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Coup de colère ou décision réfléchie ? Les questions se bousculent et la diplomatie marocaine longtemps accusée de léthargie se voit aujourd'hui reprocher son élan offensif. «Non, la diplomatie marocaine n'est pas une affaire d'état d'âme», se défend ce haut responsable, en référence à peine voilée au député PJD Ramid qui n'a pas hésité à fustiger la décision marocaine.
Que s'est-il vraiment passé pour que le Royaume chérifien décide donc de rompre ses relations diplomatiques avec la République islamique et de fermer son ambassade à Téhéran, où officiait jusqu'à sa récente nomination au Brésil, l'Istiqlalien Mohamed El Ouafa ?
Un sentiment de « hogra »
Les faits d'abord. Des cercles iraniens ont jeté un pavé dans la mare d'un monde arabe, déjà bien à mal, en s'attaquant à l'intégrité territoriale de Bahrein. La réaction est immédiate. Les pays arabes mais aussi occidentaux comme la Russie par exemple, expriment, chacun à sa manière, leur condamnation des propos iraniens et leur solidarité avec Manama. Dans ce concert sur le mode de refus de déclarations belliqueuses, le Maroc fait, naturellement, spontanément entendre sa voix. Ce sera une missive écrite du Souverain adressée au Prince de Bahrein. Rabat y a choisi la solidarité avec Bahrein plus que la critique des propos iraniens. Jusqu'au bout, Rabat est dans la défense des principes, se gardant d'accuser un quelconque dirigeant iranien, et réitérant sa solidarité avec un pays dont l'intégrité territoriale a été menacée par un Etat voisin.
La réaction de Téhéran ne se fait pas attendre. Le chargé d'affaires de l'ambassade du Maroc à Téhéran est officiellement convoqué au ministère iranien des Affaires étrangères. Rabat est sommé de s'expliquer et la lettre royale est, dans la foulée, qualifiée d'erreur. Un communiqué du ministère des Affaires étrangères est rendu public. Il reprend exactement les mêmes propos qui ont été tenus au diplomate marocain. « Tous les pays arabes, musulmans ou non, se sont exprimés sur cette affaire. Les Russes, les Turcs n'ont pas manqué de le faire. Il y a eu même des échanges de visites à ce même sujet. Seul le Maroc est pris à partie par les Iraniens, un peu comme s'il était le maillon faible de la chaîne. Personne n'arrivait alors à comprendre les raisons pour lesquelles le Maroc était le seul visé », commente un diplomate qui n'est pas prêt d'oublier cette folle semaine.
L'incompréhension est totale. Rabat attend à son tour des explications. L'ambassadeur iranien à Rabat est convoqué au ministère des Affaires étrangères. Au fil des jours, la tension monte, alors que les Iraniens ont choisi la posture de la sourde oreille face aux demandes d'explication marocaines. « La revendication des Marocains était somme toute naturelle. Comprendre pourquoi le Maroc a fait figure d'exception en se faisant sèchement et très officiellement reprocher sa solidarité avec le Bahrein. C'est vrai qu'à ce moment-là, un sentiment de hogra, d'humiliation, d'atteinte à la dignité s'est installé à tous les étages », confie une source proche des Affaires étrangères.
Aucun lien avec le Sahara
Pour exprimer son mécontentement face à la « hogra », Rabat finit par convoquer son chargé d'affaires pour consultations. Le délai est fixé à sept jours, ce qui montre bien la volonté des autorités marocaines de ne pas envenimer la situation. A Téhéran, au même moment, on feint d'ignorer l'indignation marocaine. Au bout de sept jours, de guerre lasse, et parce que toutes les options avaient été épuisées, Rabat décide de rompre ses relations avec l'Iran. C'est la deuxième fois dans l'histoire des relations entre les deux pays que cela se produit : entre 1979 et 1991, le Maroc avait fermé son ambassade en Iran.
Au pays des Ayatollah la machine à propagande se met en marche, histoire de mieux noyer le poisson. Le Maroc est de nouveau mis en accusation. Le pays est traité d'agent sioniste, prompt à servir les intérêts des ennemis de la cause palestinienne.
« Les autorités marocaines ont depuis le début de cette affaire agi dans la progressivité. Les faits sont là. Il y a eu manquement de respect. Il est clair que la rupture des relations avec l'Iran n'était pas inscrite sur l'agenda marocain. Quant à la cause palestinienne, Téhéran n'en est ni le porte-parole ni le dépositaire », rétorque un diplomate.
Maintenant que la rupture est consommée, quelles peuvent en être les répercussions et comment la situation peut-elle évoluer ? Les autorités marocaines sont promptes à l'affirmer : l'affaire du Sahara n'a rien à voir avec la dégradation des relations entre le Maroc et l'Iran. Téhéran a adopté une position ambiguë dans ce dossier, en fermant la représentation de la RASD dans la capitale iranienne mais tout en maintenant une reconnaissance juridique de l'entité séparatiste. L'Iran va-t-elle aujourd'hui renforcer son soutien au polisario ? « Ils ne feront pas davantage qu'Alger, alors…. Il y a des fondamentaux dont on ne saurait se départir, même s'il y a le Sahara », soutient notre interlocuteur.
Autre répercussion, une réponse sécuritaire risque très fortement d'être donnée à l'activisme chiite au Maroc. Jusque-là «toléré », au nom du respect mutuel entre deux pays, l'élargissement du chiisme en terre marocaine, dont l'ambassade d'Iran à Rabat servait de plateforme, sera placé sous haute surveillance. La mise en garde a le mérite d'être claire. Le chiisme comme seul représentant du monde musulman, cette ambition toute iranienne, ne passera pas par Rabat.