Le projet Maroc solaire : Les interrogations d'un expert


Narjis Rerhaye
Jeudi 12 Novembre 2009

Le projet Maroc solaire : Les interrogations d'un expert
Depuis que le projet Maroc solaire a été rendu public en grande pompe, Abdelaziz Bennouna n'en finit pas de se poser des questions. Cet expert en énergies renouvelables, auteur de « Vers un Maroc exportateur d'énergie » publié  en 1994, et d'une « Introduction à l'énergie » paru en 2008  défend depuis des décennies la même thèse : que le Maroc bouge ou pas, que le pays le veuille ou pas, le gisement solaire impose son utilisation. L'humanité, explique-t-il, n'a pas le choix surtout lorsque l'on sait que la ressource fossile est épuisable et le nucléaire dangereux. Reste alors le renouvelable et toutes ses promesses. Problème, le projet Maroc solaire a-t-il volontairement freiné ses ambitions. « Il faut savoir qu'à fin 2008 un pays non ensoleillé comme l'Allemagne a une puissance solaire installée de 3500 mégawats. La puissance prévue pour le Maroc est de 2000. Ce qui est à mon sens peu au vu des potentialités», fait remarquer celui qui a mené, en octobre 1989, une étude sur le thème « Le Maroc solaire, complexe de recherche et d'industrie prospective » sous l'égide du Centre national pour la recherche scientifique et technique, à l'époque Centre national de coordination et de planification de la recherche scientifique et technique.
Le projet Maroc solaire a prévu la mobilisation de 10.000 hectares, soit 100 km2  dans le cadre de la puissance solaire prévue de 2000 mégawats. « Techniquement, cela ne concorde pas car en moyenne on installe 50 mégawats/km2. Faites vos comptes, cela signifie que les 2000 mégawats envisagés nécessitent 40 km2. Que va-t-on faire des 60 km2 restants? Pense-t-on à des extensions ? Un système de stockage est-il prévu ? Va-t-on construire des centrales avec stock, c'est-à-dire qui continueront de fonctionner même après le coucher du soleil grâce justement au système du stockage solaire ?  Les questions se bousculent. Les officiels n'en ont pour le moment soufflé mot…
En faisant le pari de l'énergie renouvelable, le Maroc entend faire de sérieuses économies et surtout réduire sa dépendance énergétique.  « A condition qu'il y ait un transfert de technologies. Si on veut réduire les coûts de la dépendance, il s'agit aussi et surtout de réduire la part des importations des équipements à la production de l'énergie renouvelable. Autrement dit, il est aujourd'hui important d'entamer une vraie réflexion sur la production en interne des équipements. Y a-t-il dans ce sens un programme national pour acquérir le savoir-faire technologique ? Et que sera-t-il fait pour encourager l'investisseur marocain pour qu'il se lance dans ce domaine précisément ? », se demande Abdelaziz Bennouna avant de rappeler que si les mâts des éoliennes sont aujourd'hui produits en terre marocaine, il serait judicieux d'augmenter la part marocaine de cette industrie en produisant les ailes et les générateurs. « Des éoliennes marocaines sont possibles à hauteur de 70% », avance cet ancien enseignant chercheur formé en Allemagne.
Cet expert se met à rêver d'un Maghreb de l'énergie, un Maghreb uni autour d'un même projet industriel. « Quels obstacles empêcheraient l'acier de Zouirat de venir vers le Maroc à l'état brut ? ». L'homme n'est pas un incorrigible utopique. Il sait de quoi il parle puisqu'il a participé à la préparation des études de base « Desertec », consacrées aux « perspectives d'énergie solaire dans la région EU-MENA » et dont les conclusions ont été présentées en novembre 2007 devant le Parlement européen.
Alors que le projet Maroc solaire offre de belles perspectives d'avenir, les convictions  d'Abdelaziz Bennouna restent intactes. A partir de 2015, toute nouvelle centrale devrait être renouvelable, qu'elle soit thermique ou solaire. « En parallèle, il est essentiel que le Maroc développe le système de stockage du solaire », conclut notre interlocuteur.



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