Grandir ensemble !


Mohamed LMOUBARIKI *
Mardi 24 Mars 2020

Grandir ensemble !
Le Maroc fait face, à l'instar de la majorité des pays du globe, à une crise sanitaire sans précédent et dont l'issue reste confuse compte tenu de la violence et de la contagiosité du virus ravageur. A cet effet, l'Etat vient de prendre des mesures coercitives extrêmement strictes en déclarant l'état d'urgence dans le but d'inciter les citoyens à rester chez eux et briser, par conséquent, la chaîne de transmission du Covid-19, l'un des virus les plus virulents.
Les mesures annoncées sont exceptionnelles et lourdes de conséquences socialement et économiquement : fermeture des frontières, des établissements scolaires, des commerces non alimentaires, des cinémas, des théâtres, des cafés, des restaurants, des mosquées, interdiction des déplacements entre les localités, des fêtes de mariage, des festivals, des conférences, des compétitions sportives, des réunions, etc. En un mot, tout le pays est en hibernation printanière et c'est un moindre mal. Pourtant, toutes ces contraintes réunies ne vont pas pour autant mettre fin à la propagation du coronavirus ! Seul l'engagement individuel au respect de ces contraintes permettrait ou non de diminuer sa prolifération.
Les mesures de quarantaine et de confinement promulguées par les pouvoirs publics doivent être suivies scrupuleusement. Il y va de notre devenir. Les respecter est la condition sine qua non pour nous en sortir. Cette affirmation prend encore plus de sens lorsqu'on rappelle que des pays dits plus développés tels que l'Italie, l'Espagne ou la France se retrouvent, ces jours-ci, dans des situations très difficiles en dépit du confinement et de l'étendue de leurs infrastructures médicales et de leurs moyens financiers. Que dire dans ces circonstances du Maroc qui ne peut proposer qu'un nombre infime de lits de réanimation indispensables aux personnes en état de détresse respiratoire, la pathologie ultime du Covid-19 selon les affirmations du corps médical.
Par conséquent, l’éradication de cette épidémie est étroitement liée à notre volonté individuelle d'agir pour notre salut collectif. Nous allons nous en sortir ensemble ou périr ensemble. Nous avons notre destin entre nos mains. Les appels de quelques barbus pouilleux et incultes ne doivent nullement nous détourner de cette impérieuse nécessité d'agir en concert pour sauver des vies, sauver nos vies.
Mais toute épreuve aussi effroyable soit-elle est porteuse de messages d'espoir. Celle que nous vivons au Maroc et dans le reste du monde nous permet de nous retrouver autour de l'essentiel, de réfléchir sur le sens du développement, de remettre en avant le vivre ensemble. Des actions de générosité, de solidarité et de sensibilisation se sont répandus à travers le pays.
Les directives de Sa Majesté le Roi pour la création d'un fonds spécial pour faire face à cet ennemi invisible, ont suscité un élan de générosité extraordinaire auquel ont participé, entre autres, les plus grandes fortunes du pays. Plus de 14 milliards de dirhams ont été levés en quelques jours, ce qui témoigne de notre capacité à dépasser les clivages et les intérêts personnels pour penser au bien commun. Il est vrai que les magasins d’alimentation ont été, maladroitement, pris d'assaut et dévalisés en quelques heures par peur de pénurie. Il est vrai, aussi, que de nombreuses familles ont confondu confinement et vacances scolaires. Il est vrai, enfin, que des commerçants indélicats ont saisi cette lugubre opportunité pour gonfler les prix. Cependant, après quelques jours de flottement et même si des imbéciles bravent encore les recommandations en organisant de supposées processions salvatrices, les consignes des pouvoirs publics ont fini par être globalement observés et le civisme finira, à coup sûr, par prendre le dessus, quitte à utiliser la force légitime de l’Etat.
Quoi qu’il en soit, c’est dans des moments pareils qu'on reconnaît, à sa juste valeur, le degré de maturité et de résilience d'un peuple. Le nôtre a montré, à travers son histoire, sa capacité à dépasser, quand c'est nécessaire, les intérêts individuels pour se recentrer sur l'essentiel et œuvrer pour un lendemain meilleur. Oui, nous vaincrons ensemble et grâce au corps médical ce maudit virus. Et nous tirerons des leçons constructives de cette douloureuse épreuve. Le débat politique reprendra, naturellement, ses droits par la suite. Chacun rendra des comptes ! C'est normal, c'est le propre de la démocratie. Mais, il y aura, en tout cas, des acquis indéniables. Nous retrouverons sûrement un élan de solidarité plus fort qui a commencé à s'éroder sous la pression invasive des effets de la société de consommation.
Faisons le pari que nos comportements vont profondément et positivement changer! Que les priorités en matière de développement seront repensées ! Que les choix en matière d'éducation seront complètement revus. Et que le respect de l'autre, des anciens deviendra la règle.
Vivre ensemble, c'est faire confiance. C'est permettre aux individualités de chanter en chœur la mélodie de l'espoir et du salut commun. Gardons, donc, foi en notre beau Maroc et que le coronavirus nous permette de grandir ensemble !
En guise de conclusion, je fais mien ce passage débordant d'espérance extrait de "L'année terrible (1872)" de Victor Hugo :
" ... l’indignation des flots ne dure pas,
L’écume est furieuse et n’est pas éternelle ;
Le plus fauve aquilon demande à ployer l’aile ;
Toute nuit mène à l’aube, et le soleil est sûr ;
Tout orage finit par ce pardon, l’azur."


* Historien vivant à Lyon, France.


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