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En témoigne l'initiative d'un collectif français « La journée sans immigrés : 24 heures sans nous » qui, comme son nom l'indique, a décidé de faire du 1e mars une date clé et une journée sans immigrés. L'objectif ? « Mettre en valeur l'apport de tous à la prospérité générale » c'est-à-dire montrer que les immigrés de première ou de seconde génération sont tout simplement indispensables au bon fonctionnement de la machine économique française. La date ? Un clin d'œil au 1e mars 2005 et à l'entrée en vigueur du « code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile » (CESEDA) plus connu sous le nom de « code des étrangers ». Ce dernier instaure le concept d'immigration choisie en fonction des besoins économiques français, une vision utilitariste rejetée par bon nombre de citoyens.
Les causes de l'initiative sont clairement exposées dans le manifeste du collectif disponible sur leur site Internet mais également sur le réseau social Facebook. « Nous, femmes et hommes, de toutes croyances, de tous bords politiques, et de toutes couleurs de peaux, immigrés, descendants d'immigrés, citoyens conscients de l'apport essentiel de l'immigration à notre pays, en avons assez des propos indignes tenus par certains responsables politiques visant à stigmatiser ou criminaliser les immigrés et leurs descendants».
Le collectif s'est ainsi constitué en septembre 2009, à la suite des propos de Brice Hortefeux, actuel ministre de l'Intérieur, qui avait déclaré à propos d'un jeune militant d'origine maghrébine : « Quand il y en a un ça va, c'est quand il y en a beaucoup que ça pose problème ». Consternés par l'absence d'une condamnation proportionnelle à la déclaration d'Hortefeux, des citoyens « lambda » décident de se constituer en collectif, dans une volonté de marquer leur désapprobation quant au glissement opéré par beaucoup de politiques jetant constamment l'opprobre sur les immigrés.
En témoignent les nombreux débats actuels. Le plus controversé d'entre eux est certainement celui sur « l'identité nationale » et son lot de propos douteux, à l'instar d'un maire qui a déclaré à la presse : « On va se faire bouffer, ils sont déjà 10 millions» en parlant des immigrés français. Sans parler de la méconnaissance de cet élu local en la matière, le plus déplorable est encore et toujours cette vieille peur de l'envahisseur renforcée un peu plus en temps de crise et la fausse idée de l'immigré opportuniste désireux de profiter des aides sociales françaises.
Le manifeste du collectif est explicite sur ce sujet : il stipule le refus « des stéréotypes véhiculés qui menacent la cohésion sociale » et rejette également « la négation des apports passés, présents et futurs de l'immigration » Selon une enquête menée récemment pour nos confrères de France Info et de « 20 minutes », près de 63,1% des Français jugent le débat sur l'identité nationale peu constructif et nombreux d'entre eux déplorent la stigmatisation des populations immigrées.
Fort de l'engouement suscité, notamment sur Facebook avec près de 59.000 personnes membres du « groupe », le collectif appelle tous les citoyens se sentant concernés par cette cause à ne pas participer à la vie économique dans les entreprises, dans le secteur public (écoles, hôpitaux, administrations..) mais également dans les médias et sur la scène politique. Le collectif a même été jusqu'à envoyer une lettre au Président Sarkozy, qui en tant que fils d'immigrés hongrois est invité à « ne pas travailler et ne pas consommer ce jour-là». Néanmoins conscients des difficultés que représente l'organisation d'une telle journée, le collectif « La journée sans immigrés : 24h sans nous » a déjà entamé des négociations avec les instances syndicales tout en se revendiquant apolitique.
Concrètement, le mouvement s'organise. Le 31 janvier dernier a eu lieu à Paris un concert de soutien tandis qu'en province on se prépare à des rassemblements çà et là. L'initiative a même séduit d'autres pays européens, tels que l'Italie, où un collectif similaire s'est mis en place. Rappelons que les dérives racistes tendent à devenir chose courante dans ce pays, où les immigrés deviennent la cible d'attaques toujours plus violentes. Le manifeste italien souligne à cet égard que la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme énonce le principe du droit à l'immigration et qu'en aucun cas ce dernier ne doit être bafoué. Des manifestations similaires à celles de France auront lieu tout au long de cette journée si particulière.
Cet appel citoyen n'est pas sans rappeler les principes de la désobéissance civile théorisée par Thoreau en 1849 et utilisée à de nombreuses reprises au cours de l'histoire, notamment dans la lutte contre l'apartheid aux Etats-Unis et en Afrique du Sud, ainsi que par Gandhi lors de sa résistance pacifique contre l'empire britannique.
Une chose est sûre : les membres du collectif « La journée sans immigrés : 24 heures sans nous » ont bel et bien compris qu'actionner le levier économique c'est toucher précisément la corde sensible. En 2004, l'INSEE avançait les chiffres de 5 millions d'immigrés vivant sur le territoire français. On estime aujourd'hui que ce sont près d'un million de nos ressortissants qui y résident.
Imaginons un seul instant les entreprises sans une partie de leurs salariés, les restaurants sans certains de leurs chefs et de leurs employés, les métros peu remplis, les écoles privées d'une part de leurs élèves et de leurs professeurs, et finissons par comprendre que la France sans immigrés et sans descendants d'immigrés, c'est une France amputée d'une partie de son identité…