Aziz Jriri, un univers onirique époustouflant

Jeudi 30 Janvier 2025

Aziz Jriri, un univers onirique époustouflant
Dans ses œuvres, l’artiste-peintre Aziz Jriri se base sur ces éléments du vocabulaire formel de son œuvre graphique pour nous révéler les richesses de la nature et ses composantes ainsi que ses songes, sa vision, sa perception du monde. Décidément, ce plasticien, natif d’Ain Taoujdate où il vit et travaille, s’inspire de sujets oniriques, ou fantasmagoriques mais ses œuvres restent cependant fidèles à la réalité de formes. 

Comme tout artiste-peintre figuratif digne de ce nom, Aziz Jriri favorise davantage les matières picturales. C’est l’essence même de l’œuvre de cet artiste inspiré qui s’attache à rendre l’étrangeté du quotidien à travers les natures mortes qui se traduisent par le trait, la touche et la couleur, mais aussi et surtout par son esprit. La splendeur et l’élégance de ses œuvres sont le fruit d’un travail particulièrement humain. Sa sensibilité aiguë à l’atmosphère, la sûreté de la composition, le contrôle exceptionnel de la palette caractérisée par une tonalité sourde, contrebalancée par les couleurs, sont tout simplement magnifiques. 

Il faut dire aussi que pour Aziz, l’art n’est pas une reproduction objective du réel, il en est l’interprétation à travers la profondeur et la force du style de la vision de l’artiste. En même temps, le propre de l’univers de cet artiste est d’être communicable et le monde nous apparaît dans son œuvre comme une « totalité détotalisée», selon l’expression de Sartre.

Comme les Nymphéas de Monet, sa peinture nécessite de prendre du recul: près du tableau, les jeux de matières, les larges aplats parsemés de touches et de points, à la limite de la projection. Ses choix se font par impulsions : dès lors qu’une représentation lui plait assez pour l’inspirer, il reste au plus près de ses formes, qu’il veut souples, variées et irrégulières, les plaquant sur les contours de son modèle. Mais quand viennent les couleurs, sa liberté se débride. Ici, aucune règle et surtout pas de fonction descriptive ou narrative. Le chromatisme vif et contrasté de ses peintures ne dépend que des rapports des tons entre eux, selon les surfaces qu’ils animent, de manière totalement subjective.

A partir d’un assemblage d’une multitude d’éléments photographiques, Aziz réalise une composition visuelle suffisamment aboutie pour passer à l’étape finale: la peinture. Après avoir transféré son image vers une toile, le travail de peinture consiste à reprendre l’ensemble de l’image pour en révéler son aspect final par l’équilibrage de la lumière, des contrastes et autres effets de matière. Ce qui lui permet de mieux mettre en œuvre son univers onirique. Il suffit de s’éloigner de quelques pas pour que la composition s’assemble, se construise et révèle son thème.

Le regard à l’oeuvre découvre alors des silhouettes suggérées qui évoluent si librement dans l’espace. Suggérées car les formes restent avant tout allusives, comme si les êtres devaient se fondre avec la nature, dans une harmonie qui exclurait toute vaine tentative de domination.

De l'amour à la quiétude en passant par la joie, l’espoir, entre autres thèmes, s’opère la magie de son travail et se manifeste l’immense filet de son expression artistique.  Tout cela se bouscule sur la toile en voisinages inattendus, suscitant chez le spectateur la surprise et le questionnement. Le rapprochement est tantôt éloquent, tantôt obscur, jusqu’à ce que l’effort soit fait de se laisser inviter dans cet univers et de s’en imprégner.

Bref, la palette est vibrante de transparences, au sein d’un geste sûr, magistral, poétique et émouvant. Les trouées de lumière nous entraînent au-delà même des limites du tableau. Devant ces frémissements de lumière, le souvenir de Monet s’empare de nous. C’est pourtant un autre monde, mais c’est bien la même magie.

Ayoub Akil

Libé

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