Le contre-rapport de la FNPM relance la polémique sur les prix des médicaments : Les pharmaciens s’attaquent à l’étude du cabinet BCG


HASSAN ATAICHE
Samedi 12 Février 2011

La Fédération nationale des pharmaciens du Maroc a rédigé un rapport technique détaillé répondant aux données contenues dans le rapport réalisé par le bureau d’études Business consulting group (BCG) au sujet de la cherté des médicaments, données qui sont loin de traduire la réalité sur le terrain. De plus, cette étude BCG  ignore complètement la situation actuelle du secteur pharmaceutique dans le pays. La Fédération a non seulement mis sur pied ce rapport destiné aux professionnels, mais l’a mis à la disposition de la ministre de la Santé, Yasmina Baddou, lors de la rencontre tenue au siège du ministère le mercredi 9 février 2011 à Rabat.
Lors de cette réunion, le président de la FNSPM  a remis une copie du rapport qui réfute les allégations de l’étude concernant une amélioration du secteur pharmaceutique à l’horizon 2015, expliquant qu’au contraire toutes les pharmacies du Royaume vont connaître une baisse de leurs chiffres d’affaires de l’ordre de 22%. Cette lecture erronée de l’étude BCG a été fondée sur des indicateurs qui ne sont plus d’actualité, le taux de croissance du CA annuel d’une pharmacie augmente de 10%, par contre, ce taux ne dépasse pas actuellement chez certaines pharmacies « chanceuses» 1,2%.
L’étude omet de se baser sur le fait que le secteur pharmaceutique connaît une densification sans précédent (10.000) dont 30% vivent en état de faillite et 3000 pharmaciens connaissent un déséquilibre financier comme stipulé dans le contre-rapport établi par la FNSPM. Un rapport qui indique également que plusieurs pharmaciens sont derrière les barreaux et qu’un certain nombre d’entre eux sont  interdits de chéquiers bancaires, résultat du recul enregistré par l’activité.
Lors de son exposé en présence de la  ministre de la Santé, du secrétaire général  du ministère, du directeur de la direction du médicament et des membres du bureau fédéral, Kamal Belhaj a mis l’accent sur les contraintes qui pèsent sur le secteur pharmaceutique au Maroc, lesquelles ont entraîné une crise dans le secteur. Le président de la Fédération a parlé de la situation du secteur après l’effet du Benchmark, qui se traduit par la limitation du revenu moyen du pharmacien et qui est estimé à moins du salaire d’un fonctionnaire de l’échelle 8 (2508 DH d’après l’étude réalisée dans ce sens).
La consommation des médicaments au Maroc
La dépense de médicaments par habitant dans notre pays est très insuffisante. Elle est de l’ordre de 21$ per capita par an, soit 37% du panier de soins.
En Tunisie, elle est de  35$ (34% du pds), en Jordanie de  47$ (25% du pds), en Algérie de 55$ (50% du pds), en Turquie de 135$ (26% du pds) et en France de  517$ (17% du pds).
Mais bizarrement le Marocain consomme en moyenne 1000 DH/an en communications téléphoniques et 500 DH/an en cigarettes. Il faut dire que le panier de soins du Marocain est de 500 DH par an (autant que sa consommation en tabac), les médicaments y représentent 37% des dépenses. Ces chiffres d’après les pharmaciens attesteraient du fait que le prix n’est pas responsable de la modicité de consommation du médicament.
A titre comparatif, les Algériens ont une carte Chifa (tiers payant total), donc le médicament est à 0 dinar, et pourtant, nos voisins ne consomment que le double de notre pays.
Le panier de soins
Souvent, sur les feuilles de maladie, seuls les médicaments vont être remboursés, les malades s’étant adressés pour leurs prescriptions aux services de santé publique (services gratuits des dispensaires et hôpitaux).
Un très grand nombre de services de soins sont défaillants ou ne connaissent pas de remboursement (kinésithérapeute, soins infirmiers en ambulatoire, ambulance à domicile )…..etc.
80% des médicaments vendus en pharmacie le sont en automédication, ceci est dû principalement à l’absence du tiers payant et au grave déficit en prescripteurs de soins (200 mille médecins en France, contre 12 mille au Maroc) secteur public et privé confondus. Ces médicaments se retrouvent plus souvent prescrits sur des feuilles de maladie portant la mention de visite gratuite.
Le fait que les remboursements ne prennent pas en charge les réalités sus-citées, fait que le médicament prend une large part dans le panier de soins.
D’après le rapport de la FNSPM, le système d’assurance-maladie, est défaillant à tous les niveaux, budget de fonctionnement trop lourd, le double, voire le triple des assurances maladies des pays dits développés, l’exemple de la CNOPS est flagrant ; pour la MGPAP c’est carrément 55% des parts de cotisations qui vont directement au poste fonctionnement.
Huit mutuelles en plus de la CNOPS et de  la CNSS, pour in fine ne prendre partiellement  en charge qu’au mieux 15% de la population, tous nos voisins  européens ou maghrébins ont une seule caisse pour assurer l’ensemble de la population et les cotisations sont plafonnées.
Comment justifier le refus de prendre en charge une grande partie de la population crédible (professions libérales et indépendantes) ?
L’équilibre financier ne peut être l’objectif à atteindre pour l’ANAM, mais la  prise en charge efficiente du malade.
Kamal Belhaj a conclu son exposé en précisant qu’il est insensé de constater que le Maroc, engagé sur la voie de la baisse du prix du médicament, maintient toujours une taxe sur la valeur ajoutée sur les médicaments contrairement au reste des pays voisins.
Cet exposé s’est traduit par l’établissement d’un agenda de réunions qui seront tenues à partir de la semaine prochaine avec la ministre, et ce, pour approfondir le débat entre les deux parties.
Saisissant l’occasion d’une réunion tenue jeudi 10 févier 2011 au  siège de la wilaya de Fès, Abdelillah Fassi Fihri, président de la Chambre syndicale des pharmaciens de Fès, a lancé un appel pour que le secteur de la pharmacie à l’échelon local au même titre que national, bénéficie de tout l’intérêt qu’il mérite en tant que pilier du système de santé, rappelant qu’aucune politique du médicament et de proximité ne peut réussir en l’absence du pharmacien, ou de sa présence mais en situation de précarité.


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