L'interprète de Rocky et de Rambo est la troisième star de Hollywood à s'aventurer dans la banlieue parisienne cette année, après John Travolta en février et Samuel L. Jackson en avril.
Ce dernier avait raconté à un auditoire attentif son enfance, en tant que Noir dans l'Amérique de la ségrégation raciale. A ses côtés figurait l'homme qui l'avait invité en France, l'ancien producteur de Hollywood Charles Rivkin, ambassadeur des Etats-Unis en France.
Cette visite, contrairement à celles de Stallone ou Travolta, ne s'inscrivait pas dans la promotion d'un film. Elle entrait dans le cadre d'une politique de l'ambassade américaine, destinée à créer des réseaux dans ces banlieues, à travers des projets artistiques, des débats et des programmes d'échange.
Cet intérêt de l'Amérique d'Obama pour ces quartiers, qui s'étaient embrasés à l'automne 2005 dans de violentes émeutes, contraste avec une image parfois caricaturale qui colle aux banlieues françaises: chômage, pauvreté, délinquance, et difficultés d'intégration des immigrés d'Afrique et du Maghreb.
Les montées de fièvre y sont fréquentes. Des violences, cet été, dans une banlieue de Grenoble (centre-est) ont poussé le président Nicolas Sarkozy à prononcer une déclaration de "guerre contre la criminalité".
"Je trouve que c'est valorisant pour les gens de voir ces stars de Hollywood se déplacer dans des territoires qui sont fustigés par les politiques", estime Rokhaya Diallo, 32 ans, responsable d'une organisation anti-raciste, commentant la visite de Sylvester Stallone à Rosny-sous-Bois, au nord de Paris.
"C'est cela qui est dommage, d'un côté on a des gens qui parlent de racailles et de nettoyage au Kõrcher (nettoyeur à haute pression), et de l'autre côté il y a des gens qui font venir des stars", ajoute-t-elle, en référence à de célèbres déclarations de Nicolas Sarkozy en 2005 après la mort d'un enfant tué par une balle perdue au nord de Paris.
"Les Etats-Unis ont une expérience importante dans tout ce qui est intégration sociale. C'est un problème sur lequel ils ont déjà réfléchi et travaillé", commente prudemment une porte-parole du ministère français de la Ville.
"Ils ont compris que dans nos quartiers nous avons des compétences... Ces jeunes font la France de demain. Il y a aussi une forte envie de changer l'image des Etats-Unis, qui n'a pas toujours été très bonne", ajoute-t-elle.
Pour la droite au pouvoir, la résolution de la crise des banlieues passe d'abord par un nouveau tour de vis sécuritaire.
"Nous subissons les conséquences de 50 années d'immigration insuffisamment régulées qui ont abouti à un échec de l'intégration", a affirmé le 30 juillet Nicolas Sarkozy, après les violences de Grenoble. Et il a menacé de retirer la nationalité française à certains criminels d'origine étrangère.
"Tout ce discours sécuritaire autour des banlieues handicape l'économie française. Il y a des énergies formidables en banlieue qui pourraient faire sortir la société française de pas mal des soucis qu'elle a actuellement", estime Nordine Nabili, responsable d'une formation de journalisme en banlieue.
Mais pour Nacim Ben Younes, étudiant près de Paris, même la visite de Samuel L. Jackson laisse un goût amer.
"En tant que jeune de banlieue, il est facile de s'identifier à ces personnalités. Mais ni Samuel Jackson, ni Sylvester Stallone ne peuvent apporter les opportunités qui manquent cruellement aux jeunes de banlieues qui souhaitent entreprendre des carrières artistiques", regrette-t-il.