La politique doit trancher avec toute surenchère ou instrumentalisation, que ce soit par le biais d'aides alimentaires utilisées à des fins électorales ou par des pressions sur les électeurs
Diplomatie partisane: L’USFP en première ligne
Le Premier secrétaire a tenu, au tout début de cette rencontre, organisée au siège du parti à Rabat, à réaffirmer l’engagement indéfectible de l’USFP envers la cause nationale du Sahara marocain, tout en appelant à une nouvelle dynamique d’action, notamment en passant de la phase de gestion à celle du changement.
Notre rôle, en tant que parti d’opposition,D’une voix posée mais ferme, Driss Lachguar a d’abord balayé toute ambiguïté sur les positions historiques du peuple marocain à ce sujet. «Il n’est nul besoin de rappeler ces fondamentaux», a-t-il affirmé. «Ce qui compte aujourd’hui, c’est la transition vers une phase de changement, une évolution dictée par la Volonté Royale et appelant toutes les forces vives de la nation à une mobilisation plus incisive».
est de garantir l’équilibre démocratique, de faire entendre la voix du peuple
et d’interpeller le gouvernement sur ses incohérences
Si le rôle de la diplomatie officielle est indéniable, Driss Lachguar a souligné l’importance croissante de la diplomatie partisane et parlementaire. Fidèle à la ligne directrice tracée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, l’USFP s’inscrit dans une démarche proactive, multipliant les alliances et les prises de position sur la scène internationale.
Le dirigeant ittihadi s’est arrêté sur une avancée majeure : la récente visite de l’USFP au Mexique et l’ouverture de discussions avec le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI), figure emblématique de la gauche latino-américaine. «Pendant longtemps, la gauche mondiale a été acquise aux thèses séparatistes, influencée par la propagande algérienne. Nous avons choisi le dialogue et la persuasion, et les premières fissures dans ce bloc commencent à apparaître», a-t-il souligné.
En effet, le PRI, qui dirige une coalition de 74 partis progressistes sur le continent, représente une opportunité de taille. «L’enjeu est colossal», a-t-il poursuivi. «Le parti au pouvoir au Mexique soutient toujours l’entité fictive, mais nous avons réussi à ouvrir des canaux de communication avec des forces politiques influentes».
Pour aller plus loin, le Groupe parlementaire de l’USFP prépare un forum international qui réunira, en mai prochain, 136 parlementaires venus des quatre coins du monde. Dans le même esprit, la Jeunesse ittihadie accueillera sous peu les jeunes mouvements progressistes du monde arabe. «C’est ainsi que nous bâtirons un réseau solide de soutien international», a noté Driss Lachguar qui n’a pas manqué d’adresser un message clair aux partis de la majorité gouvernementale. «Alors que certains se précipitent pour faire partie du gouvernement du «Mondial 2030», nous leur rappelons qu’il y a d’autres compétitions à mener», a-t-il lancé.
Au-delà du front diplomatique partisan, Driss Lachguar a également appelé les Nations unies à revoir leur approche du dossier du Sahara marocain. «Le mantra de l’autodétermination est désuet. Les résolutions récentes nous donnent les moyens d’exiger une relecture du dossier», a-t-il expliqué.
En ce sens, il a mis en exergue le fait que le polisario ne peut aucunement prétendre représenter la population sahraouie. «Le Maroc, lui, a su intégrer les véritables représentants de la région au processus politique», a-t-il affirmé. Et d’jouter : «Nous ne redoutons pas la pluralité des voix, à condition que celles-ci participent à un dialogue constructif, à l’image de l’association ‘Sahraouis pour la paix’».
Driss Lachguar a également réitéré l’engagement de l’USFP à accompagner la stratégie de l’Etat marocain dans la défense de l’intégrité territoriale. «Nous saluons les efforts de la diplomatie marocaine, qui agit avec intelligence et fermeté. L’USFP continuera de jouer son rôle, en toute loyauté, pour faire triompher la Cause nationale», a-t-il martelé.
Cause palestinienne : une solidarité authentique
Dans la même veine d’un engagement diplomatique sans faille, Driss Lachguar a pris un moment pour souligner un aspect central de la politique étrangère marocaine : son soutien indéfectible à la cause palestinienne. Lors de cette rencontre avec la presse, le leader de l’USFP a de nouveau martelé que le Maroc demeure un modèle unique en la matière, agissant non par surenchère ou calculs politiciens, mais par conviction profonde.
Driss Lachguar a insisté sur le caractère désintéressé de l’engagement du Royaume. «Le Maroc est le seul pays à soutenir sans condition la cause palestinienne, sans attendre de contrepartie. C’est un soutien basé sur des valeurs et une solidarité authentique», a-t-il affirmé. Un soutien qui, selon lui, s’inscrit dans une logique d’assistance responsable et pragmatique, loin des discours extrémistes ou des postures de façade qui, selon le Premier secrétaire, ne profitent qu’à l’extrême droite israélienne, notamment au Premier ministre Benjamin Netanyahou.
Le dirigeant ittihadi a clairement exprimé son rejet des «surenchères politiques» qui, loin de favoriser la cause palestinienne, ne font qu’alimenter le discours belliqueux de l’occupant israélien. «Netanyahou est le premier à bénéficier de cette escalade irréfléchie», a-t-il déclaré, appelant à une action responsable et rationnelle de la part des partis politiques, des syndicats et de la société civile pour éviter de tomber dans ces pièges.
Driss Lachguar a également pris soin de souligner que la solution au conflit israélo-palestinien ne réside pas dans la surenchère, mais dans le dialogue. «Le seul moyen d’apaiser les souffrances des Palestiniens et de parvenir à une paix juste et durable, c’est un dialogue constructif, mené par les véritables représentants de la cause palestinienne, sous l’égide de l’Autorité nationale palestinienne et de l’Organisation de libération de la Palestine», a-t-il insisté.
Fidèle à la ligne directrice tracée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI,Dans cette optique, il a évoqué les avancées diplomatiques réalisées par l’USFP au sein des instances internationales. Le parti a réussi à faire adopter un communiqué commun au sein de l’Internationale socialiste, appelant à un cessez-le-feu, malgré une sympathie grandissante de l’opinion publique internationale envers Israël après les événements du 7 octobre. De même, grâce à un travail soutenu au sein du Forum progressiste, l’USFP a contribué à l’expulsion d’Israël de la direction de cette organisation, permettant ainsi l’intégration des Palestiniens dans ses structures.
l’USFP s’inscrit dans une démarche proactive,
multipliant les alliances et les prises de position sur la scène internationale
En abordant l’attaque du 7 octobre, le Premier secrétaire a pris position avec fermeté. Il a dénoncé cette action, qu’il considère comme une «grave erreur», détournant l’attention de la véritable cause palestinienne pour la subordonner à une «surenchère sur des victoires illusoires». Selon lui, cette attaque a exacerbé les tensions, en l’absence d’une réelle coordination avec l’Autorité palestinienne, et a compliqué encore davantage la situation déjà désastreuse du peuple palestinien.
«Ce n’est ni une victoire ni une libération, c’est une erreur tragique», a souligné Driss Lachguar, affirmant que, dans le contexte actuel, la priorité reste la recherche d’une solution négociée et raisonnable, qui prenne en compte les aspirations légitimes des Palestiniens. Il a également appelé à l’unité des forces progressistes pour soutenir la cause palestinienne sans tomber dans les pièges de l’idéologie extrême. Selon lui, la vraie victoire résidera dans l’établissement d’un Etat palestinien indépendant, et le Maroc continuera de jouer un rôle essentiel dans cette quête de justice.
Volonté hégémonique et pratiques opportunistes
Abordant le sujet de l’actuel gouvernement, Driss Lachguar a pointé du doigt ce qu’il perçoit comme une volonté hégémonique de la part du gouvernement en place. En évoquant la gestion de la politique nationale, le Premier secrétaire de l’USFP a dénoncé ce qu'il qualifie d’hégémonisme qui imprègne les institutions actuelles, mettant en péril le pluralisme et la démocratie naissante du Maroc.
«Le Maroc ne peut pas se permettre de suivre cette course effrénée vers le «gouvernement du Mondial», au détriment des problèmes internes de notre nation», a souligné Lachguar. Selon lui, l'effort gouvernemental aurait dû se concentrer sur la résolution des défis sociaux et économiques, plutôt que sur des ambitions qui ne répondent pas aux attentes du citoyen.
Driss Lachguar n’a pas épargné le gouvernement concernant ses promesses non tenues. Le projet du million d'emplois, qui avait été un axe majeur du programme électoral, a été qualifié par le leader de l’USFP de «mission impossible». En pointant du doigt l'incapacité de l’exécutif à concrétiser ces engagements, le Premier secrétaire a rappelé que les grands projets, censés servir de moteurs de développement, se sont révélés largement déconnectés de la réalité.
Concernant les prochaines échéances électorales, il a insisté sur le fait que le gouvernement devrait annoncer officiellement la date des élections sans plus attendre, soulignant que cette question ne peut être laissée à la discrétion des trois partis de la majorité. Il a également souligné l'importance de discuter d'éventuelles modifications du découpage électoral et de l'organisation administrative, insistant sur le fait que ces changements devraient être le fruit d'une concertation avec l'ensemble des formations politiques, et non uniquement avec les membres du gouvernement en place. «Il est impératif que le gouvernement clarifie la situation, qu’il annonce une date des élections et qu’il participe à une discussion ouverte avec tous les partis sur le découpage électoral», a-t-il exigé, avant d’avertir que la non-transparence des processus politiques pourrait entraîner une détérioration de la confiance des citoyens dans les institutions démocratiques et fragiliser l’intégrité du système électoral.
Sur la question du mode de scrutin, Driss Lachguar a rappelé que le parti de la Rose réclamait depuis longtemps un débat sur le scrutin uninominal. Lors d’un forum organisé à Bouznika, auquel ont participé des élus locaux socialistes, des positions claires ont été adoptées en faveur de cette réforme. Lachguar a dénoncé le scrutin de liste, qu’il considère comme responsable de l’affaiblissement des institutions démocratiques en favorisant ceux qui détiennent des capitaux et qui financent eux-mêmes leurs campagnes. Ce système, selon lui, met en péril le principe fondamental de l’égalité des chances dans les élections.
Lachguar a également exprimé son inquiétude face à l'instauration d'une campagne électorale prématurée, lancée principalement par les partis de la majorité. Il a déploré le recours à des pratiques douteuses telles que la distribution de "paniers généreux" par le biais de l’Association "Joud", ainsi que par l'engagement d'agents administratifs pour envoyer des aides et solliciter des voix en faveur de certains candidats. De telles pratiques, selon le leader de l'USFP, entachent la transparence du processus électoral et fragilisent l'intégrité des élections.
Dans une ultime mise en garde, Driss Lachguar a exhorté le Parquet à intervenir face aux irrégularités observées dans plusieurs circonscriptions qui entachent la légitimité des scrutins. «La politique ne doit pas être un terrain d'exploitations douteuses, que ce soit par le biais d'aides alimentaires utilisées à des fins électorales ou par des pressions sur les électeurs», a-t-il affirmé.
Dans ses remarques, Driss Lachguar a fait part de ses préoccupations quant à la tendance du gouvernement à imposer une domination politique sans équivoque, qui pourrait nuire à la stabilité démocratique du pays. «Nous devons préserver le pluralisme et les libertés fondamentales si nous souhaitons éviter un retour aux pratiques autoritaires du passé», a-t-il précisé. «Le Maroc doit avancer sur des bases solides, fondées sur l’unité, la transparence et le respect des principes démocratiques», a-t-il plaidé. Et d’ajouter : «C’est dans cet esprit que l’USFP continuera à œuvrer pour un avenir meilleur, loin des tentations hégémoniques et des pratiques opportunistes».
Ainsi, avec une campagne électorale qui semble déjà en marche avant même l’annonce officielle des élections, le leader de l'USFP met en garde contre l’érosion de la démocratie marocaine et appelle à une clarification immédiate de la situation politique et électorale du pays. La question de la transparence, de l’égalité des chances et de la responsabilité gouvernementale est plus que jamais au cœur du débat.
Lachguar n’a, par ailleurs, pas manqué de défendre l’opposition en tant que contrepoids indispensable. «Notre rôle, en tant que parti d’opposition, est de garantir l’équilibre démocratique, de faire entendre la voix du peuple et d’interpeller le gouvernement sur ses incohérences», a-t-il déclaré. Il a souligné que l’USFP, loin d’être un simple observateur, remplit son rôle d'opposant avec sérieux et responsabilité, notamment au sein des deux Chambres du Parlement.
Motion de censure : ouvrir un débat approfondi
Le Premier secrétaire de l’USFP est également revenu sur la tentative du Groupe socialiste-Opposition ittihadie d'activer une motion de censure contre le gouvernement d’Aziz Akhannouch. Bien qu'il ait reconnu que cette initiative n’avait pas rencontré l'unanimité parmi les groupes de l’opposition, il a souligné que l’objectif n’était pas de renverser immédiatement le gouvernement, mais d’ouvrir un débat approfondi sur l’avenir du modèle de développement du pays et d’y associer la population.
Lachguar a expliqué que l'USFP avait proposé cette motion de censure aux autres composantes de l'opposition, dans l’espoir de susciter une discussion sérieuse sur les grands enjeux économiques et sociaux du Maroc. Cependant, il a admis que le manque de moyens et les divisions internes au sein de l’opposition ont limité les chances de succès de cette initiative. Il a notamment mis en lumière les dissensions au sein de l’opposition sur la question de la motion de censure, en évoquant les tensions entre les différents partis. En particulier, le Parti de la justice et du développement (PJD) avait initialement exprimé son soutien à l’initiative, avant que son président, Abdellah Bouanou, ne se retire après une réunion avec la direction de son parti.
Dans son soutien à la cause palestinienne,Lachguar a déploré le manque de cohésion au sein de l’opposition, notant que certains membres cherchaient à tirer profit de la situation en échange de postes dans des commissions parlementaires.
le Maroc demeure un modèle unique,
agissant non par surenchère ni calculs
politiciens, mais par une profonde conviction
Une vision au service de l’intérêt national
Concernant une éventuelle participation de l'USFP au gouvernement, Lachguar a affirmé que son parti, comme toute formation politique sérieuse, aspire à exercer le pouvoir afin de mettre en œuvre son programme. Il a cependant relevé que l’USFP n’avait pas adopté une opposition systématique au gouvernement actuel, mais avait plutôt agi selon une ligne claire en fonction des enjeux du moment. Il a reconnu que la sortie de la crise du Covid-19 avait constitué un défi majeur pour le pays, tout en mettant en avant la stratégie Royale axée sur les droits de l’Homme et les grands projets structurants, notamment dans les domaines des infrastructures et du social.
Le dirigeant usfpéiste a également salué le rôle de S.M le Roi Mohammed VI dans la gestion de la pandémie et son engagement envers les grands chantiers sociaux, précisant que l’USFP avait exprimé à plusieurs reprises sa volonté de participer au gouvernement dans le cadre de ces projets. Toutefois, il a dénoncé des dérives dans la mise en œuvre de certains programmes sociaux, notamment dans les secteurs de la santé et de l’éducation, ce qui a poussé le parti à réclamer un remaniement ministériel.
Driss Lachgar a tenu à rappeler que l’USFP ne fait pas de politique par esprit de revanche, mais selon une vision au service de l’intérêt national. Il a ajouté que le Maroc se trouve actuellement confronté à des défis majeurs et que des priorités telles que l'amélioration des infrastructures, ainsi que le renforcement des secteurs de la santé et de l’éducation, devaient être au cœur des politiques publiques, bien au-delà des compétitions électorales.
Préserver sa place sur l’échiquier politique
Lors de cette rencontre avec la presse, Driss Lachguar a eu l’occasion de révéler sa version des événements autour de la crise de formation du gouvernement Benkirane en 2017, et a détaillé les circonstances qui ont conduit ce dernier à être démis de ses fonctions par S.M le Roi Mohammed VI. Selon Lachguar, l’USFP n’a jamais constitué un obstacle à la formation du gouvernement, bien au contraire, son parti a toujours participé activement aux consultations.
Le Premier secrétaire a rappelé, dans ce sens, qu’Abdelilah Benkirane avait proposé à l’USFP de rejoindre le gouvernement, une offre qu’il avait acceptée, surtout après que l’Istiqlal et le PPS avaient eux aussi confirmé leur engagement à participer. Toutefois, il a déploré que Benkirane ait trahi l’accord de coulisses en retardant la finalisation de la composition du gouvernement jusqu’à la tenue du congrès du Rassemblement national des indépendants (RNI). «De plus, les demandes inhabituelles de Benkirane à l’USFP pour soumettre une liste de ministres potentiels ont éveillé des soupçons au sein du parti», a-t-il expliqué.
Driss Lachguar raconte avoir été choqué par la réponse des dirigeants du PJD, qui lui ont certifié que discuter des portefeuilles ministériels à ce stade risquait de faire imploser le parti. C’est alors qu’il a perçu une «stratégie» visant à exclure l’USFP du gouvernement, ce qui a été confirmé lors de la suite des discussions. Selon lui, si son parti avait soumis une liste de ministres, cela aurait pu entraîner une crise interne à l’USFP.
Face à cette situation, Lachguar a pris l’initiative de convoquer les dirigeants des partis concernés à une réunion à son domicile, ce qui a donné lieu à un communiqué commun exigeant des négociations simultanées entre tous les partis, plutôt que des consultations bilatérales. Cette déclaration a mis Abdelilah Benkirane dans une position difficile, rendant plus complexe la formation d’un gouvernement sans l’USFP.
Le dirigeant ittihadi a conclu en soulignant que l’USFP n’avait pas cherché à participer au gouvernement par simple appât du pouvoir, mais pour préserver sa place sur l’échiquier politique et contrer ce qu’il considère comme une «conspiration» visant à exclure le parti de la Rose.
Mehdi Ouassat