Les séropositifs lourdement discriminés au Maroc

Refus de soins, licenciements et difficultés d’accès à une aide juridique appropriée, relevés par le CNDH


Hassan Bentaleb
Vendredi 26 Février 2016

La stigmatisation et la discrimination des personnes porteuses de VIH demeurent une réalité au Maroc. Malgré la mise en place  d’un arsenal  juridique national comportant un ensemble de dispositions protectrices des droits applicables aux séropositifs, nombreux sont les cas et les pratiques discriminatoires qui ont été identifiés en milieu institutionnel.
Selon une étude réalisée par le CNDH avec l’appui de l’ONUSIDA et le Fonds mondial et présentée hier à Rabat lors d’un atelier sur la revue de l’environnement législatif et réglementaire lié au VIH/sida au Maroc, plusieurs porteurs de VIH se sont vu refuser des soins notamment en médecine dentaire et en chirurgie. En milieu du travail, ces personnes se plaignent de licenciements en raison de leur statut sérologique. La confidentialité de ce statut a été dans de nombreux cas violée. Une violation constatée également en d’autres milieux (hôpitaux et prisons). Une situation des plus contraignantes puisque plusieurs porteurs de VIH ont des difficultés d’accès à une aide juridique appropriée et pour prouver les discriminations dont ils ont fait l’objet. Ceci d’autant plus que la norme juridique en matière de discrimination n’a pas explicitement inclus le VIH. En fait, ni  le Code du travail ni le Code pénal ne le déclinent comme motif de discrimination.
Mais il n’y a pas que les porteurs de ce rétrovirus (PPVIH) qui sont victimes, les personnes les plus exposées au risque d’infection par le VIH (PPER) font également l’objet de stigmatisation sociale et juridique. En effet, le Code pénal punit sévèrement les comportements de cette dernière catégorie en cas d’homosexualité, de relations sexuelles hors mariage, de prostitution et de toxicomanie.   
Une situation qui a des effets négatifs sur la lutte contre le sida puisque cette population, par crainte de subir les rigueurs de la loi,  préfère se cacher et ne pas accéder aux services de prévention et de prise en charge. Les professionnelles du sexe se plaignent, pour leur part, de la violence  sur les lieux  de fréquentation et les homosexuels vivent en communautés fermées sur elles-mêmes et ne font donc pas assez de démarches pour se faire dépister. Quant aux usagers des drogues injectables interpellés, ils ne font pas régulièrement l’objet d’une injonction thérapeutique du fait de l’insuffisance de centres de soins.
L’absence de juridiction relative à la criminalisation de la transmission du VIH a été également pointée du doigt. Au Maroc, il n’existe dans le Code pénal aucune disposition réprimant le délit de transmission ou d’exposition au VIH. Les annales de la jurisprudence pénale ne contiennent pas non plus de décisions en la matière. La seule affaire où il y a eu des poursuites contre une PPVIH pour exposition de ses partenaires au risque, a été soumise au tribunal de 1er instance de Tanger sur le fondement de voies de faits avec préméditation, prévus par l’article 400 du Code pénal. Le tribunal n’a pas retenu ce délit, au motif que la femme poursuivie avait, avant ses rapports sexuels, dévoilé sa séropositivité à chacun de ses partenaires. Cette décision fait de l’acceptation du risque de contamination par le partenaire, une raison d’échapper à l’inculpation.


 


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