Des proies faciles pour les entreprises maghrébines


P.N*
Mardi 25 Décembre 2012

Des proies faciles pour les entreprises maghrébines
Toutes branches confondues (Incendie, Accidents, Risques Divers — Iard — et  Vie), le marché sénégalais de l’assurance ne pèse que 80 milliards Fcfa. En 2011, il a connu un petit taux de croissance de 5,5 % malgré la crise économique internationale. Mais en temps de crise, il n’y a pas de petits profits et ce marché suscite donc des appétits. Notamment, il attire des investisseurs marocains,  tunisiens, ivoiriens, français, etc…
Des investisseurs en quête d’opportunités et attirés par une Afrique sub-saharienne dont les économies sont en pleine croissance malgré l’instabilité politique qui prévaut dans certains Etats, notamment  au Nord-Mali envahi par des groupes islamistes armées.   Le marché sénégalais de l’assurance, donc, est dans le viseur des investisseurs étrangers et, en particulier, des géants marocains de l’assurance qui veulent se l’offrir après avoir fait main basse sur le secteur bancaire national. On le voit, la préférence nationale, si chère au président du patronat sénégalais, Baïdy Agne, n’a pas fini d’être poignardée… S’agissant plus précisément des compagnies d’assurance nationales, les lois et règlements ne votent pas à leur profit  tout simplement parce que tout ressortissant d’un pays membre de la Cima (Conférence interafricaine des marchés d’assurance) peut constituer une société anonyme ou une société  d’assurance mutuelle.
Toutefois, une société d’assurance ne peut se constituer sous la forme d’une société  anonyme unipersonnelle. À en croire un expert en assurance, une entreprise étrangère ne peut pratiquer sur le territoire d’un Etat membre de la « Cima », l’une des opérations mentionnées à l’article 300 du code « Cima ». Elle peut cependant, dit notre source, prendre une participation  dans les entreprises sous forme de société anonyme soumises au contrôle de la Commission régionale  de contrôle d’assurances (CRCA), un organe de régularisation de la Cima. Conclusion : « Si les Marocains ou les Tunisiens, par exemple, veulent venir sur le marché sénégalais des assurances, les tirs de barrage seront sans effet ! Car l’Etat du Sénégal ne peut tout au plus que contrôler la conformité des dossiers d’acquisition avant de les transmettre à la « Cima » pour agrément », nous explique cet assureur sénégalais avant de préciser que le taux de participation n’est  malheureusement  pas limité par la Crca.  « Il peut aller de 20 % à plus, si bien que les fuites de capitaux par le biais des revenus  distribués  sont une part non négligeable  de ressources  qui échappent aux pays de la Cima » précise notre expert.
Mieux, des professionnels du secteur nous ont assuré (sans jeu de mots !) que tous les pays de la Cima ont sur leur marché des sociétés d’assurances étrangères ou filiales de groupes étrangers.
Pour le Sénégal  sur 15 sociétés, les  groupes étrangers sont au nombre de quatre. Et si, en 2010, le chiffre d’affaires global du marché sénégalais était de 80 milliards, celui des sociétés étrangères tournait autour de 35  milliards Fcfa ! Tout cela pour vous dire que ces sociétés étrangères dominent largement aussi ce secteur de notre économie.  Et il faut dire qu’en plus des dividendes rapatriés, une part importante des primes d’assurances est virée à l’étranger par le biais de la réassurance. Or, la plupart de sociétés de réassurance sont étrangères au continent même si l’Afrique compte des réassureurs comme Africa-Re. Cela dit, une prime dérisoire de réassurance légale  est placée sur le marché local, le résultat de la  réassurance  toujours en faveur des réassureurs  sur le marché sénégalais en 2010  était  de 7 milliards Fcfa déjà supérieur  au résultat d’exploitation de l’ensemble des sociétés d’assurances sénégalaises. Conséquence : pour un meilleur contrôle du secteur des assurances  et des économies locales, les pays de la Cima gagneraient beaucoup à encourager et à appuyer les investisseurs locaux. Pour ce qui est du Sénégal, ce n’est pas l’expertise nationale qui fait défaut. Il se pose juste un problème de mise en commun de moyens pour redynamiser  la coassurance nationale  au détriment de la réassurance.  Faute de développer des synergies et de se regrouper, en effet, les compagnies d’assurances nationales constitueront des cibles trop faciles pour les entrepreneurs maghrébins (car elles sont insignifiantes pour les grands groupes européens), hélas…

*Articles publiés en collaboration avec
l’hebdomadaire sénégalais « Le Témoin »


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