Chaplin aimait beaucoup sa mère. Il raconte dans sa biographie qu'un soir, Hannah perdit la voix alors qu'elle chantait. Le public la hua et Charlie voyant cela, décida de prendre la relève. Il n'avait que 5 ans et ce fut pour lui sa première prestation et pour sa mère, la dernière. Se retrouvant donc sans ressources seule avec ses deux enfants (Charlie et Sydney) en plus d'une santé déclinante, «elle fut admise au dispensaire en juin 1894 et ses deux enfants furent confiés à l'Assistance publique, qui les plaça à l'école de Hanwell... ». Plus tard, alors que Chaplin sera sous le signe de la gloire, elle viendra habiter près de chez lui dans la région californienne et elle y restera jusqu'à sa mort le 28 août 1928.
Hannah eut trois fils mais de pères différents. Le plus vieux, Sydney, dont on ignore le nom de son père biologique, et Charlie (le deuxième) ont vécu ensemble à peu près les mêmes événements: l'école Hanwell, déménagent souvent, commencent à travailler jeunes et la troupe de théâtre de Fred Karno. Né le 6 août 1885, Sydney deviendra plus tard "le bras droit" ou conseiller de son jeune frère. Le troisième fils d'Hannah ne vivra pas parmi eux. Six mois après sa naissance, Wheeler Dryden né le 31 août 1892, fut enlevé par son père. En 1917, cependant, il deviendra un employé permanent du studio de Chaplin. Quand Hannah perdit son emploi, il fut contraint d'accepter son sort, même s'il éprouvait de la honte d'aller à l'hospice et ce malgré son jeune âge. Ce fut pour lui toute une épreuve que de quitter sa mère.
Quelques semaines après l'hospice, il fut transféré à l'école de Hanwell pour les orphelins et enfants abandonnés. Il y restera environ un an avant que sa mère revienne le chercher lui et Sydney. Il continua tout de même ses études jusqu'à ce qu'il rentre dans une troupe de danseurs à claquettes : Les Huits Gars du Lancashire. Il y restera pendant quelque temps. Plus tard, sa mère retourna à l'hospice, laissant son fils seul alors que Sydney s'était engagé dans la marine. Il a fallu qu'il se débrouille seul pour subvenir à ses besoins.
En 1908, il signe un contrat avec Fred Karno pour être dans sa troupe de théâtre. C'est grâce à son frère si celui-ci s'engage. Après plusieurs emplois et plusieurs troupes de théâtre que Chaplin a faits, Fred Karno, qui était un nom connu au-delà des frontières de l'Angleterre, lui donne l'occasion de se faire connaître. Et ce jeune homme de 19 ans devint une vedette. Il a joué dans plusieurs sketchs et pièces de théâtre. Après une première tournée aux États-Unis, il s'y installa en 1912. Chaplin apparut pour la première fois à l'écran en 1913 dans une production de la Keystone Film Company sous la direction de Mack Sennett. Il crée le personnage mondialement célèbre de Charlot dans le film Charlot est content de lui (Kid Auto Races at Venice, 1914) de Henry Lehrman.
Très vite, il devint lui-même réalisateur et, reprenant le personnage de Charlot, il le mit en scène dans plus de 70 films parmi lesquels le Vagabond (The Tramp, 1915). Successivement associé à diverses sociétés de production (la Essanay Film Company, la Mutual Film Company et la First National Film Company), il finit par créer son propre studio à Hollywood, en 1918. Chaplin développa progressivement son personnage, passant du stéréotype enjoué et bouffon à un personnage de plus en plus complexe qui, tout en restant comique, prit une dimension mélodramatique. En 1919, il fonda avec D.W. Griffith, Douglas Fairbanks et Mary Pickford, la société de production United Artists Corporation, et en fut membre jusqu'en 1952. Parmi ses très nombreux films, on peut citer le Gosse (The Kid, 1921), le Pèlerin (The Pilgrim, 1923), la Ruée vers l'or (The Gold Rush, 1925), le Cirque (The Circus, 1928), les Lumières de la ville (City Lights, 1931), les Temps modernes (Modern Times, 1936), le Dictateur (The Great Dictator, 1940), Monsieur Verdoux (1947), Limelight (1952) et Un roi à New York (A King in New York, 1957). Son dernier film, la Comtesse de Hong Kong (A Countess from Hong Kong, 1967), en couleurs, reste très peu connu. Il composa en outre la musique de la plupart de ses films.
Chaplin affina constamment son jeu d'acteur en s'inspirant du mime et du clown, alliant une grâce acrobatique, des gestes expressifs et une grande éloquence faciale. Son rôle de Charlot, symbole de l'individualité triomphante contre l'adversité et la persécution, a fait de lui une sorte de tragi-comédien. L'avènement du cinéma parlant allait à l'encontre de son style, de l'efficacité de la pantomime dont dépendait son imagination créative. Il ne produisit que peu de parlant.
Ses films prirent peu à peu une dimension politique ! Encore absente des Lumières de la ville, elle fut manifeste dans les Temps modernes où il fait une description virulente du travail à la chaîne. Dans ces deux premiers parlants, Charlot reste cependant silencieux. Abandonnant par la suite le personnage du vagabond, il endossa des rôles différents. Marquant cette transition, le Dictateur, véritable pamphlet anti-hitlérien, utilise toutes les ressources du parlant. Chaplin traita ses sujets en mélangeant satire et pathétique, et en révélant un amour de l'humanité et de liberté individuelle.
En 1947, Chaplin fut accusé de sympathies communistes par la Commission des activités anti-américaines. L'hostilité à son égard ne désarma pas et, en 1952, il quitta les États-Unis pour l'Europe. Un roi à New York, tourné en Grande-Bretagne en 1957, contient une violente condamnation de l'obscurantisme du maccarthysme. Installé en Suisse, il ne retournera qu'une seule fois aux États-Unis pour y recevoir un oscar récompensant sa contribution à l'industrie cinématographique. Il fut anobli par la reine d'Angleterre en 1975. Il mourut le 25 décembre 1977, à Corsier-sur-Vevey, en Suisse.