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En plantant le décor, Abdellah Chenguiti, président de l’AGEF a indiqué que l’année 2015 a enregistré 265 grèves contre 289 en 2014 soit une baisse de 8,3% et que les journées de travail perdues se sont élevées à 267.656 contre 220.927 lors de l’année précédente soit une hausse de 21%.
Selon lui, les deux tiers des grèves déclenchées sont causées par des violations du Code du travail (retards dans le versement des salaires, non-paiement de ces derniers, non-respect des libertés syndicales, licenciements abusifs, remise en cause des acquis sociaux, non-respect des dispositions légales en matière de protection sociale…). Et de préciser que 66% des grèves ont été déclenchées dans des entreprises qui emploient moins de 250 salariés et que 41% des entreprises ont été touchées par des grèves en 2015.
Pourtant, il estime que le problème n’est pas dans la promulgation d’un texte de loi mais plutôt dans le contexte et qu’une loi sur le droit de grève ne constitue pas un vrai remède.
Des propos que partage Jamal Maatouk, professeur à la Faculté de droit Hassan 1er de Settat, qui pense que l’inexistence d’une loi organique sur le droit de grève n’a rien changé puisque les ouvriers marocains ont exercé ce droit en toute maturité et en évitant tout dérapage. «La classe ouvrière est assez mûre au Maroc. Il y avait des grèves raisonnables et réfléchies. Et il n’y avait pas de dérives dans l’histoire contemporaine du Maroc», a-t-il expliqué. Et d’ajouter qu’«un texte de loi est nécessaire du point de vue réglementaire et institutionnel, mais ce travail doit s’attaquer au fond et non à la forme. Des questions brûlantes s’imposent aujourd’hui au gouvernement comme aux syndicats et au patronat. Tout le monde veut savoir dans quelles conditions le droit de grève devra être exercé et quelles seront les droits qui seront garantis aux grévistes, aux non grévistes et aux employeurs».
L’intervenant estime qu’on ne peut pas parler de droit de grève sans parler d’éthique et de moralisation de ce droit. Pour lui, l’exercice de ce droit doit rimer avec le sens des responsabilités et la discipline.
De son côté, Khalil Bensami, membre du CESE, s’est interrogé sur l’utilité de promulguer une telle loi organique alors que nombre de lois ne sont pas opérationnelles au Maroc. « Pourquoi se triture-t-on les méninges avec ce texte alors que l’application des dispositions du Code du travail n’a guère dépassé le 1/3 ?», s’est-il demandé. Pour lui, les circonstances et les conditions subjectives et objectives actuelles ne militent pas en faveur de la promulgation de ce projet de loi, tout en estimant que le vrai problème est à chercher du côté des mentalités des acteurs politiques chargés de gérer la situation et en critiquant le texte proposé par la CGEM qu’il a considéré comme un texte rédigé par des personnes qui ne sont pas au fait des lois et réglementations sociales en vigueur.
Le conférencier a indiqué, par ailleurs, que le droit de grève a, dans l’imaginaire collectif, une connotation péjorative alors que ce droit est pratiqué, selon lui, en vue de réduire les inégalités sociales et d’instaurer une redistribution équitable des richesses générées par l’entreprise. « Les grévistes sont souvent pointés du doigt comme une cause de fuite des investisseurs nationaux et étrangers et de perte d’emplois. Mais cette fuite de capitaux est plutôt imputable à un environnement administratif et économique qui n’est pas propice à l’investissement et à la croissance, ainsi qu’à la concurrence déloyale du secteur informel et aux entraves à la liberté d’initiative», a-t-il soutenu.
Même son de cloche de la part de Hassan Alaoui, secrétaire national de l’UMT qui pense que le droit de grève ne constitue pas une déclaration de guerre mais plutôt un droit fondamental. Pour lui, ce droit est intimement lié à la liberté syndicale et l’un ne peut s’exercer sans l’autre.
Evoquant le débat sur la loi organique en question, il pense que celle-ci doit encadrer et organiser le droit de grève et non pas le réglementer. Cette dernière posture risquerait, selon lui, de le faire entrer dans une logique restrictive.
Cette loi verra-t-elle le jour ou pas ? « Le processus législatif est long au Maroc. Notamment en matière de législation sociale. Laquelle est régie par certaines coutumes et usages enracinés depuis des lustres. Ceci d’autant plus que la législation sociale a toujours été le fruit d’un consensus entre les partenaires sociaux et toute démarche qui irait à contre-courant de ce schéma pourrait se heurter à des résistances comme c’est le cas aujourd’hui avec le forcing entrepris par le gouvernement actuel qui tente de faire passer la loi relative à la réforme des retraites sans le consentement des autres partenaires sociaux», a précise Jamal Rhmani, ancien ministre de l'Emploi et de la Formation professionnelle. Et d’ajouter : «Mais l’Exécutif se trouve contraint de promulguer sa loi avant la fin de son mandat conformément à l’article 86 de la Loi suprême qui dispose que «les lois organiques prévues par la présente Constitution doivent avoir été soumises pour approbation au Parlement dans un délai n’excédant pas la durée de la première législature suivant la promulgation de ladite Constitution». Une disposition qui suscite les inquiétudes de Jamal Maatouk qui craint qu’il y ait eu précipitation dans l’élaboration de la loi organique relative à la grève. Ce qui pourrait se traduire par la mise dans le pipe législatif d’un texte incomplet et vidé de sa substance et qui pourrait, partant, faire l’objet d’amendements après sa promulgation comme ce fut le cas pour 90% des textes similaires.