Peu après la parution du Manifeste, des révolutions éclatèrent en France (révolution de février 1848, IIe République) et en Allemagne. Le gouvernement belge, craignant que cette vague de révolutions ne déferle sur la Belgique, chassa Karl Marx. Il gagna alors Paris puis la Rhénanie. Il s'installa enfin à Cologne où il fonda et édita un journal communiste, la Neue rheinische Zeitung (la Nouvelle Gazette rhénane) et où il dirigea la section locale de la Ligue des communistes et fonda une association de travailleurs comptant sept mille adhérents. En 1849, accusé d'organiser des activités révolutionnaires, il fut arrêté et jugé à Cologne pour incitation à l'insurrection armée. Il fut finalement acquitté, mais expulsé d'Allemagne. Après l'échec des révolutions en France et en Europe, il s'exila alors à Londres, où il passa le reste de sa vie.
En Angleterre, Karl Marx se consacra à l'étude et à l'écriture, poursuivant des travaux théoriques acharnés, notamment à la salle de lecture du British Museum. Il travailla également à la construction d'un mouvement communiste international. Il rédigea à cette période plusieurs ouvrages considérés comme des grands classiques de la théorie communiste (ou marxiste). Parmi ces ouvrages, citons le Capital (vol. I, 1867; vol. II et III, édités par Engels, publiés après sa mort en 1885 et en 1894). Dans cet ouvrage, dont il disait qu'il était «certainement le plus redoutable missile qui ait été lancé à la tête de la bourgeoisie», il fit l'analyse systématique et historique de l'économie du système capitaliste et développa la théorie de l'exploitation par les capitalistes de la classe ouvrière à travers l'appropriation par les premiers de la «plus-value» produite par le prolétariat.
Dans la Guerre civile en France (1871), Karl Marx fit l'analyse de l'expérience du gouvernement révolutionnaire de courte durée, qui fut établi à Paris lors de la guerre franco-allemande, connu sous le nom de Commune de Paris. Dans cet ouvrage, il interpréta la formation et l'existence de la Commune comme la confirmation historique de sa théorie sur la nécessité pour les travailleurs de s'emparer du pouvoir politique à travers une insurrection armée puis de détruire l'État capitaliste. Polémiquant avec Proudhon et les socialistes utopiques, il acclama la Commune comme étant «enfin une institution politique à travers laquelle l'émancipation économique du travail pouvait avoir lieu».
Cette théorie fut explicitement présentée dans Critique du programme de Gotha (1875), ouvrage dans lequel il précisa le concept de dictature du prolétariat : «Entre le passage d'un système capitaliste à un système communiste s'écoule une période de transformation révolutionnaire d'un système dans l'autre qui correspond à une période de transition politique pendant laquelle l'État ne peut rien faire d'autre que de régner en dictateur révolutionnaire sur le prolétariat.» Une fois close cette période transitoire dont Marx ne précise pas la durée, le droit bourgeois peut être définitivement dépassé et la société peut mettre en pratique le mot d'ordre : «De chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins» (Critique du programme de Gotha). D'Angleterre, Karl Marx publia également plusieurs articles dans différents journaux d'Europe et des États-Unis sur les événements politiques et sociaux contemporains. Il fut ainsi correspondant du New York Daily Tribune de 1852 à 1861. En 1857 et en 1858, il collabora à des journaux chartistes et socialistes anglais.
La Ligue communiste fut dissoute en 1852 mais Karl Marx continua à correspondre avec des centaines de révolutionnaires dans le but de former une autre organisation révolutionnaire, mieux organisée et plus efficace. Ses efforts, alliés à ceux de nombreux collaborateurs, permirent la création à Londres, en 1864, de l'Association internationale des travailleurs (AIT) connue sous le nom de Ire Internationale.
(A suivre)