Le Maroc pays d’émigration

Journée mondiale du migrant


Hassan Bentaleb
Mercredi 18 Décembre 2024

Le Maroc pays d’émigration
Les facteurs structurels à l’origine de cette dynamique demeurent non seulement présents mais se renforcent au fil du temps
Le Maroc joue un rôle clé dans la dynamique migratoire mondiale. Les chiffres de l'édition 2024 des Perspectives des migrations internationales, publiés dernièrement par l’OCDE, confirment la persistance du Royaume en tant que pays d’émigration et pourvoyeur de main-d’œuvre. 

Le Maroc figure à la 6ème place dans le classement des 20 premiers pays d’origine des nouveaux immigrés dans l’OCDE, 2021-22. Le Royaume occupe également la troisième place dans le podium d’acquisition de nationalité en 2022 dans les pays de l’OCDE. Il figure aussi parmi les premiers pays d’origine des demandeurs d’asile (2023) dans plusieurs pays européens. Décryptage avec Said Machak, enseignant-chercheur en droit international sur la migration et l'asile.  

Une dynamique migratoire continue

Le Maroc figure à la 6ème place dans le classement des 20 premiers pays d’origine des nouveaux immigrés dans l’OCDE, 2021-22. Le Royaume comptait 200.000 nouveaux émigrés, dont la plupart ont choisi comme destination l’Espagne, suivie de loin par la France et l’Italie. Notre pays est également classé sixième au niveau des cinquante premiers pays d’origine des nouveaux immigrés dans l’OCDE avec 411.000 migrants en 2021, 557.000 en 2022 soit une part de 6.4% en 2022 et une évolution de 146.000 personnes en 2021/2022 (35%).

L’Inde et la Chine arrivent en tête de ce classement suivies de la Russie et la Roumanie respectivement  troisième et  quatrième représentant toutes les deux environ 270.000 nouveaux immigrés. Alors que la Russie n’avait jamais atteint un tel niveau dans ce classement, la Roumanie est depuis longtemps l’un des principaux pays d’origine des nouveaux immigrés vers les pays de l’OCDE.

La Colombie occupe la cinquième place des pays d’origine  avec 218.000 nouveaux émigrés vers l’OCDE en 2022, dont plus des trois quarts vers l’Espagne. Avec 175.000 émigrés vers les pays de l’OCDE en 2022, l’Afghanistan arrive en septième place des pays d’origine, l’Allemagne étant leur principale destination, suivie du Canada et de la Turquie. Après la reprise des flux migratoires vers les Etats-Unis au lendemain de la crise du Covid-19, le Mexique est devenu le huitième pays d’émigration vers l’OCDE, à égalité avec la Syrie.

Par pays, le rapport de l’OCDE explique qu’en Espagne,  le Maroc fait partie des principales populations nées à l’étranger en 2023 avec un taux de 13% devant la Colombie (9%) et la Roumanie 7%. La Colombie, le Maroc et l’Ukraine étaient les trois principales nationalités des nouveaux arrivants en 2022. Parmi les 15 premiers pays d’origine, la Colombie a enregistré la plus forte augmentation (108.000) et le Royaume-Uni la plus forte diminution (-15.000) des flux vers l’Espagne par rapport à l’année précédente.

En 2023, le nombre de primo-demandeurs d’asile a augmenté de 38%, pour atteindre environ 160.000. La majorité des demandeurs étaient originaires du Venezuela (60.000), de Colombie (53.000) et du Pérou (14.000). La plus forte augmentation depuis 2022 concerne les ressortissants colombiens (18.000) et la plus forte diminution les ressortissants marocains (-800). Sur les 90.000 décisions prises en 2023, 59% étaient positives.

En France, le Maroc fait également partie des principales populations nées à l’étranger en 2023 avec un taux de 12% derrière l’Algérie (16%) et   devant le Portugal (7%). Le Maroc, l’Algérie et la Tunisie étaient les trois principales nationalités des nouveaux arrivants en 2022. Parmi les  personnes d’origine, le Maroc a enregistré la plus forte augmentation. Idem pour Israël , où le Maroc fait partie des principales populations nées à l’étranger en 2023 avec  7%  devancé par l’ex-URSS (51%), et suivi par les Etats-Unis (6%). En Belgique, le Maroc fait partie des principaux pays de naissance avec 11% suivi par la France (9%) et les Pays-Bas (6%).

Pour Said Machak, enseignant-chercheur en droit international sur la migration et l'asile, « la migration marocaine vers des pays européens tels que la France, l’Espagne, l’Italie et la Belgique s’inscrit dans une longue tradition façonnée par des facteurs historiques, économiques et géographiques. Ces éléments, combinés à des dynamiques sociales et culturelles, ajoute-t-il, continuent de structurer les flux migratoires actuels et d’influencer les choix des migrants marocains. «L’histoire coloniale joue un rôle central dans la structuration des flux migratoires marocains vers l’Europe, notamment vers la France et la Belgique.

Pendant le protectorat français au Maroc (1912-1956), la France a importé une main-d'œuvre marocaine pour répondre à ses besoins en travailleurs dans des secteurs clés comme l’agriculture et les infrastructures. De même, les conflits mondiaux ont mobilisé des soldats marocains pour servir dans l’armée française, renforçant les liens migratoires entre les deux pays. En Belgique, la signature d’accords bilatéraux dans les années 1960 a permis l’arrivée massive de travailleurs marocains dans l’industrie lourde, notamment les mines et la sidérurgie. Ces migrations ont été accompagnées d’un développement des communautés marocaines dans ces pays, établissant ainsi des bases solides pour des flux migratoires futurs».

En outre, notre interlocuteur nous a expliqué que «le Maroc bénéficie d’une position géographique stratégique, à seulement 14 kilomètres des côtes espagnoles via le détroit de Gibraltar. Cette proximité rend l’Europe, notamment l’Espagne et l’Italie, plus accessible pour les migrants marocains que des destinations plus lointaines comme le Canada ou les Etats-Unis. Les routes maritimes et terrestres facilitent les mouvements migratoires, bien que ceux-ci se soient progressivement complexifiés en raison des politiques migratoires restrictives adoptées par l’Union européenne». «La géographie joue également un rôle dans la migration irrégulière. Les côtes marocaines servent de point de départ pour de nombreux migrants cherchant à atteindre l’Espagne par voie maritime ou via les présides occupés.

Cette accessibilité a fait de l’Espagne une destination majeure, surtout depuis les années 1990», a-t-il noté. Et de préciser: «Les pays européens cités (France, Espagne, Italie et Belgique) ont historiquement été des importateurs nets de main-d’œuvre étrangère, notamment dans des secteurs comme la construction, l’agriculture et les services. Les Marocains, réputés pour leur compétence et leur résilience, ont répondu à ces besoins. Ces migrations économiques se sont poursuivies, bien que de manière plus diversifiée aujourd’hui, avec une présence marocaine croissante dans des secteurs qualifiés, comme les services ou les nouvelles technologies».

Les réseaux familiaux jouent un rôle crucial dans la dynamique migratoire marocaine, indique notre source. «Les premiers migrants, arrivés dans les années 1950 et 1960, ont progressivement fait venir leurs familles grâce aux politiques de regroupement familial mises en place dans plusieurs pays européens. Ces réseaux ont contribué à maintenir un lien migratoire fort, facilitant l’installation et l’intégration des nouveaux arrivants», rappelle-t-elle. Et d’ajouter: «Les communautés marocaines établies en Europe servent également de point d’ancrage pour les nouvelles générations. Elles offrent un soutien matériel et social, aident à surmonter les obstacles administratifs et fournissent des informations essentielles sur les opportunités d’emploi ou d’études. Cette dynamique favorise une migration dite "en chaîne", où les départs successifs sont encouragés par des relations familiales ou amicales déjà établies dans les pays de destination ».

Acquisition de nationalité pragmatique

Sur un autre registre, ledit rapport révèle que le Maroc occupe la troisième place dans le podium d’acquisition de nationalité en 2022 dans les pays de l’OCDE. En effet, 121.000 ressortissants marocains sont devenus citoyens d’un pays de l’OCDE (+32%). La plupart d’entre eux ont ainsi acquis la nationalité espagnole (55.000), italienne (31.000) ou française (19.000). L’inde arrive en tête en 2022 avec plus de 190.000 ressortissants indiens ayant acquis la nationalité d’un pays de l’OCDE, soit 60.000 personnes de plus qu’en 2021 (+43%). L’Inde fait ainsi figure de premier pays d’origine en matière d’acquisition de nationalité dans les pays de l’OCDE, et ce à un niveau encore jamais atteint.

La Syrie a conservé sa place de deuxième pays d’origine en 2022, avec 134.000 naturalisations (+28% par rapport à 2021). Plusieurs pays ont affiché de fortes hausses du nombre de naturalisations de leurs ressortissants en 2022, dont les Philippines (+28%, soit 111.000 naturalisations, dont 42.000 au Canada), le Pakistan (+34%, 70.000) et l’Albanie (+53%, soit 57.000, dont 38.000 en Italie).

En 2022, les acquisitions de nationalité représentaient en moyenne 2,7% des effectifs de personnes étrangères des pays d’accueil de la zone OCDE, soit une augmentation de 0.4 point par rapport à 2021. En 2022, le Canada est devenu le pays où le rapport entre le nombre d’acquisitions de nationalité et celui de personnes étrangères était le plus important (11,8%, contre 4,5% en 2021). Ce rapport est resté élevé en 2023, s’établissant à 11,4% La Suède se situe en seconde place, malgré une baisse en 2023 (7,7% contre 10,2% en 2022). Viennent ensuite la Norvège (avec un rapport de 6,4%, comme en 2022), puis les Pays-Bas (4,5% en 2022), les Etats-Unis (4,4% en 2022). Le Portugal est le pays où ce rapport a le plus baissé en 2022, puisqu’il a perdu un point pour s’établir à 3,2%. Cette baisse est due à un fléchissement des acquisitions, associé à une forte augmentation de la population étrangère.

Ce niveau record tient principalement à un triplement du nombre de nouveaux citoyens canadiens (60.000) en 2022. Il ne fait toutefois aucun doute que ce record sera dépassé en 2023, en raison de la nouvelle augmentation du nombre d’acquisitions de nationalité observée au Canada (79.000).

Pour Said Machak, la question de l’acquisition de la nationalité étrangère a suscité de vifs débats au Maroc, notamment sous le règne de S.M le Roi Hassan II. Selon lui, «le Défunt Souverain avait exprimé des réserves, craignant que l'intégration totale des MRE dans les sociétés d’accueil ne conduise à une dilution de l’identité et des valeurs culturelles marocaines». Pour S.M Hassan II, «la nationalité ne se limitait pas à un cadre juridique ou administratif, mais représentait un lien émotionnel et identitaire profond entre l’individu et son pays d’origine ». Cette vision rejoint une définition plus large de la nationalité, soulignée également par la Cour de justice de l'Union européenne, qui la considère comme une relation fondée non seulement sur des droits et des obligations, mais aussi sur un sentiment d’appartenance.

Par ailleurs, notre interlocuteur ajoute que «l’acquisition de nationalités étrangères par les MRE est un sujet complexe, ancré dans des dynamiques historiques, socio-économiques et identitaires. Les motivations et les implications de cette démarche diffèrent selon les contextes nationaux et personnels, ce qui reflète la diversité des expériences migratoires marocaines à travers l’Europe». Selon lui, l’acquisition de la nationalité étrangère par les MRE est souvent perçue comme un moyen d’obtenir des droits similaires à ceux des citoyens natifs des pays d’accueil. Cette perspective est particulièrement visible en France, en Allemagne, en Belgique et en Espagne, où les communautés marocaines sont bien établies. L’acquisition de la citoyenneté leur permet d’accéder à des avantages sociaux, à la protection juridique, et à des opportunités économiques qui ne sont pas toujours disponibles pour les résidents étrangers.

«Tel est le cas des MRE de l'Espagne. Après la crise économique de 2008, de nombreux Marocains résidant en Espagne ont sollicité la naturalisation pour obtenir la liberté de circulation au sein de l'Union européenne. Ce changement de statut leur a offert la possibilité de chercher du travail dans d'autres pays européens moins touchés par la récession, comme l’Allemagne ou la France. La nationalité espagnole devient alors un levier de mobilité et de stabilité économique», explique Said Machak en soulignant également que, parmi les MRE, il y a une minorité qui aspire à obtenir la double nationalité afin de conserver un lien juridique fort avec le pays d’origine tout en bénéficiant des avantages d’une citoyenneté étrangère. «Pour ces individus, la double nationalité représente un équilibre entre intégration dans le pays d’accueil et fidélité à leur identité marocaine», a-t-il observé. Et de noter que l’acquisition de nationalités étrangères par les MRE a des implications importantes sur la politique migratoire marocaine. «Le gouvernement marocain a adopté une approche plus flexible ces dernières années, reconnaissant l’importance de la diaspora marocaine comme un pont entre le Maroc et le reste du monde. La double nationalité est désormais acceptée et même encouragée, dans la mesure où elle permet aux MRE de jouer un rôle de relais économique et culturel. Les MRE naturalisés contribuent significativement à l’économie marocaine grâce aux transferts de fonds, aux investissements dans des projets locaux et au soutien aux familles restées au Maroc. Leur statut de citoyens étrangers leur permet également de défendre les intérêts du Maroc dans les pays d’accueil», souligne-t-il.

Mobilité étudiante liée à l’histoire de la migration marocaine

S’agissant de la mobilité étudiante, ledit document indique qu’en 2023, l’Inde était le premier pays d’origine des étudiants en mobilité internationale au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni. Les Indiens représentaient ainsi 40% des entrées d’étudiants au Canada et plus de 25% aux Etats-Unis et au Royaume-Uni (Graphique d’annexe 1.A.1). Depuis 2019, la part des étudiants indiens n’a fait qu’augmenter dans ces trois pays. La Chine était, quant à elle, le premier pays d’origine des étudiants étrangers en Australie et au Japon, où ils représentaient environ 30% des entrées en 2023, un taux en baisse par rapport à 2019.

D’autres nationalités ont également gagné en importance, comme les étudiants nigérians au Royaume-Uni, les étudiants colombiens en Australie ou les étudiants népalais au Japon. Les pays de l’UE/AELE affichent davantage de diversité dans les entrées d’étudiants étrangers, puisque 8% des étudiants en mobilité internationale étaient Chinois en 2022 et que les Indiens, Américains, Brésiliens et Marocains représentaient entre 4 et 7% des entrées. Les principales nationalités d’origine varient en outre selon les pays d’accueil. Ainsi, les étudiants indiens et turcs sont majoritaires en Allemagne, les étudiants marocains et algériens en France et les étudiants ukrainiens et biélorusses en Pologne.

En analysant ces chiffres, Said Machak nous a expliqué que la présence croissante des étudiants marocains dans les universités européennes, notamment en France, en Espagne et en Belgique, s'inscrit, dans une dynamique migratoire historique et multidimensionnelle. En effet, cette migration ne repose pas uniquement sur l’attrait des systèmes éducatifs avancés, mais elle résulte aussi d'un ensemble complexe de facteurs historiques, institutionnels, culturels, et socioéconomiques. «La migration estudiantine marocaine vers l’Europe s'inscrit dans un contexte historique marqué par les relations coloniales et postcoloniales. La France, en particulier, a joué un rôle central dans l’éducation marocaine depuis la période du protectorat. Ce lien historique a laissé un héritage profond, notamment au niveau de la langue et de la culture communes et la reconnaissance académique mutuelle».

Par ailleurs, notre interlocuteur soutient que ces dernières années, on observe une augmentation de la migration estudiantine marocaine vers l’Espagne et la Belgique. «Ce phénomène est lié à plusieurs facteurs (proximité géographique avec l’Espagne, et dynamisme des universités espagnoles). En effet, les établissements espagnols ont diversifié leurs programmes et offrent des cursus en anglais, attirant des étudiants internationaux. De plus, l’Espagne propose souvent des frais de scolarité plus abordables que la France. La Belgique a été présentée dernièrement comme une alternative francophone. Elle attire également les étudiants marocains grâce à sa francophonie partielle et son système éducatif reconnu. Les coûts d’inscription y sont souvent plus faibles qu'en France, tout en offrant un enseignement de qualité», a-t-il indiqué.

Les liens entre les institutions académiques marocaines et européennes jouent un rôle clé dans cette dynamique, souligne notre source. «Plusieurs programmes de coopération favorisent la mobilité des étudiants marocains. Il y a les accords bilatéraux de partenariat qui existent entre les universités marocaines et leurs homologues européennes, facilitant les échanges d'étudiants, les doubles diplômes et la reconnaissance mutuelle des crédits. Il y a aussi les programmes européens comme Erasmus+ qui offrent aux étudiants marocains des opportunités d’étudier dans plusieurs pays européens, renforçant ainsi la mobilité intra-européenne. Sans oublier les stages et recherches conjoints entre les universités marocaines et les institutions européennes sur des projets de recherche, encourageant les étudiants à poursuivre leurs études ou à effectuer des stages en Europe », a-t-il ajouté. Et de conclure : «Les gouvernements européens ont également mis en place des politiques favorables à l’accueil des étudiants marocains, conscients des bénéfices culturels et économiques de cette migration (visas étudiants simplifiés, bourses d’études, intégration facilitée…). A noter, toutefois, que cette dynamique pose également des défis pour le Maroc, qui doit trouver un équilibre entre la valorisation de sa diaspora qualifiée et la lutte contre la fuite des talents».

Mauvais usage du droit d’asile

Concernant la question de l’asile, le Maroc figure parmi les trois premiers pays d’origine des demandeurs d’asile (2023) en Slovénie, révèle ledit rapport. A noter que le nombre de demandes d’asile déposées par les Marocains est passé de 3.615 en 2019 à  3.465 en 2020 avant d’atteindre  5.220 en 2021, 6.645 en 2022 et 7.185  en 2023.  En 2023, le nombre de primo-demandeurs d’asile a augmenté de 8,1%, pour atteindre environ 7.200. La plupart des demandeurs étaient originaires du Maroc (5.700), de l’Algérie (400) et du Pakistan (100). La plus forte augmentation depuis 2022 concerne les ressortissants marocains (5.400) et la plus forte diminution les ressortissants afghans (-1 100). Sur les 300 décisions prises en 2023, 44% étaient positives.

La Bulgarie a enregistré  2075 demandes d’asile marocaines en 2019; 3.460 en 2020, 10.890 en 2021, 20.260 en 2022 et 22.390 en 2023,  soit une hausse de +979. En 2023, le nombre de primo-demandeurs d’asile a augmenté de 11%, pour atteindre environ 22.000. La majorité des demandeurs étaient originaires de Syrie (12.000), d’Afghanistan (5.900) et du Maroc (2.600). La plus forte augmentation depuis 2022 concerne les ressortissants syriens (3.800) et la plus forte diminution les ressortissants ukrainiens (-1.300). Sur les 8.740 décisions prises en 2023, 66% étaient positives. Des demandes ont été enregistrées au niveau de l’Autriche, du Danemark, de l’Espagne, de l’Irlande, de l’Italie, des Pays-Bas et du Portugal.

Comment peut-on expliquer cette situation? «Le droit d’asile est un principe fondamental inscrit dans la Convention de Genève de 1951, qui garantit la protection internationale aux personnes fuyant des persécutions en raison de leur race, religion, nationalité, appartenance à un groupe social particulier, ou opinion politique. Toutefois, la demande d’asile peut être détournée de son objectif initial lorsqu'elle est utilisée comme  moyen de régularisation migratoire», nuance Said Machak. Et de préciser: «Certains pays européens appliquent une définition élargie de la protection internationale, incluant des motifs relatifs aux libertés individuelles. Des aspects comme la liberté religieuse (par exemple, le port du voile ou la pratique de la circoncision) ou la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle (homosexualité) peuvent, dans certains cas, être invoqués pour justifier une demande d’asile. Cette interprétation large ouvre des opportunités pour certains migrants marocains, qui exploitent ces critères pour tenter d’obtenir un statut de réfugié ou une protection subsidiaire, même en l’absence de persécutions directes».

Notre source estime que certains motifs invoqués dans les demandes d’asile, bien que légitimes dans des contextes précis, peuvent être détournés de leur objectif initial comme c’est le cas de la liberté religieuse et des pratiques culturelles. «Des demandeurs invoquent des motifs liés à la liberté religieuse, comme des restrictions supposées sur le port du voile ou la pratique de la circoncision au Maroc. Bien que ces pratiques soient globalement respectées au Maroc, certains migrants les utilisent pour établir un dossier d’asile, sachant que les autorités européennes examinent ces critères sous l’angle des droits fondamentaux. L’orientation sexuelle, notamment l’homosexualité, constitue un motif reconnu pour l’octroi de l’asile dans de nombreux pays européens. Certains migrants, même s’ils n’ont pas fait l’objet de persécutions directes au Maroc, mettent en avant leur orientation sexuelle comme justification, en arguant de risques de discrimination ou de marginalisation sociale», explique-t-elle.

En conclusion, Said Machak estime que «les flux migratoires marocains confirment la persistance de notre pays en tant que pays d’émigration et traduisent les réalités profondes de la société marocaine, marquées par des défis internes et des aspirations externes», soulignant à ce propos,  «que les facteurs structurels à l’origine de cette dynamique demeurent non seulement présents mais se renforcent au fil du temps ».

«La dynamique d’émigration actuelle au Maroc est le reflet d’enjeux structurels profonds qui nécessitent des réponses durables. Tant que le chômage, la précarité et le manque de perspectives persisteront, la migration restera une option privilégiée pour de nombreux Marocains. Une politique intégrée, axée sur le développement économique, la justice sociale et la valorisation des compétences nationales, est essentielle pour transformer cette dynamique en force positive pour le pays», a-t-il conclu.

Migration irrgulière au Maroc Radioscopie

Le Maroc pays d’émigration
A Oujda, une augmentation remarquable des flux de Soudanais en quête de protection internationale a été observée récemment. La région accueille également des Tchadiens, des Guinéens, des Maliens et des Camerounais. En revanche, les Syriens et les Yéménites y sont plus rares. Une autre caractéristique notable de cette région est la forte présence de mineurs non accompagnés d’origine guinéenne.

Du côté de Nador-Al Hoceima, le nombre de mineurs marocains non accompagnés cherchant à immigrer est en hausse. A noter que Nador s'est transformée en point de départ principalement pour les jeunes Marocains, tandis que les migrants subsahariens semblent avoir disparu des radars, les forêts avoisinantes ayant été vidées.

Dans la région de Tanger-Tétouan, les rapports dressent un tableau sombre de la situation des migrants, soulignant des conditions difficiles et une pression croissante. Pour en savoir plus, dans un contexte national et régional marqué par le renforcement des contrôles et les crispations identitaires, Libé a donné la parole à plusieurs acteurs associatifs pour analyser la situation.

 Contexte régional migratoire morose

« Nous assistons à une hausse importante des flux de Soudanais à la recherche de protection internationale. Nous passons deux à trois heures par jour pour accueillir et enregistrer leurs demandes d’asile. Il arrive qu’on accueille 40 personnes dans la même journée, indique une source de l’AMDH-Oujda. Il s’agit de flux provoqués par les refoulements effectués ces derniers jours par les autorités tunisiennes ».

En effet, et depuis des mois, des organisations de défense des droits de l’Homme ont tiré la sonnette d’alarme face à l'escalade des agressions contre les migrants subsahariens en Tunisie. Elles ont particulièrement dénoncé les expulsions massives conduisant des centaines de migrants vers une zone frontalière désertique entre la Tunisie et la Libye. Ces expulsions ont entraîné, selon certains rapports, la mort d'au moins 27 personnes et la disparition de 73 autres.

Les ONG ont également rapporté de nombreux cas d'expulsions massives à travers les frontières algériennes. En Algérie, les migrants sont souvent déportés dans le désert, sans prendre en considération les conditions météorologiques extrêmes. Les expulsions les laissent dans des situations de vulnérabilité critique, avec un accès limité à l'eau, à la nourriture et aux soins médicaux.

En Libye, pays ravagé par des années de conflit, les expulsions conduisent fréquemment les migrants à se retrouver dans des centres de détention contrôlés par des groupes armés. Ces centres sont souvent le théâtre de violations graves des droits de l'Homme, y compris des violences physiques, des extorsions et des conditions de vie déplorables. Les migrants y sont détenus indéfiniment, sans accès à une aide juridique ou  possibilité de contacter leurs familles.

Oujda, l’éternel point de passage

Toutefois, Wiam Abderrazak, secrétaire général de l’OMDH-Oujda, précise que les flux des migrants soudanais ne correspondent pas à ceux enregistrés en 2021 et 2022 tout en indiquant que les Soudanais font partie de plusieurs nationalités qui accèdent au territoire marocain dans le but de bénéficier d’une protection internationale. « Nous avons noté la présence de Tchadiens, Guinéens, Maliens et Camerounais. Le nombre de Bangladais dans la région reste faible. A rappeler que leur mouvement et leur déplacement dépendent des réseaux qui les font venir. Souvent ces personnes sont conduites directement vers des barques de fortune pour d’éventuels départs vers l’Europe. Nous avons également constaté  qu’ils sont en train d’emprunter les voies migratoires passant par le Sud (vers les Iles Canaries). Ces Bangladais, candidats au départ vers l’Europe, ne cherchent pas l’asile au Maroc. Leurs statuts ne correspondent pas aux critères du HCR. Il s’agit en gros de migrants économiques », a-t-il relevéÒ. Et de poursuivre : « Les Syriens sont davantage rares dans la région. Les Yéménites sont également absents cette année par rapport à la même période de l’année dernière. Néanmoins, nous sommes loin de la période de 2015, 2016 et 2017 où nous avons enregistré des entrées massives des ressortissants yéménites. Ces derniers préfèrent partir directement vers le Nord (Fnideq) et ne cherchent pas à obtenir l’asile notamment les jeunes célibataires ».

S’agissant des frontières avec l’Algérie, notre interlocuteur observe que la situation est fluctuante selon les conjonctures et que les candidats à la migration ne manquent pas d’idées pour déjouer les contrôles en profitant des conditions météorologiques, des occasions religieuses ou de l’expertise des passeurs. « Mais, en règle générale, le nombre des migrants est en chute », a-t-il souligné. Et d’expliquer que la situation de fermeture a eu pour conséquences la hausse des prix des passages et la reformulation de la cartes des passeurs qui savent s’adapter aux circonstances en transformant leur activité là où il y a une demande. « Ils sont partout. En fait, il s’agit bien de personnes qui sont au courant des complexités de la question migratoire dans les pays d’origine et ceux d’accueil. A noter, cependant, qu’il y a certains migrants qui comptent sur leurs propres moyens en tentant leur chance via des initiatives personnelles (tentatives de passage par nage ou d’escalade des barrières,...). Un migrant nous a révélé qu’il a tenté 30 fois de passer sans succès », nous a-t-il affirmé.

Le SG de l’OMDH-Oujda estime, toutefois, que les récits des migrants doivent être pris avec une certaine prudence et que la vérité est toujours à chercher entre les lignes. « Dans nos entretiens avec ces personnes, nombreux sont ceux qui déclarent arriver au Maroc seuls alors qu’on sait qu’ils ont payé un passeur. La question du point d’entrée au Maroc pose également problème puisque ces migrants hésitent souvent à y répondre. D’autant qu’ils sont incapables d’évoquer certains détails comme le temps pris pour venir au Maroc, les routes empruntéesÒ... Est-ce que cela est dû à des consignes données par les passeurs ou bien jouent-ils la discrétion afin de protéger les autres en route ou qui pensent les rejoindre ? Personne ne sait ».

Nador, ville fortement contrôlée

Sur un autre registre, Wiam Abderrazak assure qu’il y a une forte présence de mineurs non accompagnés d’origine guinéenne. Un état des lieux qui rappelle celui de Nador où les MNA marocains cherchant à immigrer sont de plus en plus nombreux. Selon une étude menée par l’AMDH-section Nador en partenariat avec l’Entraide nationale et dont les résultats seront publiés prochainement, la ville compte près de 500 mineurs. « Ces derniers sont en majorité des Marocains qui louent des chambres entre eux  ou avec leur famille et tentent leur chance de passer vers l’Europe», nous a révélé Omar Naji, SG de l’AMDH- section Nador.

Cependant, ce dernier estime que la situation des migrants à Nador diverge largement. « En effet, la zone s’est transformée en  point de départ uniquement pour les jeunes Marocains alors que les Subsahariens ont disparu  de la circulation. Les forêts avoisinant la ville ont été complètement vidées. La forêt de Gourougou est devenue une zone militaire et celle de Selouane enregistre une présence très faible des candidats à la migration.

A rappeler que les Algériens passent par la ville mais n’y restent pas puisqu’ils cherchent à rejoindre la ville de Fnideq pour tenter leur chance par nage», nous a-t-il expliqué. Et d’ajouter : «Le marché de trafic des migrants a beaucoup évolué dans la région (Nador et Al Hoceima). Les réseaux de trafic humain ne chôment pas et recrutent auprès des jeunes de toutes les provinces de Nador. Ces jeunes constituent la majorité des clients de ce marché.  Il y en a d’autres issus de Guercif, Taourirt, Fès, Béni Mellal et Laâyoune orientale. Pour les passeurs, ce trafic est devenu plus fructueux que le trafic de drogue. En effet, les prix de passage par personne oscillent entre 11 et 12 millions de centimes. Les candidats à la migration sont transportés via les moyens utilisés dans le trafic de drogue (bateaux Phantom, jet-ski... ».

La question de l'asile en suspens

En outre, notre source nous a indiqué que la question de l’asile ne fait pas débat dans la région, principalement en raison de l'absence de structures y afférentes. En effet, il n'existe actuellement aucune infrastructure ou autorité locale chargée de traiter les demandes d'asile. « Par le passé, il existait un bureau à Mellilia qui traitait les dossiers des demandeurs d'asile. Cependant, ce bureau a fermé ses portes, laissant un vide considérable dans la gestion et le traitement des demandes d'asile dans la région. Cette fermeture a exacerbé la situation déjà précaire des migrants et réfugiés, qui se retrouvent sans recours légal ni protection », témoigne Omar Naji. Et de préciser : « L'ouverture d'un bureau chargé de traiter les dossiers de demandes d'asile a longtemps été l'une de nos principales revendications. Nous jugeons qu’il est impératif d'avoir une structure dédiée à la question de l'asile pour répondre aux besoins croissants des migrants et réfugiés dans la région. La fermeture du bureau de Mellilia a laissé de nombreuses personnes sans aucune possibilité d'obtenir une protection internationale».

Pour lui, cette situation reflète un manque de volonté politique et de ressources allouées à la gestion des demandes d'asile. Il souligne que sans une structure officielle pour traiter ces demandes, les migrants sont souvent laissés à eux-mêmes, confrontés à des risques accrus de détention arbitraire, d'exploitation et de renvoi forcé vers des pays où ils peuvent faire face à des persécutions. Cette absence de soutien institutionnel rend également difficile la collecte de données précises sur le nombre de demandeurs d'asile et leurs besoins spécifiques, compliquant ainsi toute tentative de réponse humanitaire adéquate. Et de conclure : « La mise en place de tels bureaux permettrait de garantir que les demandes d'asile soient examinées de manière juste et rapide, en conformité avec les normes internationales. Cela offrirait également un point de contact crucial pour les organisations non gouvernementales et les agences internationales souhaitant fournir une aide humanitaire et un soutien juridique aux réfugiés ».

Situation alarmante à Tanger-Tétouan

Du côté de Tanger-Tétouan, les récents rapports de l'Observateur Nord des droits de l'Homme (ONDH) brossent un tableau sombre de la situation des migrants dans cette région. Selon l'ONDH, environ 14 migrants irréguliers, dont 12 Marocains, ont péri noyés dans la mer Méditerranée au cours des mois de mars et avril 2024, alors qu'ils tentaient désespérément d'atteindre le sud de l'Espagne ou les présides occupés de Sebta et Mellilia. A ce jour, 18 autres migrants sont toujours portés disparus.

L'Observatoire a constaté également une augmentation alarmante des tentatives de passage vers les présides occupés, avec une moyenne de 120 tentatives par jour, soit 20 de plus par rapport à janvier et février 2024.
Dans ce contexte, près de 220 migrants irréguliers originaires de pays subsahariens n'ont pas réussi à franchir les clôtures frontalières de Sebta.

Par ailleurs, l'ONDH indique que plus de 70 mineurs marocains non accompagnés ont réussi à atteindre Sebta à la nage. A ce propos, la même source observe une hausse des tentatives de migration de ces mineurs vers les plages de Sebta, en particulier à partir de Fnideq. Ces jeunes, souvent désespérés et vulnérables, sont contraints de nager pendant plus de 10 kilomètres pour atteindre leur objectif. Le voyage maritime entre Fnideq et Sebta peut durer entre 10 et 15 heures, tandis que la route maritime entre Belyounech et Sebta, bien que plus courte (environ deux heures), est caractérisée par des courants marins froids et forts, augmentant ainsi les risques de noyade.

Les responsables de l’ONDH ont souligné la dangerosité extrême de ces traversées, en raison des rochers qui jonchent les rives. Malgré cela, la plupart des migrants irréguliers, y compris les mineurs, préfèrent encore tenter de rejoindre Sebta par la nage, en raison des restrictions sévères et des contrôles rigoureux aux frontières terrestres.

Khalid Alayoud, un artisan du co-développement et de l’intégration des migrants

Le Maroc pays d’émigration
Le Maroc célèbre aujourd’hui la Journée internationale du migrant, instituée en 2000 par l’ONU pour commémorer l’adoption de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Cet événement prend une dimension particulière cette année, se déroulant à la veille de la ratification par l’Assemblée générale des Nations unies du Pacte mondial sur les migrations.

Pour la communauté internationale, cette journée représente une opportunité de déconstruire les stéréotypes et de sensibiliser le public au rôle essentiel des migrants dans les sphères économique, culturelle et sociale, tant dans leur pays d’origine que dans leur pays d’accueil. Cette année, Libé met à l’honneur une des figures incontournables dans les domaines des migrations, du co-développement et de l’intégration. Enseignant-chercheur, acteur associatif et expert en développement local, il consacre sa vie à l’étude des dynamiques migratoires et à la valorisation des apports des Marocains résidant à l’étranger (MRE), notamment dans le Souss, sa région natale. Ce parcours riche et engagé reflète un engagement multidimensionnel au service de la société marocaine et au-delà.

Un enseignant-chercheur passionné par les migrations

En tant que président de l’Association des chercheurs en migration et développement durable (ACMD), Khalid Alayoud s’illustre par ses recherches approfondies sur les rôles des migrations dans le co-développement des pays d’origine. Ses travaux se concentrent particulièrement sur les Amazighs du Souss, une communauté qui a joué un rôle crucial dans les migrations économiques. Il analyse notamment comment les transferts financiers, les initiatives entrepreneuriales et les apports culturels des MRE contribuent au développement économique et social des régions rurales marocaines.

Son expertise va cependant au-delà de l’étude des migrations internationales. Khalid Alayoud explore également les défis de l’intégration des migrants subsahariens au Maroc, un sujet d’une pertinence croissante dans le contexte actuel. Il met en avant l’importance de politiques inclusives et d’initiatives associatives pour favoriser l’insertion socio-économique de ces migrants, souvent marginalisés, tout en soulignant leur potentiel pour enrichir le tissu culturel et économique marocain.

Un acteur associatif polyvalent

L’engagement associatif de Khalid Alayoud s’étend à plusieurs domaines. En tant que coordonnateur du Réseau des Associations de la réserve de biosphère arganeraie (RBA), il joue un rôle essentiel dans la préservation de cet écosystème unique, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO. Son travail dans ce cadre met en lumière le lien indéfectible entre développement durable, protection de l’environnement, et lutte contre la pauvreté dans les zones rurales.

Par ailleurs, en tant que trésorier de l’Association Souss-Massa-Drâa pour le développement culturel, il contribue à la promotion du patrimoine culturel marocain, notamment amazigh, et au renforcement du dialogue interculturel. Ces efforts illustrent une vision globale où le développement local s’inscrit dans une dynamique de solidarité internationale et d’échange culturel.

Le documentariste de la mémoire ouvrière

Outre son activité universitaire et associative, Khalid Alayoud est un documentariste qui utilise le média visuel pour raconter des histoires méconnues et souvent oubliées. Son film "Les gueules noires racontent le charbon", réalisé dans le cadre de l’ACMD, est une œuvre poignante qui retrace les parcours des milliers de Marocains ayant émigré en France dans les années 60 pour travailler dans les mines de charbon. Le documentaire met en avant les contextes difficiles de recrutement, les conditions de vie rudes, mais aussi la dignité et la résilience de ces travailleurs.

Cette œuvre s’inscrit dans une démarche plus large visant à préserver la mémoire collective et à mieux comprendre les impacts des migrations passées sur les dynamiques actuelles. Khalid Alayoud s’emploie à relier ces expériences historiques aux défis contemporains, offrant ainsi une perspective unique et nuancée sur la migration.

Le co-développement par les migrations

Un des axes centraux des travaux de Khalid Alayoud est le co-développement, une approche qui met en lumière les contributions des diasporas au niveau des pays d’origine. Il démontre, avec des données et des exemples concrets, comment les Marocains du monde, notamment ceux issus de la région du Souss, jouent un rôle central dans la revitalisation des communautés locales.

Les transferts financiers des MRE représentent une source cruciale de revenu pour de nombreuses familles marocaines, mais leur impact ne se limite pas à l’économie domestique. Khalid Alayoud met également en évidence leurs investissements dans des projets structurants, tels que la création d’entreprises, le financement d’infrastructures locales, ou encore la rénovation de sites culturels et religieux. Ces initiatives contribuent à renforcer la résilience des territoires ruraux face aux défis économiques et environnementaux.

Un plaidoyer pour l’intégration

Dans un contexte où le Maroc est devenu une terre d’accueil pour de nombreux migrants subsahariens, Khalid Alayoud s’engage activement en faveur de leur intégration. Il milite pour des politiques publiques ambitieuses qui garantissent les droits des migrants et facilitent leur inclusion dans la société marocaine. Son travail sur le terrain, en collaboration avec des associations locales, met l’accent sur l’éducation, l’accès à l’emploi, et la sensibilisation culturelle comme leviers essentiels pour une intégration réussie.
Il est convaincu que l’intégration des migrants subsahariens représente non seulement un devoir moral, mais également une opportunité pour le Maroc de s’enrichir d’une diversité culturelle et humaine.

Un héritage inspirant

Khalid Alayoud incarne une approche multidimensionnelle des migrations, mêlant recherche, action associative et création artistique. Son travail ne se limite pas à documenter les phénomènes migratoires, mais cherche à en faire un levier de transformation sociale, culturelle et économique.

Par ses recherches, ses films, et son engagement sur le terrain, il offre une vision inspirante pour un monde où les migrations sont perçues comme une richesse et non comme un défi. Son héritage, ancré dans les valeurs d’inclusion et de codéveloppement, continuera de guider les générations futures dans la construction d’un avenir plus solidaire et durable.

Dossier réalisé par Hassan Bentaleb


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