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Contrairement à leurs frères d'armes qui se sont fracassés contre les robustes lignes de défense russes lors de la grande contre-offensive de Kiev l'an dernier, les soldats ukrainiens ont franchi la frontière rapidement et aisément cette fois.
"Ils n'avaient pas protégé la frontière", confie un militaire répondant au nom de guerre "Roujyk".
"Ils n'avaient que des mines antipersonnel éparpillées autour des arbres le long de la route et quelques mines qu'ils ont réussi à jeter précipitamment le long des autoroutes", ajoute-t-il.
L'Ukraine dit avoir engagé des milliers de soldats dans la région russe de Koursk depuis le 6 août dans une opération éclair qui a pris le Kremlin au dépourvu et s'est traduite par la capture de dizaines de localités.
De son côté, la Russie a envoyé des renforts pour contrecarrer l'offensive et évacué plus de 100.000 d'habitants.
La rapidité de l'attaque ukrainienne --la première menée par une armée étrangère en Russie depuis la Seconde Guerre mondiale-- tranche avec les batailles acharnées que les forces russes doivent livrer pour capturer chaque ville d'Ukraine en cette troisième année de l'invasion.
"Nous avons là un autre exemple de la suffisance russe", explique à l'AFP l'analyste militaire ukrainien Mykola Bielieskov. "La Russie présumait que puisqu'elle avait l'initiative ailleurs, l'Ukraine n'oserait pas faire ce qu'elle a fait".
Si l'opération en territoire russe a permis de remonter le moral de troupes ukrainiennes qui en avaient bien besoin, elle soulève aussi des questions quant à la réponse russe.
Tant Moscou que Kiev se font discrets sur l'ampleur et les détails des combats dans la région.
Kiev a affirmé lundi contrôler 1.000 km2 du territoire russe après six jours d'attaque. Selon une analyse mardi de l'AFP à partir de données fournies par l'Institut américain pour l'étude de la guerre (ISW), les troupes contrôlaient 800 km2.
Ajustant sac à dos et fusil d'assaut avant de repartir côté russe de la frontière, le chef d'escouade "Pharaon", 27 ans, est peu loquace mais sans détour.
"J'ai vu beaucoup de morts les premiers jours. Au début, c'était terrifiant, mais on s'y fait", dit-il à l'AFP.
"Beaucoup sont morts", répète-t-il, le long d'une route forestière menant à la Russie.
Dans une clairière verdoyante où les équipages de chars ukrainiens se préparent à leur déploiement, un commandant décrit l'opération comme un coup de fouet pour le moral d'une armée en manque d'hommes et d'armements.
"Il n'y a pas eu de victoire significative en Ukraine ces derniers mois. Seuls les Russes avançaient", souligne-t-il.
Selon lui, cette incursion en territoire russe est de facto une victoire pour l'Ukraine car elle forcera le Kremlin à renforcer d'autres régions frontalières dégarnies avec des troupes qui ne seront donc pas envoyées en territoire ukrainien.
"S'ils maintiennent à Koursk des forces qu'ils ne peuvent utiliser (en Ukraine), c'est déjà un succès", dit-il. "Voyons comment cela évolue".
Les attaques russes dans la région de Donetsk --un des grands objectifs de Vladimir Poutine-- sur le front Est ne faiblissent quasiment pas, indiquait cependant samedi à l'AFP un haut responsable ukrainien.
Selon l'ISW, les forces russes ont continué de progresser dans cette région industrielle ces derniers jours.
Dans les villages frontaliers ukrainiens, plusieurs soldats parlant avec l'AFP sous couvert d'anonymat affirment que la Russie largue des quantités de bombes planantes pour contrecarrer l'assaut.
A Soumy, principale ville de la zone côté ukrainien, un monument aux morts en hommage aux soldats soviétiques tués pendant la Seconde Guerre mondiale fait face à un autre honorant les victimes de l'invasion russe déclenchée en février 2022.
Selon certains soldats ukrainiens, la Russie a été tellement surprise par l'incursion que les bombardements aériens étaient sa seule option défensive en attendant l'arrivée de renforts et que les drones - omniprésents dans la région de Donetsk - étaient absents à Koursk.
Quel est l'objectif ultime de l'opération ukrainienne? La question reste ouverte.
Le haut responsable interviewé par l'AFP à Kiev affirmait qu'il s'agissait de "déstabiliser" la Russie, une théorie évoquée aussi par Vladimir Poutine.
Selon le président russe, l'Ukraine pourrait également chercher à prendre des gages en vue d'hypothétiques négociations de paix.
D'après M. Bielieskov, la capacité de Kiev à tenir les territoires capturés dépendra en partie du choix de Moscou: tenter de les reprendre ou se retrancher pour empêcher toute nouvelle avancée?
"Je ne vois aucune raison pour que l'Ukraine ne puisse pas tirer un prix élevé de la Russie si celle-ci tente de récupérer ces territoires", dit-il.
Alors que Poutine a ordonné à son armée d'"expulser" les forces ukrainiennes, le soldat "Roujik" confie s'attendre à une riposte russe vigoureuse.
"Je ne dirais pas que les combats sont particulièrement durs en ce moment. Mais oui, ils vont bientôt le devenir".