-
Le régime syrien perd la ville d'Alep
-
Gaza compte le plus grand nombre d'enfants amputés par habitant au monde
-
L'Unrwa annonce suspendre la livraison d'aide par un point de passage clé depuis Israël
-
Biden en Angola pour tenir in extremis une promesse à l'Afrique
-
Trêve au Liban. Frappes israéliennes contre des positions du Hezbollah
A peine remis du traumatisme d'une loi immigration controversée adoptée en décembre avec les voix de l'extrême droite, le camp présidentiel a encaissé un nouveau coup dur venu de l'intérieur.
Figure de la politique française et allié proche du chef de l'État, le centriste François Bayrou, 72 ans, a lui-même signifié mercredi son refus d'entrer au gouvernement "faute d'accord profond sur la politique à suivre".
L'apport de ce vieux routier de la politique était pourtant espéré pour finaliser le casting gouvernemental, toujours incomplet un mois après la nomination du jeune Premier ministre Gabriel Attal (34 ans), et remplacer au pied levé la ministre de l'Éducation Amélie Oudéa-Castéra, plombée d'emblée par une polémique sur la scolarisation de ses enfants dans le privé.
"François Bayrou devait constituer l'effet d'annonce du remaniement. C'est un poids lourd de la politique, extrêmement connu et qui a une certaine cote à droite comme à gauche", indique à l'AFP Céline Bracq, directrice générale de l'institut de sondages Odoxa. "Mais c'est désormais un nouveau problème pour Emmanuel Macron."
L'exécutif n'en avait pas besoin.
Privé depuis les législatives de 2022 de majorité absolue à l'Assemblée et contraint de négocier des alliances au coup par coup, le gouvernement a déjà dû forcer à 23 reprises la main du Parlement en recourant au mécanisme du "49-3" - une disposition qui permet d'adopter un texte sans vote - sous Elisabeth Borne, la prédécesseure de Gabriel Attal à la tête du gouvernement.
En mars dernier, c'est par ce biais que la réforme des retraites avait été approuvée, après des mois de manifestations et dans l'hostilité générale.
L'exécutif a aussi survécu à 28 motions de censure des parlementaires en moins de deux ans, un record sous la Ve République française.
Le renoncement de M. Bayrou "dit beaucoup du second mandat d'Emmanuel Macron qui est très affaibli par le fait que son camp n'a qu'une majorité relative et surtout qu'il n'a plus la capacité de se représenter", déclare à l'AFP le politologue Pascal Perrineau.
En France, depuis 2008, le président de la République est limité à deux quinquennats successifs et M. Macron, élu en 2017 et reconduit en 2022, est le premier à être confronté à cette contrainte: ses deux prédécesseurs, Nicolas Sarkozy (droite) et François Hollande (gauche) n'ont exercé qu'un mandat.
"Du fait de cette incapacité, le pouvoir de M. Macron est sans cesse contesté à l'extérieur - on le voit dans l'opinion publique -, mais aussi à l'intérieur de son camp, où chacun y va de sa stratégie de différentiation pour préparer l'après", estime M. Perrineau, selon qui la défection de M. Bayrou doit se lire à cette aune.
"Ça fragilise le gouvernement parce que les lignes de fractures au sein de la majorité vont se creuser, ce qui va rendre d'autant plus difficile la possibilité de légiférer", prédit à l'AFP l'universitaire Benjamin Morel.
Selon les experts, ce remaniement qui s'éternise et dont le premier volet avait été marqué par le débauchage d'une figure de la droite - Rachida Dati, ex-ministre de la Justice du président Nicolas Sarkozy, nommée ministre de la Culture -, scelle aussi l'enterrement des promesses de renouvellement des pratiques politiques, sur lesquelles Emmanuel Macron avait bâti son accession au pouvoir en 2017.
Jamais élu auparavant, l'ex-banquier d'affaires avait alors vanté un "nouveau monde" et la recherche du compromis par le dépassement du clivage droite-gauche, couplée à une modernisation de l'exercice du pouvoir.
"L'ambition de départ a échoué parce qu'il est obligé, notamment avec ce remaniement, de faire avec la vieille politique: il va faire des débauchages chez ses opposants et cherche à amadouer ses alliés", diagnostique M. Perrineau.
En confiant en 2022 au camp macroniste une simple majorité relative à l'Assemblée juste après la réélection du chef de l'Etat, les électeurs "espéraient, peut-être naïvement, avoir le meilleur des différents camps" et faire émerger des compromis, estime Céline Bracq.
"Ça marche comme ça dans des démocraties comme l'Allemagne ou la Suisse où ça prend plus de temps mais où on arrive à des décisions", souligne-t-elle. En France, l'exercice solitaire du pouvoir d'Emmanuel Macron, mêlé à de nombreuses "tractations" ont selon elle "généré énormément de tensions politiques".