. C'est ensuite le bref gouvernement d'Édith Cresson puis celui du technicien Pierre Bérégovoy. En 1993, première année de récession depuis la fin de la guerre, c'est le retour de la droite avec cette fois Édouard Balladur à la tête du gouvernement.
Ce deuxième septennat est marqué par la réorientation du projet européen vers des objectifs économiques : marché unique des marchandises et des capitaux, monnaie unique. Il est surtout affecté par des bouleversements géopolitiques (chute du mur de Berlin, guerres en Yougoslavie) et l'effondrement de l'Afrique post-coloniale (génocide au Rwanda). La présidence de François Mitterrand se termine dans un climat maussade tissé de désillusions.
Élu en mai 1981 à 64 ans, François Mitterrand se rend dès l'automne suivant à Cancun, au Mexique, pour un sommet planétaire. Au retour, il se plaint de violentes douleurs lombaires et les médecins diagnostiquent un cancer de la prostate avec des métastases. Espérance de vie : un an.
Le président serre les dents et se jure de tenir jusqu'à la fin de son mandat, voire d'un second. Il fait en sorte de garder le secret sur son mal, quitte à maquiller les certificats médicaux semestriels qu'il s'est engagé à publier. Il fait appel pour cela à un généraliste qui a soigné sa fille adultérine Mazarine Pingeot et dont il a apprécié l'efficacité et la discrétion, le docteur Gubler.
Ce dernier suivra désormais le président dans tous ses déplacements et lui appliquera le traitement prescrit par les urologues. Les proches du président et l'opinion publique ne seront informés de la maladie qu'à la fin de 1992, après le référendum sur le traité de Maastricht. Dans les derniers mois de son mandat, le président, gravement malade, n'a plus que quelques rares heures de lucidité par jour et il lui arrive de commettre des bourdes en public, comme de confondre un pays avec un autre. A gauche comme à droite, son départ est accueilli avec soulagement.


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