Les autorités locales favorisent l’anarchie à Casablanca : Ces cafés qui grignotent l'espace public


Rida ADDAM
Lundi 15 Août 2011

Les autorités locales favorisent l’anarchie à Casablanca : Ces cafés qui grignotent l'espace public
Après les parkings sauvages et les marchands ambulants, voici venu le temps des cafés d’occuper illégalement l’espace public. En un mot : l’anarchie et le laxisme en matière de contrôle et de sanction des abus gagnent davantage de terrain devant le silence flagrant, qualifié de complicité, des autorités compétentes. Sur le tas, le tableau n’est pas beau à voir surtout que l’enjeu est de taille : des vies humaines sont menacées. Selon les statistiques, 10% des accidents proviennent quand les piétons quittent soudainement les trottoirs. Ce qui les expose à tous les dangers.
Qui en est vraiment responsable ? Personne ne peut trancher sans être aussitôt contredit. Et pourtant, le coupable est, en toute évidence, le laxisme qui favorise l’occupation de l’espace public réservé aux piétons. En prime des aspects immoraux et les multiples harcèlements que subissent les femmes qui osent se faufiler entre les tables des cafés, un autre phénomène est né. Il s’agit du stationnement en masse des grandes motos devant les terrasses des cafés et qui occupent le peu d’espace libre, souvent moins de 2 mètres.
Les personnes âgées, les handicapés, les femmes enceintes et les enfants demeurent les victimes essentielles de cet abus. Les chiffres le confirment : près de 58% de piétons victimes d’accidents de la circulation appartiennent à cette catégorie. Et pourtant, rien n’est fait pour leur restituer le droit au trottoir où poussent des terrasses de cafés sans le moindre contrôle. Reportage.
Hamid est un homme heureux. Ce promeneur assidu trouve tout le plaisir d’exercer son hobby favorable : la marche. Un exercice quotidien qu’il ne peut faire que la nuit, sauf pendant le mois sacré. Désormais, il profite de la fermeture des cafés avant la rupture du jeûne pour se promener sous les rayons du soleil qu’il admire. «Surtout que le chemin qu’il parcourt, le long du boulevard Zerktouni, n’est pas occupé par les marchands ambulants qui ne font pas le bonheur de mon collègue Said. Celui-ci habite au quartier Bourgogne peuplé par les étales des commerçants qui poussent comme des champignons puisque le wali du Grand Casablanca semble encourager l’occupation des espaces publics par les marchands ambulants.
C’est ce qu’il a, selon certains journaux de la place, ordonné aux gouverneurs et aux hauts responsables de la ville lors d’une récente réunion». Mohamed Halab, semble-t-il ne veut pas avoir d’immolation d’homme sur son territoire et préfère ne pas affronter ce fléau.
 Ce qui a encouragé les patrons de cafés à suivre les traces des autres occupants de l’espace public pour étendre, leurs terrasses dans tous les sens.
Pire, il y en a même ceux qui ont traversé la route pour installer des tables de l’autre côté. «Un acte illégal interdit par la loi, notamment par le Code la route dans ses articles 6, 13, 52 et 53 (voir encadré). Et pourtant, on est obligé de subir ces abus répétés », crie Said qui partage désormais le plaisir de la marche avec son collègue Hamid. Pour lui, «la fermeture des cafés le jour qui coïncide chaque année avec Ramadan nous permet ce luxe. Sinon on n’aurait jamais pu marcher le jour sans être exposé aux risques de la circulation puisque les trottoirs sont occupés». 
Il est 17h15. Ce quadragénaire se trouve obligé d’emprunter les ruelles qui échappent encore aux réseaux de marchands ambulants pour se rendre au boulevard Zerktouni à proximité du rond-point d’Europe. Une fois sur place, il stationne sa voiture au sous-sol de l’immeuble où habite son collègue Hamid. C’est d’ailleurs, leur point de repère pour entamer leur aventureuse marche quotidienne. Un exercice qu’ils ont l’habitude de pratiquer les soirs à partir de 23 heures à la fermeture de la majorité des cafés de ce boulevard plein de terrasses.
Le cas de ces deux copains n’est certes pas unique. Les milliers de piétons qui fréquentent, entre autres, ce boulevard dénoncent également cet abus, notamment en ce mois sacré. «Les cafés ont étendu leurs terrasses sans se soucier des piétons. Personnellement, je trouve du mal à me rendre chaque soir au cabinet de dentiste où je travaille. Les multiples harcèlements et les regards osés des clients me dégoûtent. Sans oublier bien évidemment les risques de la circulation et les agressions sur la route si l’on veut éviter les paroles et les agissements des clients», déplore cette infirmière.
Les  autorités doivent mettre un terme à cet abus», dit-elle. Un avis que partage l’ensemble des piétons interrogés sur l’occupation des espaces publics par les cafés, notamment aux boulevards Zerktouni, Anfa, Moulay Youssef, rue Qadi Iass… Le cas le plus spectaculaire est celui de ce célèbre café au Boulevard Zerktouni à proximité de la maison Jaguar qui a non seulement occupé la chaussée en dépassant les limites vitrées de sa terrasse, mais qui a recruté un gardien de voitures pour son parking sauvage qui occupe une grande partie dudit boulevard et des ruelles voisines. Pire, ce gardien de voitures illégal a développé son activité en créant sur place un autre parking réservé aux grosses motos. Une anarchie qui ne fait pas le bonheur des piétons, obligés de traverser une longue distance sur la route en se faufilant entre les voitures. Ce qui les expose aux dangers de la route. Selon des témoins sur place, plus de trois accidents ont lieu chaque soir devant ce fameux café dont le patron serait un élu alors que le gérant n’est autre qu’un commissaire de police retraité et qui travaille dans le business des cafés.
«Ce qui explique le silence des autorités compétentes face à ce phénomène  que déplorent les usagers dudit boulevard et les habitants de ce quartier qui n’ont plus d’accès à leur maison ni à leur garage car les voitures des clients de ce café occupent les entrées des ruelles et des parkings», déplore un habitant du quartier. Et d’ajouter : «Les nombreuses plaintes des habitants et même le taux élevé des accidents de la circulation dont la majorité des victimes sont des piétons n’ont suscité aucune initiative de la part des autorités compétentes. Même les agents de circulation n’appliquent pas le nouveau Code de la route qui réserve les trottoirs aux piétons ».
Dans d’autres parties de la ville, le décor est le même. Les abus des cafés s’ajoutent aux marchands ambulants et aux arbres plantés pêle-mêle sur les trottoirs. Face à cette situation, les piétons s’exposent toujours aux dangers en attendant des jours meilleurs.
 
 
Encadré
Le Code de la route réserve les trottoirs aux piétons
- Article 6 : Tout véhicule doit être maintenu à une distance suffisante du bord de la chaussée pour éviter tout accident aux usagers des trottoirs, refuges, contre allées et accotements.
- Article 13 : Lorsqu'une partie de la route a été aménagée spécialement en trottoir ou pistes en vue de circulations déterminées (pour piétons, cavaliers, cyclistes, etc.), il est interdit de l'utiliser pour d'autres modes de circulation.
- Article 52 : Par dérogation à l'article 13 ci-dessus, la circulation des cycles est admise sur les trottoirs à condition que les machines soient conduites à la main.
- Article 53 : Lorsque les trottoirs ou contre-allées sont aménagés spécialement pour l'usage des piétons le long de la voie publique, ceux-ci doivent s'y tenir, en cas d'impossibilité, ils ne doivent emprunter la chaussée qu'après s'être assurés qu'ils peuvent le faire sans danger.


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1.Posté par HAMDI LAHABIB le 15/08/2011 15:50
Toutes nos villes subissent le meme sort et c'est l'anarchie qui l'emporte,en attendant que l'Etat reprenne ses droits mais quand personne ne le sait. Avant les endroits destinés à la Joutia sont connus de tous ,malheureusement ces derniers temps tous nos quartiers sont envahis par une multitude de marchands bric - à - brac .y compris ceux qui vendent fruits,légumes et aussi poissons à ciel ouvert qui se permettent d'étaler leur butin sur la chaussée.J'ajoute à cela également,,les cafetiers ,les propriétaires de boutiques,les marchands de meubles qui ne se soucient guère des piétons sans défense et les poussent à s'aventurer sur la chaussée à leurs risques et périls. Seule l'application de la loi est de nature à remettre chacun sur le droit chemin.

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