Le programme socioéconomique de l’USFP exposé au patronat : Accélérer l’avènement d’une économie plus compétitive, basée sur des rapports de confiance


Libé
Lundi 14 Novembre 2011

Le programme socioéconomique de l’USFP exposé au patronat : Accélérer l’avènement d’une économie plus compétitive, basée sur des rapports de confiance
A la veille de la campagne
électorale, l’USFP a été l’hôte de la Confédération générale économique du Maroc où il a exposé son programme socioéconomique et sa vision pour le décollage
de l’économie nationale.
Les représentants du patronat
national ont saisi l’occasion pour avoir des réponses sur les grands chantiers socioéconomiques
préconisés par le Parti de la rose,
à savoir la réforme fiscale,
la réforme du système de retraite,
la problématique de la Caisse de compensation et bien d’autres
problèmes aussi importants les uns que les autres.
Voici le texte intégral
de l’intervention que Habib El Malki, membre du Bureau politique de l’USFP, a faite en l’occasion :

A  la veille de chaque consultation électorale, la CGEM organise un premier tour avant le tour électoral proprement dit. C’est une bonne pratique qui consiste à échanger les points de vue des uns et des autres par rapport à des domaines très difficiles parce que de plus en plus incertains.
C’est la deuxième  peut-être la troisième fois que l’USFP présente auprès des opérateurs économiques les grandes lignes de son programme électoral. C’est une démarche qui revêt beaucoup d’importance et qui traduit un choix pour  une société que nous ambitionnons tous de construire ensemble. Sans le dialogue, il est très difficile de faire avancer la pensée économique.
Les amis présents sont ceux qui ont contribué fortement à l’élaboration de ce programme électoral. Vous en connaissez certainement quelques-uns.  Je vous présente tout d’abord Touria Tazi qui  est  de plus en plus concernée par tout ce qui a trait à la responsabilité sociale de l’entreprise à travers la problématique du développement durable. C’est une dimension très importante voire déterminante qui conditionnera le futur d’une relation avec le monde extérieur et notamment avec l’Union européenne. Salwa  Karkri Belkeziz, quant à elle, a apporté à l’USFP ces dernières années une fraîcheur à travers sa manière de travailler surtout dans un relationnel devenu mieux organisé. Driss Laraki, professeur d’économie, a une grande expérience de par son passage en particulier au ministère des Finances. Driss Yacoubi s’occupe du dossier social. Il a une expérience particulière dans ce domaine. Il a contribué à des dossiers difficiles mais jamais en première ligne. Hassan Boukentar est professeur des relations internationales à l’Université.
Notre programme électoral est basé sur une idée force qui consiste à dire que le Maroc accède à l’âge de la citoyenneté, c'est-à-dire qu’il accède à l’âge de la responsabilité. Autrement dit, à travers les dispositions de la nouvelle Constitution adoptée le 1er juillet dernier, à travers la nouvelle philosophie politique, économique et sociale, il y a un certain nombre d’idées déterminantes qui font que nous passons d’une certaine manière de ce qu’on peut appeler la tutelle à une citoyenneté pleine et entière. Ceci se traduit par ce que nous avons accumulé par le passé en termes d’acquis dans le domaine politique, économique, social et culturel. Et cette accumulation d’acquis fait que nous sommes arrivés à un stade de maturité. Pourquoi l’idée force ? Le fil conducteur de ce programme, c’est l’accès à l’âge de la citoyenneté parce que nous considérons que dans le cadre de nos préoccupations communes, deux facteurs comptent beaucoup. S’ils sont respectés et mis en œuvre, ils pourraient déclencher une nouvelle dynamique qui permettrait d’accélérer l’avènement d’une économie plus compétitive, plus forte basée sur des rapports de confiance. Il s’agit de la séparation des pouvoirs et de la garantie d’une concurrence saine et loyale. A travers les discussions par le passé avec des amis, des responsables de la CGEM, il ressort que l’une des préoccupations voire des angoisses partagées, c’est l’interférence entre le politique et l’économique. Et souvent cette confusion ne permet pas l’application saine des règles du jeu ni encore moins la visibilité à court et à moyen termes. La Constitution met l’accent de manière très forte sur ce qui nous paraît être une avancée importante, à savoir la séparation des pouvoirs. Cette autonomisation est l’une des conditions de cette nouvelle citoyenneté à laquelle nous aspirons tous. Ceci fait que le Maroc a véritablement réuni les conditions pour la mise en place d’une démocratie. Le deuxième facteur, c’est la garantie d’une concurrence saine et loyale. C’est l’une des recommandations historiques de la CGEM et bien entendu la nouvelle Constitution l’a mise en avant à travers de nouvelles attributions, un dispositif qui permet le respect des règles du jeu. Ce sont là les deux fondements de l’économie de marché. L’USFP considère que l’économie de marché est l’option qui permettra au Maroc de réussir son ouverture sur le monde et de pousser la croissance économique et sociale. Il va sans dire que l’économie de marché à travers la crise profonde que nous vivons et à travers les remises en cause continues nous incite à redéfinir les tâches entre l’Etat et le marché. Selon l’USFP, cette nouvelle redéfinition  tend à  rendre la régulation plus opérationnelle, plus multidimensionnelle afin que le marché ne commande pas la société. Si demain cela devait arriver, l’Etat dont nous avons tous besoin en termes de régulation se retrouvera dans le chaos que connaissent l’Europe et  les Etats-Unis.

Il faut penser à une
nouvelle génération de chantiers fortement
créateurs d’emplois


Toujours dans le cadre de la présentation du volet économique et social, rappelons un constat  que nous faisons tous, partis politiques, associations professionnelles, CGEM, à savoir que la croissance au Maroc reste moyennement faible 4,22 %  face à un potentiel d’investissement extrêmement important 32 % du PIB. C’est paradoxal. Pour l’USFP, il y a un problème de productivité de l’économie marocaine. Pour ce, deux raisons sont à relever. En premier lieu, le coût unitaire du facteur de travail reste très élevé comparativement à d’autres pays similaires. C’est pénalisant. Durant ces dix dernières années, la productivité travail a fortement baissé par rapport à la hausse des salaires. C’est un facteur objectif dont il faut tenir compte. En deuxième lieu, il faut noter qu’il y a un problème d’allocation de ressources. Cela signifie que les  grands chantiers qui ont été lancés ces dernières années se sont essoufflés. Il faut penser à une nouvelle génération de chantiers fortement créateurs d’emplois. Les chantiers lancés jusqu’ici n’ont pas réussi à maintenir le taux de chômage malgré une baisse chiffrée. Un point de moins par-ci par-là, mais un point de moins chez nous n’a pas grande signification comme dans les pays structurés.
Ceci nous conduit à présenter deux choix majeurs. Le premier est que le Maroc a besoin d’une bonne stratégie économique qui dépasse l’approche sectorielle. L’approche sectorielle est une condition nécessaire mais pas suffisante. On ne peut pas créer une dynamique de croissance globale à travers une approche sectorielle disparate. Il est temps pour le prochain gouvernement de mettre sur pied une nouvelle stratégie économique globale et cohérente. La cohérence est un élément essentiel à la visibilité. Cela permettra effectivement d’accélérer la tendance  à la hausse du taux de croissance. Le second choix est que le Maroc est un pays sous-industrialisé. Ceux qui suivent les statistiques  et qui manipulent les comptes nationaux notent que la part de l’industrie dans le PIB marocain n’a pas bougé depuis des années : 14 à 15 % en moyenne. Alors, soit que les comptes nationaux sont faux, soit qu’effectivement notre industrie piétine.
Il faut considérer l’industrialisation du Maroc comme une priorité durant les 4-5 prochaines années. Heureusement, nous disposons d’un pacte national dans ce domaine qui a  été lancé ces trois dernières années par l’un de nos camarades Ahmed Chami à travers l’identification d’un certain nombre de niches de métiers porteurs comme l’automobile, l’électronique, l’aéronautique. C’est un choix extrêmement important. Mais il ne faut pas avoir une approche commerciale de l’industrialisation, mais plutôt une approche industrielle autrement dit, il faut agir de telle manière que la valeur ajoutée, le taux d’intégration soit très important. Si l’industrialisation se réduit à une sorte de dynamique commerciale, le Maroc deviendrait une plateforme et jouerait le rôle d’intermédiaire. C’est un choix erroné. Une approche industrielle permet de doter le pays de moyens capables de créer des emplois stables et d’accélérer bien entendu le taux de croissance. C’est ainsi que le tissu des PME deviendra plus performant. Nos PME cherchent dans des conditions difficiles à percer de nouveaux horizons à travers l’exportation ou même le marché intérieur. Le développement de PME ne manque pas d’avoir des retombées sociales voire des effets structurants sur la société  marocaine. Les couches sociales moyennes sont plus élargies.

Il faut considérer
l’industrialisation du Maroc comme une
priorité durant les 4-5 prochaines années


L’administration ne peut plus fabriquer les couches sociales moyennes, seule l’industrialisation peut les développer. Même la structure, la mentalité, les valeurs portées par les nouvelles  couches sociales générées par l’industrialisation n’ont rien à voir avec celles générées par l’administration. Ce sont deux types sociologiques différents. Les bienfaits des retombées structurantes au sein de la société marocaine d’une option industrielle  sont très importants. Tout ceci doit nous inciter à rendre l’Etat marocain un Etat industriel et seules cette option et l’histoire du développement économique depuis deux siècles le montrent. Il n’existe pas d’autre voie que celle de l’industrialisation. Bien évidemment, on ne parle pas de l’industrialisation au sens des années cinquante ou même des années soixante. Il s’agit d’une nouvelle forme qui englobe également les services qui sont créateurs de valeur ajoutée. Tout ceci doit nous inciter à rendre l’Etat marocain un Etat industriel et non pas un Etat physiocrate si je puis m’exprimer ainsi. L’âge de la nouvelle citoyenneté, c’est l’âge de la modernité et par conséquent c’est l’industrialisation.

Il ne faut pas vendre
l’espoir pour trouver
le désespoir en fin de
parcours


Voilà de manière très rapide les grandes options contenues dans le programme électoral. Alors quels sont les moyens ? Nous sommes réalistes. Il ne faut pas vendre l’espoir pour trouver le désespoir en fin de parcours. Même si vendre l’espoir en politique est quelque chose de fondamental. Nous sommes des marchands de l’espoir mais sur des bases réalistes. Alors pour ce qui est des moyens, nous vous en suggérons trois de manière très rapide. Tout d’abord, le système bancaire marocain doit jouer un  rôle volontariste dans ce domaine. Il ne faut pas qu’il reste frileux, trop prudentiel face à une économie atone. Face aux besoins dans tous les domaines, il y a une crise de liquidités et les banques se comportent avec les entreprises comme elles se comporteraient avec les individus. Presque la même logique. Il faut que le système bancaire change de logique voire de comportement pour jouer un rôle plus volontariste dans le financement de cette nouvelle croissance. Ensuite, le deuxième moyen consiste en la poursuite de la réforme fiscale. Nous sommes pour des ajustements maîtrisés à la baisse des trois principaux taux : l’IS, l’IR et la TVA. Vous me direz, en période de crise,  de récession, de tarissement des recettes, c’est une approche qui est à contre-courant. La fiscalité doit  être un levier de croissance. On considère que si on desserre les taux, la pression fiscale se libère. Cela facilite les choix en termes de décision d’investissement et augmente la consommation. Il ne faut pas dans une période menacée par la récession prendre des mesures qui l’aggraveraient davantage. Il faut des anti-mesures si on peut s’exprimer ainsi. En tout cas, c’est l’approche du parti.
Mais face aux déficits sociaux et à tout ce qui se passe chez nous, il faut que la fiscalité soit émettrice d’un message de solidarité. Nous proposons une contribution exceptionnelle de solidarité limitée dans le temps. Comment et à partir de quel niveau ? Si on adopte le principe, nous verrons par la suite quelles sont les modalités de mise en œuvre pour respecter l’esprit de solidarité à travers une mesure  exceptionnelle et limitée dans le temps. C’est extrêmement important, même si le rendement financier de cette nouvelle contribution peut paraître insuffisant. La fiscalité, ce ne sont pas uniquement des recettes. La fiscalité dans des conditions exceptionnelles comme celles que nous traversons doit être porteuse d’un certain nombre de messages politiquement, socialement et économiquement. Un climat serein est incitatif à plus d’investissement alors qu’un climat lourd est plutôt décourageant. Et nous y tenons à travers cette manière de préciser ce qu’on entend par la contribution exceptionnelle de solidarité limitée dans le temps. Quant au troisième moyen, il a trait à des finances publiques responsables.
Ce concept signifie un déficit qui ne remet pas en cause la souveraineté nationale et la stabilité sociale et qui ne pénalise pas la croissance. Nous tenons à notre souveraineté nationale, c’est quelque chose de fondamental même dans un contexte mondialisé, mais en même temps il ne faut pas arriver au forceps à un équilibre  qui peut entraîner une véritable menace pour la stabilité sociale. D’autant plus que nous avons plusieurs leviers pour avancer vers ce qu’on a appelé les finances publiques responsables. Le premier levier, c’est la réduction de la dépense publique improductive et je peux vous assurer qu’il y a énormément de niches qu’on sous estime d’autant plus et c’est un point de vue personnel, la manière dont le déficit est évalué me paraît non crédible. Il s’avère nécessaire de proposer d’autres manières de calculer le déficit et de ne prendre en considération que les dépenses qui ne sont pas productives. Comment voulez-vous évaluer le déficit en prenant la totalité des dépenses aussi bien celles relatives à l’investissement et qui sont par définition des dépenses productives que les dépenses improductives ?  Si on révise le mode de calcul du déficit, cela nous donnerait des marges très importantes. Il ne faut pas calculer le déficit de manière comptable stricto sensu  avec deux colonnes portant sur les dépenses et les recettes. Recettes, oui mais quel type de dépenses ? Je crois que cette manière d’évaluer le déficit peut nous aider à ne pas dramatiser la situation. C’est ce qu’on appelle le déficit soutenable qui ne doit pas conduire au chaos ou à la remise en cause de la souveraineté nationale. Mais un déficit qui permet de mobiliser le potentiel de croissance.
Voilà le cadrage global de notre programme et comme vous l’avez constaté, c’est un peu le résultat de nos multiples contacts avec les opérateurs économiques, la CGEM comme partenaire institutionnel et aussi l’évolution de la pensée économique du Parti. A travers notre expérience au sein du gouvernement, nous avons déployé beaucoup d’efforts depuis une douzaine d’années afin de rendre l’entreprise un partenaire porteur de valeur voire un vecteur de progrès. Nous y croyons profondément.


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